Quand la Grande loge du Gabon joue à découvert. Sans craintes de l’image que cela peut renvoyer dans la conscience collective par rapport à la position de son épouse Marie-Madeleine Mborantsuo, Lin Mombo, président de l’ARCEP, a présidé dimanche, à Akanda, le lancement d’un mouvement de soutien au candidat du PDG.
Ils étaient nombreux à prendre part, le samedi 20 août dernier, au lancement du «Mouvement des Amis d’Ali Bongo Ondimba». Parlementaires d’Akanda, élus locaux, cadres PDGistes de cette commune du nord de Libreville étaient présents à ce rassemblement cornaqué par Lin Mombo, le président de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) connu par ailleurs comme compagnon officieux de la présidente de la Cour constitutionnelle. Beaucoup d’interrogations autour de la création de ce mouvement.
Indiscipline au PDG
Généralement discret et effacé, l’époux de la présidente de la Cour constitutionnelle est, cette fois, sorti du bois. En cette fin de campagne (J-4), le mouvement des amis d’Ali Bongo Ondimba a été lancé pour apporter un soutien politique au chef de l’État sortant qui va affronter, dans les urnes, une douzaine d’adversaires samedi prochain.
La création même de ce regroupement est incompréhensible, d’autant plus que le Secrétaire général du Parti démocratique gabonais (PDG), Steeve Nzegho Dieko, avait lancé, il y a quelques mois, un avertissement «cinglant» aux membres de son parti qui s’aventureraient à créer ou à adhérer à une association. Pour le chef en second du PDG, les associations «affaiblissent le parti». Un avertissement qui semble avoir été ignoré par des militants et de nombreux élus PDG de la commune d’Akanda s’étant affiliés à cette association politique.
Montée au filet de la Grande loge du Gabon ?
Nombreux parmi les membres du Mouvement des amis d’Ali Bongo Ondimba, et sans doute le plus grand nombre, sont des franc-maçons. Ils sont connus comme tel pour avoir déjà été vus dans une vidéo relayant, en novembre 2010, l’intronisation du président Ali Bongo Ondimba comme grand maître de la Grande loge du Gabon par François Stifani (ancien grand maître de la Grande loge nationale française). Est-ce à dire que la franc-maçonnerie locale entend jouer, en dernier lieu, un rôle pour la réélection d’Ali Bongo ? Ou alors Lin Mombo n’a recruté avant tout qu’au sein de sa loge ?
Selon les révélations, en novembre 2022, du journal L’Aube, lors de le 38ème assemblée générale de la Grande loge du Gabon (GLG), tenue à Libreville les 11 et 12 novembre 2022, Lin Mombo avait été fait «Pro Grand Maitre». Le mari de Marie Madeleine Mboranstuo recevait ainsi «la charge de coordonner, en sa qualité de Pro Grand maître, les activités de la Grande loge maçonnique du Gabon» et de remplacer désormais Ali Bongo partout quand il est indisponible. Visiblement, l’élection présidentielle se joue également dans les arrière-boutiques des société secrètes et la GLG semble avoir décidé de monter au filet, de sortir de sa discrétion et de jouer à découvert.
À cinq jours du scrutin
Mais pourquoi n’est-ce qu’à cinq jours d’un scrutin qui apparaît crucial que Lin Mombo procède à la mise en place de son mouvement ? Y aurait-il des déficits dans la campagne d’Ali Bongo Ondimba qu’il fallait absolument combler ? Pourquoi une association pour un candidat ayant déjà le soutien d’un parti particulièrement bien implanté (même si certains de ses militants ne respectent pas toujours les consignes électorales du parti) et l’appui d’une quarantaine de formations politiques, fussent-elles sans élu souvent, et sans siège parfois ?
Autres questions : tout cela ne fait-il pas désordre ? Tout cela ne va-t-il pas «détruire» davantage l’image de la présidente de la Cour constitutionnelle dans l’opinion ? Au vu de la position de son épouse, le président de l’Arcep ne devait-il pas garder une image de neutralité ? Tout cela ne va-t-il pas donner du grain à moudre à ceux qui estiment et affirment que Steeve Nzegho Dieko n’a pas suffisamment de poigne pour diriger le PDG ?
En tout cas, la sortie de Lin Mombo samedi dernier restera à jamais un long procédé de questionnements.