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[Paru sur le Gabon] Le coup d’État parfait : comment le général Oligui a dupé tout un régime
Publié le mercredi 28 aout 2024  |  Gabon Review
Oligui
© Gabon Review par DR
Oligui Nguema, l’homme sur qui Ali Bongo comptait pour assurer son maintien au pouvoir, est devenu l’architecte de sa chute.
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Trahisons, corruptions et coups bas : un an après le putsch qui a renversé Ali Bongo, ‘Jeune Afrique’ lève le voile sur les secrets inavouables du coup d’État au Gabon. De réunions clandestines en tentatives de corruption à hauteur de milliards, en passant par un général jouant double jeu, le journal panafricain livre les coulisses d’une machination politique qui a changé le destin d’une nation. Des révélations explosives qui éclairent d’un jour nouveau la chute d’une dynastie et l’ascension fulgurante d’un homme de l’ombre.

Le 30 août 2023, le Gabon s’éveillait sous le choc d’un coup d’État mettant fin au règne de la famille Bongo. Un an plus tard, une enquête publiée le 26 août 2024 par le journal panafricain ‘Jeune Afrique’, sous la plume de Jeanne Le Bihan lève le voile sur les coulisses de ce bouleversement politique, révélant un enchevêtrement de manœuvres, de trahisons et de calculs ayant façonné l’histoire du pays autour de l’élection présidentielle qui a tout changé.

Le double jeu du général Oligui Nguema

Au cœur de cette tragédie politique se trouve le général Brice Clotaire Oligui Nguema, figure centrale dont le double jeu a scellé le sort du régime Bongo. Présenté comme le garant de la stabilité du pouvoir, il s’est révélé être l’architecte de sa chute. Citée par Jeune Afrique, une source haut placée au sein de l’armée gabonaise confie : «Depuis 2022 au moins, Oligui Nguema s’est positionné comme le véritable chef d’état-major des armées, et comme le vrai ministre de la Défense du Gabon.» Cette ascension discrète mais inexorable a échappé à la vigilance de l’entourage présidentiel, obnubilé par sa stratégie de verrouillage électoral.

Le clan Bongo, emmené par Noureddin, le fils du président, avait en effet déployé un arsenal de mesures pour assurer sa mainmise sur le scrutin. La nomination de Michel Stéphane Bonda à la tête du Centre gabonais des élections (CGE) en a été l’illustration parfaite. Jeune Afrique révèle que Bonda, précédemment incarcéré pour des accusations graves, aurait bénéficié d’une libération discrète grâce à l’intervention de l’entourage d’Ali Bongo. Un membre de cet entourage le décrit comme quelqu’un ayant «une dette» envers ses sauveurs, soulignant le caractère calculé de cette nomination.

10 milliards CFA pour Ondo Ossa – Les coulisses d’une campagne sous haute tension

La stratégie du pouvoir s’étendait également au contrôle de l’information. Jessye Ella Ekogha, porte-parole de la présidence, orchestrait une campagne médiatique agressive, multipliant les sites d’information pro-gouvernementaux, dont le plus connu était La Libreville. L’interdiction d’accès au territoire pour la presse étrangère à l’approche du scrutin témoigne de cette volonté de maîtriser le narratif.

Mais c’est peut-être dans les coulisses que se jouait le véritable drame. Des réunions secrètes se tenaient «dans des villas louées spécifiquement pour la campagne, dans les quartiers de La Sablière ou de Batterie IV »; Ironie du sort, le général Oligui Nguema y participait, renforçant l’illusion de sa loyauté tout en préparant le renversement du régime.

L’opposition, quant à elle, n’était pas en reste. L’article de Jeune Afrique révèle des tentatives de financement auprès de pays voisins et l’élaboration d’une stratégie anti-fraude sophistiquée. Face à cette menace, le clan Bongo a tenté un coup de poker désespéré. La rédactrice Jeanne Le Bihan rapporte qu’Albert Ondo Ossa, candidat de l’opposition, s’est vu proposer «une importante somme d’argent, aux alentours de 10 milliards de francs CFA» en échange de la reconnaissance de la victoire d’Ali Bongo. Cette tentative de corruption, aussi audacieuse que risquée, illustre l’atmosphère de tension et de manœuvres qui régnait dans les derniers jours du régime.

L’étincelle qui a tout déclenché

Le coup de grâce est venu d’une dispute, apparemment anodine mais lourde de conséquences : une altercation éclate, le 29 août, entre Noureddin Bongo et le général Oligui Nguema. Le fils du président, furieux des résultats défavorables dans les bureaux de vote de la Garde républicaine, menace de limoger le général. Ce dernier confiera plus tard à ses troupes : «Le petit m’a manqué de respect.» Cet incident personnel semble avoir été l’étincelle qui a déclenché le putsch.

La mise en scène du coup d’État lui-même révèle une orchestration minutieuse. Le CTRI a délibérément laissé diffuser l’annonce de la victoire d’Ali Bongo avant de proclamer la prise du pouvoir, se positionnant ainsi en sauveur face à une fraude électorale présumée.

Un an après ces événements, de nombreuses questions restent en suspens. Aucun procès n’a encore eu lieu pour éclaircir les allégations de fraude ou de trahison. Le général Oligui Nguema, désormais au pouvoir, poursuit son chemin, laissant le Gabon dans l’expectative quant à son avenir politique.

Cette saga politique gabonaise, mêlant intrigues de palais, manœuvres électorales et retournements d’alliance, illustre la complexité des transitions de pouvoir en Afrique centrale. Elle souligne également la fragilité des régimes qui, malgré des décennies au pouvoir, peuvent s’effondrer sous le poids de leurs propres contradictions et des ambitions personnelles de ceux censés les protéger.

Source : Cet article s’appuie sur les informations publiées par Jeune Afrique le 25 août 2024, dans une enquête intitulée « Oligui Nguema et les Bongo : un an après, les derniers secrets du coup d’État ».
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