L’affaire judiciaire impliquant les deux figures connues des réseaux sociaux gabonais prend une tournure menaçant leur liberté. Les accusations de diffamation portées contre eux par Hervé-Patrick Opiangah, ancien député et leader politique, soulèvent des questions sur les limites de la liberté d’expression en ligne et pourraient très prochainement les mener à ‘Sans-Famille’, le plus célèbre pénitencier du Gabon.
Deux mandats d’arrêt ont été émis par la justice gabonaise à l’encontre des activistes Stéphane Zeng et Landry Amiang Washington, selon des sources judiciaires. La décision fait suite à une plainte déposée par Hervé-Patrick Opiangah, ancien député de Mounana, pour «propos diffamatoires», «injures publiques» et «atteinte à l’honorabilité d’autrui».
Les deux hommes sont accusés d’avoir tenu des propos injurieux envers M. Opiangah sur les réseaux sociaux, l’impliquant notamment dans un scandale de pédophilie ayant secoué le milieu sportif gabonais il y a deux ans. Ces allégations, que le plaignant qualifie de «diffamatoires, infondées et dégradantes», ont conduit à l’ouverture d’une enquête judiciaire.
La semaine dernière, le plaignant et les mis en cause ont été entendus par un juge d’instruction. À l’issue de ces auditions, une ordonnance d’interdiction de quitter le territoire a été prononcée à l’encontre de MM. Zeng et Amiang Washington. Des sources proches du dossier indiquent que des mandats de dépôt pourraient également être délivrés à l’issue de leurs prochaines auditions.
Cette affaire s’inscrit dans un contexte où la justice gabonaise semble vouloir durcir sa position face aux excès verbaux sur les réseaux sociaux. Lors de son discours du 16 août 2024, à l’occasion du 64e anniversaire de l’indépendance du Gabon, le président de la transition a appelé la justice à prendre ses responsabilités face à ces dérives, sans toutefois citer de cas particuliers.
Il est à noter que M. Amiang Washington a déjà eu des démêlés avec la justice par le passé. En 2019, il avait été condamné à 32 mois de prison ferme, assortis d’un sursis de 4 mois, avant d’être libéré en janvier 2020.
Selon des sources proches de l’enquête, la Direction générale des recherches (DGR) et la Direction générale de la contre-ingérence et de la sécurité militaire (DGCISM) auraient été mobilisées pour l’exécution de ces mandats d’arrêt.
Cette affaire soulève des questions sur l’équilibre entre liberté d’expression et protection de la réputation personnelle dans le contexte des médias sociaux au Gabon. Elle pourrait, avec la toute récente affaire Tchicot, marquer un tournant dans la jurisprudence nationale concernant la diffamation en ligne.