Des conflits de personnes inextricables, de vieilles rancunes remises au goût du jour, des oppositions frontales, des rivalités insoupçonnables mais bien présentes, des palabres à n’en plus finir, le PDG vit, dans le Septentrion, une lente et douloureuse agonie. Le Pr Daniel Ona Ondo qui semble ni rusé, ni habile, ne donne pas l’impression d’être celui qui peut «éteindre le feu dans la maison».
Le PDG n’est pas un parti de débat. C’est un parti à palabres. Partout, il y a des camarades qui fonctionnent le plus souvent au mépris, parfois à la haine. Dans l’Estuaire, il est de notoriété publique que Léandre Nzué, secrétaire général adjoint du parti, et Paul Biyoghé Mba, membre du Comité permanent du Bureau politique, se disputent le leadership à l’échelle provinciale. Ni le secrétariat exécutif, ni le Bureau politique du PDG n’ont tranché la question relative à la préséance protocolaire. Dans la Ngounié, Dieudonné Claude Dibadi Mayla, l’inattendu 3ème secrétaire général adjoint du parti, a volontairement choisi de s’effacer et laisser la prédominance protocolaire aux deux «roitelets» de la province, Guy Bertrand Mapangou qui, «auréolé» de son titre de ministre de l’Intérieur, ne tient pas à s’en laisser conter, et Yves Fernand Manfoumbi, directeur général du Budget et, à ce titre, tiroir-caisse de la province. Les deux sont membres du Comité permanent du Bureau politique. Dans l’Ogooué-Maritime, Michel Essonghé, membre du Comité permanent, se pose comme la «figure tutélaire» de la province pétrolière. C’est à son bureau de PDG de Ceca-Gadis, situé en plein centre-ville, que le SGA du parti pour l’Ogooué-Maritime, Jean-Marie Koumba Souvi, vient prendre chaque semaine des instructions, mais à qui revient en fait la préséance ?
«Je ne serai pas à Oyem le 25 octobre», déclare François Engongah Owono
Quand il ne s’agit pas de problème de préséance, c’est le refus des décisions du secrétariat exécutif qui se pose. Dans le Woleu-Ntem, «la province de tous les espoirs (militants), la province de toutes les attentes (électorales), la province dans laquelle le candidat naturel du PDG vise au moins 40% des voix» , le Parti démocratique gabonais est en état de délabrement, de désagrégation, de décomposition avancée», pense un ancien ministre présent à la réunion convoquée mercredi dernier par les «Camarades membres du Comité permanent du Bureau Politique», Daniel Ona Ondo et René Ndemezo’Obiang, au siège de ce parti à Louis. Les questions essentielles sont ignorées et délibérément laissées de côté. La camaraderie, la fraternité, le sens de la chose commune, ont été rangés au vestiaire. Le Woleu-Ntem PDGiste est en lambeaux.
Lors de cette réunion des hauts cadres du parti, dont l’objet était entre autres de fixer la date d’installation des nouveaux responsables locaux du parti (secrétaire provincial, secrétaires départementaux et communaux, et secrétaires d’arrondissement) et le montant des cotisations relatives à cette cérémonie, des éclats de voix se sont fait entendre. La pomme de discorde était justement la récente désignation, par le Parti, de ses responsables locaux dans la province. Membre du Bureau politique, ancien ministre d’Etat et ancien président d’institution, François Engongah Owono dit Eboué a lancé : «J’ai l’impression que l’on bafoue les règles, et cette situation n’augure rien de bon, elle va avoir des effets négatifs ; on va vers des difficultés sur le terrain». Et de conclure : «je ne serai pas le samedi 25 octobre à Oyem» pour la cérémonie d’installation.
René Ndémezo’Obiang : «Je serai à Oyem parce que je suis un militant discipliné»
Un autre acteur majeur de la vie politique locale, René Ndemezo’Obiang, ministre de tous les gouvernements de 1999 à 2011, et ancien SGA du PDG, affirme que «en militant discipliné, il se rendra à Oyem (aujourd’hui)». Il n’exprime pas moins, cependant, sondésaccord sur la procédure ayant conduit à la désignation des nouveaux responsables locaux du parti à Bitam et ne manque pas de dire ses craintes pour l’avenir. D’autres militants vont tirer à hue et à dia sur le secrétariat exécutif, responsable, à leurs yeux, de ne pas tenir compte des desiderata de la base. D’autres encore qualifieront de «désordre organisé» ce qui se passe actuellement dans le Woleu-Ntem.
Est-ce Daniel Ona Ondo, le «premier responsable politique de la province», dans le lexique PDGiste, qui a transmis les noms des camarades honnis au «Distingué Camarade» ? Personne ne l’a clairement dit, mais beaucoup – à l’instar de François Engongah Owono – soupçonnent une manœuvre de l’actuel Premier ministre. Le membre du Comité permanent du Bureau Politique, élu de terrain depuis 1996, a-t-il voulu ignorer que le PDG compte des écuries en son sein, et que chacune de ces écuries tient à avoir une réelle représentativité au niveau local ?
Dans toutes les têtes, la démission de Raymond Ndong Sima du Bureau politique
La réunion du mercredi 22 octobre dernier a pâti d’un malheureux concours de calendrier : la récente démission de l’ancien Premier ministre Raymond Ndong Sima du Bureau politique du parti était dans toutes les têtes. Ses partisans, nombreux dans la salle, ont dénoncé le fonctionnement actuel du parti dans le Septentrion. En tout cas, aujourd’hui, le PDG se retrouve en lambeaux, chaque écurie tirant la couverture de son côté. Quoi qu’on dise, cette démission montre l’état des rapports entre camarades PDGistes, et révèle les tensions entre écuries. Autre malaise : la diffusion par la Fédération C du Canton Kyé à laquelle appartient Raymond Ndong Sima d’un communiqué qui n’était visiblement pas fait pour ramener le calme. Le porte-parole de cette Fédération, Patrick Minang, invité du «20-heures» de Gabon Télévision mercredi soir, est venu annoncer que la fédération prenait acte de la démission de Raymond Ndong Sima du Bureau politique, et que cette fédération resterait dans le PDG et assure qu’elle apportera toujours des victoires au Parti démocratique gabonais. Avec ou sans Ndong Sima en quelque sorte. C’est en tout cas ainsi que certains militants ont compris ce communiqué. Comme on le voit, le PDG est toujours prompt à brûler ses militants, dès que ceux-ci expriment une certaine humeur… Et déjà, on annonce, avant même que le Parti ait pu tenter de dissuader Ndong Sima de s’en aller, l’arrivée au Bureau Politique de Jean-Philippe Ndong Biyogho, l’un des deux secrétaires généraux de ministère qu’avait pu nommer Raymond Ndong Sima, alors Premier ministre.
Dans cet imbroglio qui règne dans la province, Daniel Ona Ondo n’apparaît pas comme celui qui peut rappeler tout le monde à l’ordre et être entendu par eux. Il a lui-même trop prêté le flanc… Il y a un fait évident : le PDG est en état de décomposition dans le Nord. Quelques personnalités présentes ont laissé percer leur inquiétude : «le Premier ministre peut-il à la fois s’occuper pleinement de l’intendance locale et des dossiers de l’Etat et ne pas y laisser la peau ?». Pour beaucoup d’entre elles, Daniel Ona Ondo devrait prendre un peu de recul dans les affaires politiques woleuntémoises pour ne pas être très vite calciné ! De plus cela pourrait ramener un climat apaisé.