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Adoption de la révision constitutionnelle par l’Assemblée nationale : Un jour peu glorieux
Publié le samedi 25 mars 2023  |  Gabon Review
Rentrée
© Agence Gabonaise de Presse par DR
Rentrée solennelle de la Cour constitutionnelle
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En se prononçant pour une troisième révision constitutionnelle en cinq ans, les députés ont ruiné leur crédibilité. Au lieu de chercher un compromis acceptable, ils sont tombés dans la compromission, au grand dam d’une opinion publique désabusée.

L’Assemblée nationale ne s’est jamais considérée comme un contre-pouvoir. Elle n’a jamais laissé le sentiment d’être une institution de la République, au service de la chose publique. D’elle-même, elle a toujours renvoyé l’image d’une chambre d’enregistrement inféodée au pouvoir exécutif. D’eux-mêmes, ses membres n’ont jamais eu une haute opinion, étalant une obséquiosité à nulle autre pareille. De leur mandat, ils n’ont jamais eu une idée précise, soutenant tout et son contraire, y compris les idées les plus liberticides ou les réformes les plus farfelues. En se prononçant massivement en faveur d’une troisième révision constitutionnelle en cinq ans, les députés se sont présentés sous un jour peu glorieux, ruinant encore plus leur crédibilité. Loin d’être l’expression du jeu démocratique, leur vote en est la négation. Loin de rallumer la flamme de l’espérance, il contribue à l’éteindre, semant le doute sur leur idéal pour le pays.

Instabilité institutionnelle

Certes, il ne s’agissait pas d’une proposition de loi, mais d’un projet de loi. N’empêche, aucun député ne peut le contester : par leur rythme, les révisions constitutionnelles créent les conditions d’une instabilité institutionnelle, sapant les fondements de la démocratie et nuisant à toute ambition collective. Comme le rappelle l’universitaire Guy Rossatanga-Rignault, «la récurrence de révisions constitutionnelles marque la difficulté d’institutionnalisation qui n’est qu’une manifestation du campement : les règles sont rarement établies pour durer. Elles servent trop souvent à résoudre des problèmes immédiats, sinon personnels». Comment asseoir la solidité et la crédibilité des institutions quand le cadre juridique est en permanence sujet à des ajustements ? Comment garantir la transparence des élections et la légitimité des décideurs quand les règles sont changées en opportunité, à la veille de chaque compétition ? Comment tracer des perspectives, faire des projets communs, quand la loi se conçoit comme un vêtement sur-mesure ?

Les députés argueront s’être fait les relais des participants à la Concertation politique tenue du 13 au 23 mars dernier. Leur attitude n’en deviendra pas républicaine pour autant. Comme le reconnait Alain-Claude Billié-By-Nzé lui-même, les conclusions de ce raout sont des «recommandations» et pas des résolutions. Dénuées de toute force juridique, elles ont valeur de déclarations d’intention et ne s’imposent à personne. A moins de se poser en supplétif du gouvernement, l’Assemblée nationale n’était pas obligée de leur donner une suite favorable. Si elle était tenue d’examiner le projet de loi, rien ne lui faisait obligation de l’adopter en l’état, sans changer la moindre virgule. S’ils songeaient à la stabilité des institutions, les députés ne cautionneraient pas cette répétition de manipulations juridiques. S’ils nourrissaient un dessein collectif, ils militeraient pour des élections transparentes aux «lendemains apaisés». De ce fait, ils auraient œuvré pour le maintien de certaines modifications introduites par la loi n° 001/2018 du 12 janvier 2018, notamment aux articles 9 et 11 de la Constitution.

Peur de l’exclusion et de la déchéance

Reconnus comme les détenteurs du pouvoir législatif, les députés étaient juridiquement fondés à amender la copie soumise par le gouvernement. Ils pouvaient valider l’harmonisation ou la réduction de la durée des mandats tout en maintenant le principe des scrutins à deux tours. Ainsi auraient-ils fait le lien entre la Concertation politique et le Dialogue national d’Angondjé. Ainsi auraient-ils établi un continuum entre leur travail et celui de la précédente législature. Pour ainsi dire, ils auraient simplement joué leur rôle de représentants du peuple et dépositaires de la souveraineté nationale, c’est-à-dire de défenseurs des intérêts des citoyens vivants, passés et futurs. Au lieu de chercher un compromis acceptable, ils sont tombés dans la compromission, au grand dam d’une opinion publique à la fois médusée et désabusée.

Ni la discipline partisane ni la concordance majoritaire ne sauraient expliquer cette docilité. Constamment brocardés, régulièrement traités de godillots, les députés ne peuvent faire comme si l’opinion publique importait peu. S’il est de leur responsabilité de légiférer, personne ne saurait leur dénier cette compétence sans priver l’Assemblée nationale de sa raison d’être. Pourquoi ne revendiquent-ils pas le droit de l’exercer librement ? Par peur d’une exclusion ? Par peur de connaitre la déchéance ? N’étant pas impératifs mais représentatifs, leurs mandats n’appartiennent pas à leurs partis, mais au peuple souverain. Mieux, le Gabon n’est pas organisé selon les principes de la démocratie directe, mais de la démocratie représentative. Toujours rappeler et se rappeler des fondamentaux : tel peut être la voie vers une prise de conscience et un Parlement au service de tous et pas d’un camp politique.
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