Ouvrant les travaux du congrès décennal sur les parcs naturels, le président de la République a affirmé que près du quart de la Zone économique exclusive du Gabon sera désormais classé en parcs nationaux marins.
Le Gabon va-t-il réellement devenir «La Mecque de la nature» qu’appelait Omar Bongo Ondimba de ses vœux en 2002 ? Se livre-t-il à de simples effets d’annonce ? Fait-il dans la surenchère et le spectacle ? Ou s’engage-t-il dans une voie sans issue, qui rendrait impossible la jouissance des bénéfices de l’exploitation des ressources naturelles renouvelables ?
Co-président du 6ème Congrès mondial des parcs, organisé par l’Union mondiale pour la nature (UICN), du 12 au 19 novembre courant à Sydney (Australie), le président de la République a annoncé le classement d’un réseau de parcs marins couvrant 23% de la Zone économique exclusive, y compris une extension du parc national de Mayumba. Ali Bongo a pris soin de préciser que des zones de pêche communautaire et industrielle ainsi que des zones d’exclusion visant à protéger l’infrastructure pétrolière seront délimitées. La superficie des parcs marins ainsi créés serait de 5 998 400 ha, soit près du double des espaces occupés par aires protégées terrestres, qui couvrent 3 617 038 ha dont 2 467 131 pour les parcs nationaux et 1 149 907 pour les autres espaces classés.
Matérialisation du programme «Gabon bleu» piloté par l’explorateur américain Mike Fay, cette annonce du président de la République étonne et détonne. Certes, cette décision vise à répondre aux recommandations de la Convention sur la diversité biologique (CDB) de l’ONU de faire en sorte qu’au moins 17% des terres et 10% des océans fassent partie du réseau d’aires protégées d’ici à 2020. Certes, le Gabon est considéré, sur ce point, comme un bon élève avec son pourcentage de couverture du territoire par les aires protégées estimé à près de 14% dont environ 11, 25% pour les parcs nationaux. Mais, on ne peut que s’interroger sur la portée et le réalisme d’une telle décision. Car, les liens biogéographiques comme les courants de Benguela et le contre-courant de Guinée, les échanges biologiques avec la migration des espèces ainsi que la dynamique sociale et économique avec la pêche artisanale et industrielle, obligent à s’inscrire dans une dynamique régionale. Cette annonce a-t-elle fait l’objet d’une concertation préalable avec nos voisins que sont le Congo, la Guinée équatoriale et Sao Tomé et Principe ? Garant des Conventions de Genève et surtout de Montego Bay sur le droit la mer, le ministère des Affaires étrangères a-t-il été impliqué en amont dans ce projet ? Au-delà des moyens logistiques colossaux que la gestion de ce réseau pourra nécessiter, il y a d’interroger les aspects institutionnels.
Quoi qu’il en soit, placé sous le thème général «Des parcs, la planète et nous : des solutions sources d’inspiration», la rencontre de Sydney se décline en 3 priorités stratégiques, à savoir : valoriser et conserver les parcs, trouver des solutions «naturelles» face aux changements de la planète, et asseoir une gouvernance efficace et équitable des services rendus par la nature. Pendant ces 6 jours, il s’agira de définir l’agenda international et les moyens d’atteindre les objectifs de conservation et de développement pour la décennie à venir, alors qu’une étude scientifique tire la sonnette d’alarme, en regrettant l’inaction des gouvernements dans la lutte contre la détérioration des aires protégées, au risque d’en perdre les bénéfices sociaux, écologiques et économiques.
Au cours de son séjour australien, Ali Bongo Ondimba accordera plusieurs audiences à des responsables autochtones, des personnalités politiques et des chefs d’entreprise, parmi lesquels Zhang Xinsheng, le président de l’UICN, Naoko Ishii, directrice générale du Fonds pour l’environnement mondial et John Scanlon, le secrétaire général de la Convention sur le commerce International des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction.