Revendications salariales dans les secteurs de l’Education, de la Santé, des Travaux publics, bref, quasiment dans tous les domaines d’activité, le Gabon, depuis quelques temps vit au rythme des marches et autres grèves de la part des fonctionnaires. Et le gouvernement peine visiblement à venir à bout du problème. Des questions surviennent : qu’est-ce qui bloque ? Qui gère les finances du pays ? L’enquête sommaire d’un confrère confidentiel.
Depuis plusieurs années, le pays fait face à de nombreuses revendications des fonctionnaires de différents secteurs d’activité. De la Santé à l’Education en passant par le Transport ou les Travaux publics, les Gabonais, agents de l’administration publique ou simples ouvriers, font de plus en plus des réclamations par rapport au traitement auquel ils sont soumis. Revendications relatives à un meilleur traitement salarial, doléances en rapport avec leurs conditions de travail jugées difficiles et inappropriées pour le rendement qui leur est demandé, la vie du pays est rythmée par d’innombrables mouvements d’humeurs. L’année qui s’achève, avec la colère des élèves et celle des enseignants à travers le pays, aura été l’une des plus représentatives à ce propos. C’est à se demander si l’argent -puisqu’il s’agit bien de cela- n’est plus disponible dans les caisses de l’Etat pour satisfaire les nombreuses revendications. Le blocage viendrait-il des ministres incriminés ou des gestionnaires des finances du Gabon ? Autant d’interrogations qui ont poussé à une enquête de La Lettre du continent (n°672).
Une chose semble en tout cas claire et indéniable : l’incapacité du gouvernement à satisfaire les revendications salariales de ses agents. Ce qui renvoi à une réalité unique : la gestion des finances du pays par la présidence de la République. En effet, bien que le Premier ministre Raymond Ndong Sima ait donné des signes positifs quant à la résolution du problème, il est un fait : la sortie ou non de l’argent pour satisfaire les grévistes ne dépend pas de lui. Et pour cause : « il n’a aucune prérogative sur les finances du pays. Celles-ci sont tenues au Palais du bord de mer par l’incontournable directeur de cabinet d’Ali Bongo, Maixent Accrombessi. Ce dernier a su tisser autour de lui un solide réseau de « frères de lumière » qui chapeaute aujourd’hui l’ensemble des régies financières du pays », indique La Lettre du continent. Toutes les décisions proviendraient donc de la Présidence et de nulle part ailleurs, ainsi que le commun des Gabonais avait d’ailleurs tendance à le croire… un peu naïvement. Vu sous cet angle, cela revient à dire (si l’on ose) que le Trésor public, lui non plus, n’intervient qu’à des niveaux moindres dans le financement de la Prime d’incitation à la fonction (Pife), la Prime d’incitation à la recherche (Pir) et autres revendications émises jusque-là. Tout est donc décidé et contrôlé depuis le Haut. Mais pas seulement.
Le média confidentiel révèle notamment que « les ministres Luc Oyoubi (Economie) et Christiane Rose Ossoucah-Raponda (Finances) servent surtout d’interlocuteurs aux partenaires internationaux du Gabon, la politique financière est déterminée par le DG du Budget au ministère des Finances, Yves-Fernand Mamfoumbi. Membre de la Grande Loge du Gabon (GLG) dirigée par le chef de l’Etat, celui-ci ne rend compte qu’au directeur de cabinet. C’est également le cas du patron des douanes, Michel Ondinga Ngouengué. Ce Bahouin de Franceville, chef-lieu du Haut-Ogooué, par ailleurs membre de la GLG, a rejoint la galaxie Accrombessi après avoir soutenu Paul Toungui, compagnon de Pascaline Bongo et ex-ministre des affaires étrangères, actuellement en totale perte de vitesse. »
De même, indique la Lettre, « le DG du contrôle financier au ministère de l’Economie, Jean-Fidèle Otandault, n’est pas en reste. De mère béninoise comme Maixent Accrombessi, cet autre « frère » de la GLG est également associé à la définition de la politique financière du pays, tout comme Serge Mickoto, beau-frère d’Ali Bongo et actuel directeur du Fonds gabonais d’investissements stratégiques (FGIS). Même si elle n’est membre d’aucune loge maçonnique, Yolande Okoulatsogo, qui chapeaute le Trésor public, appartient aussi à ce cercle. D’ethnie téké d’Akiéni, elle a longtemps été proche de Jean-Boniface Assélé, oncle du président gabonais. » Comme quoi les finances du pays se gèrent en « famille »… pour le bien de l’Etat.
Même si, indique-t-on, il manquerait une chose à la cette grande famille de gestionnaires : le contrôle total du groupe BGFI, perçu comme la « caisse du régime » et assurant la gestion des grands comptes de l’Etat, ainsi que les recettes pétrolières. Le départ d’Henri-Claude Oyima de la tête de la Confédération patronale du Gabon (CPG), annonce-t-il, à long terme, la maîtrise intégrale des rouages financiers du pays par le fameux clan des gestionnaires issus pour la plupart de la GLG ? Lui qui, depuis 1986, contre vents et marrées patronne ledit groupe bancaire. Bien malin qui le dira.