Suite à l’audit des Comptes publics lancé en janvier dernier par la Direction Générale du Contrôle des Ressources et des Charges Publiques (DGCRCP) afin d’assainir les finances de l’Etat, c’est un vaste réseau de détournement qui a été découvert et qui vient ainsi jeter un sérieux discrédit sur le rôle des institutions en charges du contrôle de l’exécution de la loi de finances, telles que la Cour des Comptes et l’Assemblée Nationale.
En bloquant pendant six mois à compter du 31 décembre 2013, les paiements de l’Etat dûs aux entreprises fournisseurs afin de voir clair dans les livres du Trésor, la DGCRCP a mis la main sur un important réseau de détournement des dépenses publiques dont les montants donnent le tournis.
Un grand ménage qui vient jeter un sérieux doute sur l’efficacité de nos fonctionnaires de la Cour des Comptes, et de nos députés de la commission de finances de l’Assemblée nationale.
En effet, comment comprendre que pendant dix ans, avant le haro de la DGCRCP, l’Etat exécutait des dépenses frauduleuses au nez et à la barbe des députés et des magistrats financiers dont le rôle est de veiller au contrôle de l’exécution de la loi de finances ?
Selon l’article 14 de la Déclaration des Droits de L’Homme et du citoyen de 1789 et l’article 47 de la Constitution gabonaise, en substance, les députés, au nom du peuple, contrôlent l’action du gouvernement.
Ils ont un pouvoir budgétaire qui s’exerce lors du vote de la loi de finances qui détermine les charges et les ressources de l’Etat.
Ainsi, les députés en épluchant les crédits alloués aux administrations auraient dû déceler les fraudes découvertes par la DGCRCP, surtout en ce qui concerne les lignes budgétaires pluriannuelles.
Lors du vote en séance plénière à l’Assemblée nationale, chaque membre de la Commission finances aurait pu se rendre compte que tel montant alloué à sa circonscription est détourné. Ou encore que les travaux initiés l’année précédente dans son département n’avaient jamais été menés jusqu’à leur terme, et comprendre ainsi que les fonds alloués à ces travaux n’ont pas été utilisés à cette fin. A moins qu’ils ne soient eux-mêmes à l’origine des faits qu’ils auraient du dénoncer…
Même interrogation pour la Cour des Comptes où les magistrats qui y exercent sont mieux outillés que les députés pour aborder les questions financières de l’Etat. D’autant que sur le plan juridique, les magistrats financiers bénéficient de pleins pouvoirs en la matière. Car l’article 76 de la Constitution prévoit en substance que la Cour des comptes est chargée du contrôle des finances publiques. A cet effet :
- elle assure le contrôle de l'exécution des lois de finances et en informe le Parlement et le Gouvernement ;
-elle vérifie la régularité des recettes et des dépenses décrites dans les comptabilités publiques et s'assure, à partir de ces dernières, du bon emploi des crédits, fonds et valeurs gérés par les services de l'Etat ou par les autres personnes morales de droit public.
C’est certainement le manque de crédibilité de ces deux institutions dans l’exécution de leurs tâches qui explique la décision du président Ali Bongo Ondimba de créer à l’issue du Conseil des Ministres du 15 septembre 2011, la Direction Générale du Contrôle des Ressources et des Charges Publiques (DGCRCP) avec pour missions de renforcer le contrôle des ressources et charges publiques.
Maintenant, osons croire que cette initiative de la DGCRCP va montrer l’exemple aux autres institutions de la République atones, pourtant chargées ou consultées dans la gestion des deniers publics mais qui, pour cacher leur vacuité, se cachent dans un silence approbateur des fossoyeurs de la République.
En outre, la DGCRCP ayant fait son travail, la prise du relai, par la machine judiciaire est d’ores et déjà vivement attendue, le contribuable gabonais étant très impatient de voir les auteurs de tels crimes économiques répondre de leurs actes.