Pour s’être rapproché des forces de l’alternance au moment de son retour au Gabon, Samuel Ngoua Ngou qui avait réussi à pénétrer le cercle étroit de prise de décision de ce bloc, n’arrête pas d’alimenter la chronique et les commérages, notamment sur les réseaux sociaux où il a, lui-même, posté un long plaidoyer pro domo, le 15 juin dernier. Ses propos avant sa sortie de l’opposition pour rejoindre «ce régime de pédérastes et de franc-maçons» qu’il a si souvent dénoncé, sont ressassés par ses ex-compagnons.
Au propre comme au figuré, cela s’appelle un «plantage». Depuis quelques années, l’ancien syndicaliste avait plutôt un penchant pour les forces du changement. Et, à son retour au Gabon, il a rejoint les partisans du changement. Dans les réunions de l’opposition auxquelles il prenait part, il n’était pas le moins virulent des contempteurs d’Ali Bongo. Samuel Ngoua Ngou les a «plantés». Il a décidé, à 53 ans, de tourner casaque et de soutenir la majorité républicaine et sociale pour l’Emergence. Il a été nommé Directeur adjoint du Cabinet du Président de la République.
Un chrétien parmi les francs-maçons ?
Proche des milieux des églises de réveil, Samuel Ngoua Ngou s’est toujours élevé contre «le régime de l’injustice, de la corruption et de l’impunité» que représentent pour lui les années Bongo (père et fils). Cet enseignant du second degré général qui a, au début des années quatre vingt-dix, sous Omar Bongo, refusé un poste de Secrétaire d’Etat à l’Education nationale et une enveloppe de 30 millions CFA, s’est finalement résolu à accepter, cette fois, un poste aux côtés du président de la République actuel, et être l’adjoint de Maixent Accrombessi. «La combinaison Maixent Accrombessi – Samuel Ngoua Ngou, c’est le mariage de la carpe et du lapin», souligne un enseignant de sociologie à l’Université Omar Bongo. Que s’est-il donc passé pour qu’il en arrive là ? Connu pour ses prises de position tranchées et argumentées, Samuel Ngoua Ngou va-t-il accepter de «se faire apprivoiser» par des personnalités auprès desquelles il n’a jamais trouvé des points communs, même s’il est vrai que ce sont eux qui lui donnent à manger aujourd’hui ? Ce prédicateur des églises de réveil qui a toujours dénoncé la franc-maçonnerie va-t-il cohabiter avec les francs-maçons qui entourent le chef de l’Etat ?
«Ils mènent le Gabon à la catastrophe, au diable»
Une semaine avant sa nomination au poste de directeur adjoint du cabinet du président de la République, l’ancien leader syndicaliste, connu pour sa verve, pourfendait encore «ce régime de pédérastes et de francs-maçons» qui mènent le Gabon au diable. Et ce n’était pas la première fois que ce fils de Bitam dénonçait les tenants du régime de l’Emergence. Qu’est-ce qui a bien pu lui faire virer sa cuti ? Est-ce la «pression douce» exercée sur lui par un Conseiller politique très en vue au Palais du bord de mer ? Est-ce la pression à dose homéopathique faite sur lui par un membre de sa famille, conseiller à la présidence de la République ? En tout cas, il est difficile de croire que Ngoua Ngou ait été «interpellé» par l’appel à un grand rassemblement -le discours du 31 mai dernier- lancé par Ali Bongo à ses compatriotes de tous bords, puisque l’homme disait ne pas croire à «ces appels de charlatan».
En tout cas, bien que déçus et atterrés, ses proches disent que «Samuel Ngoua Ngou a tout à fait le droit de servir son pays au poste qu’on lui propose, et que n’étant pas du genre à jouer les béni-oui-oui, il sera plutôt une force de proposition». D’autres proches -ses anciens amis politiques- eux, se disent «trahis». Le nouveau n° 3 du cabinet du président de la République sera reçu début-Juillet par le chef de l’Etat, à son retour du sommet de l’Union Africaine à Malabo (Guinée-Equatoriale).