«L’affaire Péan», consécutive à la parution du livre de Pierre Péan «Nouvelles affaires africaines», prend une tournure judiciaire, tandis Billie By Nzé soutient que ce livre sera le dernier de la vie du journaliste-écrivain.
Alors que notre confrère L’Union, dans son édition des 8 et 9 novembre 2014, indiquait que «l’Etat porte plainte contre Pierre Péan» sans donner plus de précisions, un communiqué de l’«Ambassade Haute représentation de la République gabonaise près la République française», daté du 8 octobre et largement diffusé, confirme l’entame de la procédure judiciaire.
«Les autorités gabonaises ont décidé de porter plainte contre Pierre Péan et son éditeur suite à la publication du livre intitulé «Nouvelles affaires africaines». La République gabonaise ne peut accepter les propos gravement diffamatoires et totalement faux tenus par Pierre Péan dans cet ouvrage. Les conditions douteuses de son écriture ainsi que l’intention de l’auteur de se situer, de son propre aveu, dans le cadre de la future campagne présidentielle au Gabon, éclairent la profonde malveillance de ce livre. En raison de la gravité de ces actes, les autorités gabonaises ont saisi les juridictions française compétentes», indique le communiqué de la représentation diplomatique du Gabon en France.
Si l’ambassade n’indique pas l’infraction objet de cette plainte, le porte-parole de la présidence de la République, Alain-Claude Billie By Nzé, passant sur l’émission Focus de la télévision Voxafrica, a laissé entendre que la plainte porte sur «un certain nombre d’éléments de ce livre. A la fois sur des questions de diffamation évidentes, [que] sur des questions d’affirmations gratuites, sans preuves.» Par ailleurs, laissant entrevoir la ligne de défense des plaignants, Billie By Nzé a souligné au sujet de Pierre Péan : «Ca va être le dernier ouvrage de sa vie. Parce que celui-ci, on va le démonter page par page. Sur un plan journalistique et professionnel : c’est nul, ca ne vaut rien. Aucun équilibre de l’information ! Sur le plan de la rigueur : aucune vérification des faits. Ensuite sur le plan de l’éthique : ce monsieur a simplement voulu monnayer la parution ou non de son ouvrage. Si nous avions marché, c’est 10,150 millions euros que l’Etat gabonais aurait payé. […] Si Ali Bongo avait accepté de payer, aujourd’hui on ne parlerait pas de ce livre.»
Pour de nombreux commentateurs, le pouvoir gabonais n’avait d’autre choix que de déposer plainte. Il y en allait de sa crédibilité et de son honneur. N’empêche, certains y voient une dérobade, se demandant pourquoi l’Etat s’est senti obligé de porter plainte alors que c’est davantage Ali Bongo qui est mis en cause. L’on se souvient en effet qu’en 2012, Yannick Jadot, ancien porte-parole d’Eva Joly, avait été poursuivi en justice, pour diffamation et injure, au nom d’Ali Bongo lui-même qui avait été traité de «dictateur» à qui on pouvait imputer des «massacres contre son peuple».
Les autorités gabonaises auraient-elles tenté d’échapper aux tests ADN réclamés à cors et à cris par une certaine opinion dont des leaders politiques tels Pierre-André Kombila Koumba (lire) ? Aurait-il voulu contourner la question de l’extrait de naissance querellé ?
En tout cas, Pierre Péan qui, en mars 2014, soutenait dans Le Figaro, «J’ai la peau dure, j’ai eu au moins une cinquantaine de procès», se retrouve au cœur d’une polémique retentissante. Arrive-t-on donc, ainsi que l’a promis Billie By Nzé sur Voxafrica, au terme de la carrière de cet écrivain provocateur qui, à 76 ans, comptabilise, selon ses dires, des «pressions épouvantables» et «deux attentats» ? Une chose est sûre, Patrick Maisonneuve et Georges Arama, avocats habituels d’Ali Bongo, ont à nouveau une «affaire africaine» à traiter.