Les usagers des transports maritimes intérieurs et plus précisément les passagers de la ligne Port-Gentil-Libreville seraient-ils des Gabonais de seconde zone ? C’est la question qu’on pourrait se poser au vu de l’insensibilité dont fait preuve le gouvernement de Transition depuis la hausse du prix du billet sur cette ligne de 35 000 FCFA à 42 000 FCFA. Si à première vue cette hausse serait imputable aux compagnies maritimes, la réalité est tout autre puisque le maintien de ces prix pour les passagers serait consécutif au refus assumé par la Direction générale des hydrocarbures (DGH) dirigé par Ernest Ndong Nguema d’appliqué l’arrêté n°001274/MEEDD/MBCPFP/MPERH du 07 août 2013 instituant un gasoil industriel et qui exempte ces entreprises assurant le transport des Gabonais.
Si dans notre article intitulé Transport maritime : le gouvernement insensible au calvaire des populations après la hausse du prix du billet, nous soulignions déjà la responsabilité de l’État dans l’augmentation vertigineuse du prix du billet, nos investigations ont permis de mettre en lumière une volonté assumée de certaines administrations d’asphyxie les consommateurs gabonais. Durant une semaine dans la capitale économique, ville la plus touchée par cette situation, nous sommes allées à la rencontre des acteurs intervenant dans ce secteur.
Entre ignorance des dispositions légales et incompréhensions
Accompagné du bureau du Collectif citoyen pour la lutte contre la vie chère à Port-Gentil présidé par Théophane Boubebe, Gabon Media Time a échangé avec des responsables d’entreprises de distribution de produits pétroliers, de la Caisse de stabilisation et de péréquation (CAISTAB), de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) ou encore de l’administration provinciale. Il ressort de ces entretiens que le nœud gordien dans ce dossier est simplement la non-application de l’arrêté n°001274/MEEDD/MBCPFP/MPERH du 07 août 2013 instituant un gasoil industriel et plus spécifiquement l’article 4 qui exclut les sociétés exerçant dans le secteur « fluvial et maritime intérieur » de son champ d’application. Ainsi, comme avec la Société d’énergie et d’eau du Gabon (SEEG) ces entreprises devaient acquérir le carburant au prix réseau avec à terme favoriser une revue à la baisse du prix des billets.
Sauf que malgré cette disposition claire ces opérateurs économiques n’en bénéficient pas et continuent de payer le carburant à 1 145 FCFA le litre contrairement à la Compagnie nationale de navigation intérieure et internationale (CNNII) ou encore aux navettes assurant le transport du personnel sur les sites pétroliers. Si les responsables de la CAISTAB, de la DGCC ou encore les marketeurs reconnaissent bel et bien que l’application est de leur ressort, un agent d’une des administrations interrogé a relevé qu’il revient aux autorités d’ordonner l’application pure et simple de cet arrêté en l’occurrence le ministre du Pétrole Marcel Abeke. « En présentant l’ensemble des documents en notre possession aux administrations, elles ont reconnu que l’existence de l’arrêté devait faire en sorte que la mesure s’applique au deux compagnies », a indiqué Théophane Boubebe.
Logimar 241 et NGV au bord de la faillite
En outre, il faut relever qu’au-delà de l’incidence indéniable sur le panier de la ménagère, le statu quo observé dans ce dossier a pour conséquence de faire courir un risque de cessation d’activité des deux opérateurs et la mise au chômage de centaines de Gabonais. D’ailleurs, pour le cas spécifique de la société Logimar 241, celle-ci a été frappée en avril dernier par une « interdiction d’activités et de fermeture d’établissement » par la Direction générale provinciale des impôts de l’Ogooué-Maritime qui faisant fi des difficultés de cette entreprise gabonaise a décidé de la mettre sous scellés.
Une situation pour le moins inquiétante qui devrait interpeller le gouvernement et plus particulièrement le ministère du Pétrole qui semble etre l’administration habilitée à remettre les choses en bonne voie. D’ailleurs, lors des échanges avec le bureau du Collectif citoyen pour la lutte contre la vie chère à Port-Gentil, les responsables provinciaux de la DGH ont reconnu le deux poids deux mesures dans l’application l’arrêté n°001274/MEEDD/MBCPFP/MPERH du 07 août 2013. C’est au niveau de la Direction générale des hydrocarbures que le problème devrait etre résolu. « D’ailleurs, les marketeurs vers lesquels nous sommes partis, nous assurent que si l’administration de tutelle donc la DGH décide que cette arrêtée est appliqué par tous, ils suivront et on reviendrait à des prix qui pourraient satisfaire tout le monde, surtout que les deux compagnies ont fait des propositions au gouvernement dans ce sens », a souligné le président du Collectif citoyen pour la lutte contre la vie chère à Port-Gentil.