En paraphrasant la mémorable boutade attribuée au général de Gaulle à propos du CNRS en 1965 : «Des chercheurs qui cherchent, on en trouve. Des chercheurs qui trouvent, on en cherche», l’on peut se permettre de penser qu’au Gabon cette citation fait école au sein des principales institutions de recherche publique et universités.
Au-delà des multiples sources de financement dont jouit la recherche scientifique au Gabon, la performance de ce secteur reste encore très marginale et difficile à évaluer. Méconnu de la grande majorité, la recherche scientifique au Gabon ouvre plutôt les portes des administrations publiques aux enseignants-chercheurs qui se contentent de dispenser des enseignements dans les universités et grandes écoles du pays, quand ils ne se complaisent pas dans la bureaucratie. Dans bien des cas, les chercheurs ont oublié ce qui est leur principal moyen d’expression : «les publications».
Selon la loi de finance 2013, la recherche au Gabon a été financée à hauteur de 1,15 % du budget. «Ce qui peut paraître énorme, mais lorsqu’on y regarde de plus près on se rend compte que cette manne financière est engloutie principalement dans l’entretien des cabinets administratifs», relève, dans sa réflexion sur la recherche scientifique au Gabon, l’ONG Gabiomed qui regroupe des chercheurs gabonais œuvrant dans les sciences biologiques, environnementales et biomédicales. «L’examen de cette loi de finance montre que pour un organisme tel que le CENAREST, les services administratifs captent près de 80 % des 750 354 000 FCFA des fonds alloués à cet organisme (budget hors investissements). Le cabinet du commissaire général et les services attachés ont perçu à eux seuls 266 604 000 FCFA, soit 35 % du budget ; alors que les laboratoires engagés dans la compétition internationale et censés contribuer à l’effort de développement du pays ne perçoivent en bout de ligne que 20 % des sommes allouées. Autre curiosité, tous les laboratoires du CENAREST ont reçu la même somme d’argent en 2013, soit 1 500 000 FCFA ; une somme dérisoire au vu des défis majeurs auxquels le pays est confronté. Tout cela ne peut conduire qu’à l’inefficacité de ces laboratoires comme en témoigne le faible nombre de publications produites ; seulement 35 publications toutes années confondues (Source Science direct, mot clé CENAREST Gabon)», analyse Gabiomed.
Si l’on peut se permettre de justifier l’impotence de la recherche scientifique au Gabon par l’insuffisance de ressources humaines qualifiées, l’absence criarde d’infrastructures adaptées, la faiblesse des financements et l’absence de dispositifs d’insertion incitant certains chercheurs à mettre leurs compétences au bénéfice d’institutions internationales, il apparaît également nécessaire de relever l’absence de promotion et de communication autour des recherches et de leurs auteurs au niveau national. «Contrairement à ce qu’on pense, la recherche gabonaise est très dynamique. Les travaux publiés chaque année sont en grand nombre dans tous les domaines. Les Gabonais se présentent aussi chaque année au concours de Cames et font de très bons résultats. Le problème est que nos recherches ne sont pas assez ou pas du tout médiatisées. Elles sont donc peu connues. Si tu n’es pas du milieu tu as l’impression que rien ne s’y fait», souligne Rodrigue Ndong, enseignant au département de Lettres modernes à l’UOB.