De 6,1% en juillet, les prévisions de croissance économique des six pays de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (CEMAC), à savoir le Cameroun, la Centrafrique, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale et le Tchad, sont ramenées à 5,6% pour 2014, a annoncé mardi la Banque des Etats de l'Afrique centrale (BEAC) basée à Yaoundé, au Cameroun.
"Nous étions beaucoup plus optimistes lors des prévisions initiales", a souligné à la presse le gouverneur de la BEAC, l' Equato-Guinéen Lucas Abaga Nchama, au terme d'une session ordinaire du comité de politique monétaire (CPM) de cette banque centrale régionale qu'il préside.
Des six pays membres de la CEMAC, seule la République centrafricaine (RCA) n'est pas productrice de pétrole. Tous sont cependant exportateurs de matières premières. Or, en raison de la conjoncture internationale encore fragile, un risque de voir la demande baisser guette ces économies, a expliqué le gouverneur de la BEAC.
"L'économie mondiale, a-t-il précisé, est caractérisée par une reprise médiocre. En dehors des Etats-Unis, la plupart des pays avancés connaissent un ralentissement. Dans la zone euro, les risques de déflation sont en vigueur. Pour les pays émergents, le deuxième trimestre est marqué par une reprise lente de certains dinosaures,comme la Chine ou l'Inde".
Dans ce contexte, le Fonds monétaire international (FMI) a récemment abaissé ses prévisions de croissance mondiale à 3,8%.
Pour autant, le comité de politique monétaire de la BEAC estime que la révision à la baisse des indicateurs économiques régionaux n'est en rien synonyme de contreperformance. Selon son gouverneur, "l'heure est plutôt à l'accélération de la croissance", après une performance de 1,4% en 2013.
A l'appui de son argumentaire, Lucas Abaga Nchama cite l' exemple du Tchad où les prévisions annoncent une croissance à deux chiffres, de l'ordre de plus de 12%.
Dans un premier temps, la banque centrale régionale avait tablé sur un taux de 5,3% lors de la dernière session ordinaire de son comité de politique monétaire en décembre 2013. Deux facteurs sont mis en avant pour justifier ces perspectives économiques : la reprise de l'activité pétrolière et la bonne tenue du secteur non pétrolier, portés respectivement à 2,5 et 6,7% de croissance.
A 97% des importations, la zone CEMAC se réjouit au demeurant d' un taux de couverture extérieure de la monnaie qui "reste assez solide",de l'avis de M. Abaga Nchama qui a en outre faite état d' une augmentation du volume des crédits et d'un "niveau confortable " des réserves de change.
Un bémol cependant, en se hissant à 3,7%, cet espace communautaire a dépassé sa propre norme pour l'inflation fixée à 3% de plancher. En cause : la hausse de la demande intérieure.
Au Congo et en Guinée équatoriale par exemple, c'est l' augmentation des effectifs des salariés qui est mentionnée, tandis qu'en RCA la crise politico-militaire crée des problèmes d' approvisionnement en produits de consommation, surtout avec "l' arrivée massive des forces onusiennes et des bailleurs de fonds", note Lucas Abaga Nchama.
Le cas centrafricain est intéressant dans la mesure où le gouvernement a adopté en septembre un Programme d'urgence pour le relèvement durable (PURD) pour la période 2014-2016 qui, 576,5 milliards de francs CFA (1,153 milliard de dollars), après une contraction de 36,7% en 2013, entend relever la croissance à 1,3% en 2014, puis la consolider à 5,1% en 2015 et à 8,2% en 2016.
"Un taux autour de 1% n'est pas impossible. Il y a un léger mieux.Il y a beaucoup de promesses au niveau des bailleurs de fonds, des institutions de Bretton Woods. Il y a une conférence des donateurs qui se profile à l'horizon pour appuyer la RCA, mais aussi la sous-région (en faveur de la consolidation de la paix et de la stabilité, NDLR)", résume le patron de la banque centrale.
Il reste que la zone CEMAC est pour l'heure loin de relever le défi d'une croissance inclusive et créatrice d'emplois pour réduire significativement la pauvreté dans laquelle baigne l' immense majorité des populations de la région.
Afin de booster la croissance, la BEAC a décidé lors de sa réunion du comité de politique monétaire tenue mardi son siège à Yaoundé de "maintenir inchangé (son) principal taux directeur" et de "relever le plafond de financement des économies" nationales.
A titre d'illustration, pour les pays situés à 2 milliards de francs CFA (4 millions de dollars), le plafond de financement a été porté à 20 milliards (40 millions de dollars), a indiqué Lucas Abaga Nchama sans citer les pays. Pour ceux où il était de 10 milliards (20 millions de dollars), le montant a été relevé à 60 milliards (120 millions de dollars), apprend-on par ailleurs.