Pour augmenter sa production, Libreville a relancé l'attribution de permis offshore. Mais chez les opérateurs, on s'inquiète de la volonté de l'État de récupérer une plus grande part des recettes pétrolières.
Après des mois d'âpres négociations, le Gabon a signé, en août, sept nouveaux permis d'exploration en eau profonde, susceptibles de générer jusqu'à 1,1 milliard de dollars d'investissements (862 millions d'euros), selon le ministère du Pétrole. C'est la fin d'un long feuilleton : l'appel d'offres avait été lancé en 2010, puis suspendu pour permettre au gouvernement de plancher sur le nouveau code des hydrocarbures, voté en juin et adopté récemment.
Le processus s'est accéléré fin 2013 avec l'attribution provisoire de 13 blocs - sur 42 - à un groupe de 11 sociétés pétrolières. S'en est suivie une série de rebondissements, dont la suppression de la liste de trois compagnies juniors, en mai, à cause de leurs "capacités d'investissements insuffisantes", tandis que d'autres, absentes au départ, ont fait leur apparition en cours de route.
Le changement d'approche du gouvernement, qui se veut plus strict en matière d'audit et de gestion du secteur, explique les modifications successives de la liste des entreprises censées remplir les conditions pour négocier de nouveaux contrats.
L'issue des tractations a donc amené son lot de surprises. Les sociétés Impact (Royaume-Uni), Repsol (Espagne), Marathon (États-Unis), Noble Energy (États-Unis), Petronas (Malaisie), et Woodside Petroleum (Australie) ont signé des contrats d'exploration et de partage de production (CEPP) avec l'État gabonais. Woodside Petroleum a décroché le bloc F-15 avec Noble Energy, alors qu'il n'avait pas été invité au round final de négociations, lancé fin juillet.
À l'inverse, le géant américain ExxonMobil ne fait pas partie des signataires, le bloc C-11 qu'il convoitait n'ayant pas été attribué. Quant aux deux opérateurs historiques au Gabon, Total et Shell, ils avaient été invités en mai à la table des discussions bien que leurs offres aient été jugées trop basses, mais cela n'a pas abouti.
Déclin
La lenteur du processus d'attribution des permis est d'autant plus surprenante que le pays, dont le budget dépend pour une grande part des recettes pétrolières (60 %), doit absolument attirer de nouveaux investisseurs. La production nationale est tombée à 230 000 barils par jour - contre 350 000 barils par jour à la fin des années 1990. Et malgré les investissements menés pour redévelopper certains champs matures comme Anguille (Total) et mettre en production des découvertes mineures pour compenser le déclin des champs historiques de Rabi et Gamba (Shell), la production devrait décliner à un rythme de 5 000 barils par an.
Dans ce contexte, l'État ne joue cependant pas l'apaisement avec les compagnies pétrolières. Plus que jamais, Libreville semble décidé à renforcer son contrôle et à récupérer une plus grande part des recettes pétrolières, notamment à travers la montée en puissance de la compagnie nationale Gabon Oil Company, qui peut désormais acquérir 15 % de tout nouveau contrat signé avec l'État.
Le nouveau code des hydrocarbures - qui ne s'applique pas aux sept CEPP signés avant son adoption -, durcissant les conditions d'investissement, est d'ailleurs très critiqué par les opérateurs, qui affirment ne pas avoir été consultés.
L'Union pétrolière gabonaise (Upega), principal syndicat patronal, a notamment dénoncé le "caractère répressif", les "imprécisions" et les "contradictions" du code ainsi que l'"insécurité juridique" qui en découle, dans un courrier à Étienne Ngoubou, le ministre du Pétrole, le 26 juin.
"Une société met 150 millions de dollars dans un projet d'exploration, et l'État peut lui infliger des amendes ou lui retirer le contrat pour un oui ou pour un non, c'est ce que dit le code, et c'est contre-productif !" s'insurge un opérateur.... suite de l'article sur Jeune Afrique