Par un communiqué laconique lu par son porte-parole, le gouvernement a annoncé, le 31 août dernier, que le ministre de l’Education nationale et l’Enseignement technique et professionnel, empêtré dans l’affaire dite des «Recalés du Bac 2014» avait donné sa démission au Premier ministre avant que le président de la République n’en prenne acte.
Le fait est suffisamment rare sous nos latitudes pour qu’il fasse date : Léon Nzouba a officiellement démissionné, le 31 août, de ses fonctions de ministre de l’Education nationale, de l’Enseignement technique et professionnel. C’est par un communiqué laconique lu par le porte-parole du gouvernement que la nouvelle a été rendue publique. De sources concordantes, on a aussi appris que le Président de la République avait pris acte de cette démission présentée au Premier ministre.
Le porte-parole du gouvernement n’a, pour autant, pas présenté la lettre à travers laquelle le désormais ancien ministre explique ses raisons. Du coup, les supputations vont bon train : Léon Nzouba a-t-il démissionné ou a-t-il été démissionné ? Depuis plusieurs jours, de nombreuses forces sociales, singulièrement la presse, appelaient à sa démission. A travers deux articles («Retour au Baccalauréat avec 10/20 : après la loi, la politique» et «Léon Nzouba ne devrait-il pas démissionner ?») publiés coup sur coup, Gabonreview, avait notamment affirmé que la situation était devenue intenable. «Daniel Ona Ondo n’a d’autre choix que d’affronter cette équation qui se pose à tous les Premiers ministres en pareilles circonstances : demander sinon le départ, du moins la mutation du ministre fautif, au risque de laisser croire que la crédibilité de notre système éducatif lui importe peu », pouvait-on lire sur ces pages web le 22 août dernier. «Léon Nzouba ne pourra pas se contenter de n’être que le responsable du service après-vente de cette décision gouvernementale. Tout se passe depuis quarante-huit heures comme si le patron de l’Education nationale avait pris cette décision tout seul sans se référer au chef du gouvernement. Si Daniel Ona Ondo, lui, a déjà avalé son chapeau et ravalé ses grandes ambitions pour son équipe, Léon Nzouba, lui, est-il homme à se laisser désavouer aussi publiquement, aussi solennellement ? Si le Conseil des ministres, si le porte-voix du Palais du Bord de mer, désavouent un ministre, que peut-il rester à faire à ce membre du gouvernement ?», s’interrogeait Gabonreview le lendemain.
A l’évidence, le désaveu public dont il a été l’objet a eu raison du médecin-militaire. Et s’il avait encore la possibilité de plier sans rompre, de faire le dos rond en attendant que tempête passe, les prises de position de Marcel Libama et Me Gisèle Eyué sont venues pourrir davantage une situation déjà dégradée. En exigeant, sur la base de la loi, l’organisation d’une session orale au bénéfice des élèves ayant obtenu des moyennes supérieures ou égales à 8/20, la Convention nationale des syndicats du secteur éducation (Conasysed) et l’avocate ont fini par donner le sentiment que le gouvernement avait perdu le contrôle de la situation. On en vient à s’interroger sur le devenir de la plainte pour «cessation de trouble» qui doit contraindre le gouvernement à reconsidérer sa position.
Outre les lycéens en grève de la faim sur le parvis de la cathédrale Notre Dame de l’Assomption de Libreville pour réclamer leur admission au premier diplôme universitaire, l’affaire dite des «Recalés du Bac 2014» a mis en scène 6 autres protagonistes. Avant Marcel Libama et Gisèle Eyué, c’est le porte-parole de la présidence de la République, Alain-Claude Billie By Nzé, qui avait rappelé qu’«on n’obtient pas le bac par la grève de la faim», relayant la position duConseil des ministres qui, en sa séance du 20 août, s’était dit opposé à la décision du ministre en charge de l’Éducation nationale de permettre l’admission des élèves sur la base d’une moyenne supérieure ou égale de 8/20, affirmant que «les attestations de réussite ne seront délivrées qu’aux seuls candidats au Baccalauréat, session 2014, ayant obtenu une moyenne minimale de 10/20 à l’issue des épreuves du premier et du deuxième groupe». Quelques jours avant, c’est le bureau du Syndicat national des enseignants et chercheurs (Snec) qui demandait à ses membres de refuser d’apposer leurs signatures sur ce qui avait été qualifié d’«attestation de réussite au Baccalauréat de la honte, édition Léon Nzouba 2014». C’en était trop…