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Gabon : Les évêques s’insurgent contre la situation socio-politique du pays
Publié le lundi 30 janvier 2023  |  Gabon Review
Messe
© Autre presse par DR
Messe de clôture de la 30e assemblée plénière des évêques du Gabon, le 29 janvier 2023.
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Le Premier ministre, Alain-Claude Bilie-By-Nze et son gouvernement, les leaders de l’opposition et de la société civile ainsi que de nombreux badauds, ont religieusement écouté le discours des Evêques, portant essentiellement sur le climat sociopolitique électrique du Gabon à quelques mois des échéances électorales. Le clergé invite les chrétiens à s’engager pour la vérité, la justice et la paix, et au peuple tout entier à s’inscrire massivement sur les listes électorales.

«Église, famille de Dieu au Gabon, lève-toi et marche pour la justice, la vérité et la paix !» Cette citation du Pape Jean-Paul II lors de son passage au Gabon en 1982, est revenue à plusieurs reprises, comme un leitmotiv ou un slogan, dans le message des Évêques au peuple gabonais. Qu’y comprendre ? Serait-ce une invite aux chrétiens du Gabon à se lever, à se révolter lors des prochaines consultations électorales ?

Sur sa calme tonalité habituelle empreinte de sagesse et de paternalisme, le message de l’Église catholique a brossé un tableau alarmant du Gabon. Le même que dressent depuis des années les leaders de l’opposition et de la société civile gabonaises sans jamais être écoutés par le pouvoir. Or, le pouvoir, du moins l’exécutif, a justement marqué de sa forte présence la clôture de cette 30è assemblée plénière des Évêques du Gabon, ce 29 janvier 2023 à la paroisse Saint-Pierre de Libreville où était célébrée une messe épiscopale.

Très courue, la célébration eucharistique qui annonçait un message des Évêques au peuple gabonais de Dieu à l’approche des élections de 2023, a en effet enregistré la présence du Premier ministre, Alain-Claude Bilie-By-Nze, et littéralement de l’entièreté de son gouvernement, mais aussi de leaders de l’opposition et de la société civile et de nombreux badauds.

Signes d’inquiétude et «chapelet des maux qui rendent le Gabon malade»

Le message tant attendu était une sorte de cri d’alerte sur les questions d’ordre social, sur l’élection présidentielle à venir et sur la situation socio-politique du Gabon. «L’élection présidentielle prévue cette année au Gabon approche inexorablement. La situation socio-politique dans notre pays présente quant à elle des signes d’inquiétude et quelques espoirs. Notre analyse révèle des nuages à l’horizon, les mêmes causes produisant les mêmes effets », a déclaré l’abbé Michel Ange Bengone Othoungha.

Selon le secrétaire général de la conférence épiscopale du Gabon, le climat politique actuel se caractérise sur le plan social par une mauvaise répartition des richesses, un taux de chômage relativement élevé surtout des jeunes. Le réseau routier demeure impraticable dans plusieurs régions du pays. Et, «on déplore encore des détournements au détriment de projets de développement. Par conséquent, le tissu économique local reste faible. La politique de l’habitat ne répond encore pas aux attentes de la population, par ailleurs la pression fiscale galopante n’aide ni les opérateurs économiques ni les ménages», a rappelé l’Église catholique du Gabon.

Puissance étrangère. Vassalisation du Gabon

Auparavant, l’actualisation de la première lecture des Saintes Écritures durant la messe épiscopale a fait dire au Mgr Jean-Vincent Ondo : «pour la vérité, la justice et la paix, surtout à la veille des élections présidentielles, législatives et locales, le Gabon ne doit pas être vassal d’un autre pays. Mieux encore, l’alliance avec le roi du ciel ne doit plus souffrir d’obstacle ni de lapsus. (…) Donc, il faut absolument que la foi aille au secours de la raison politique gabonaise.»

A quel pays a donc fait allusion l’Évêque du Diocèse d’Oyem ? Quel pays pourrait vassaliser le Gabon où y imposer ses intérêts à la faveur de la prochaine présidentielle ? Le Mgr Jean-Vincent Ondo n’en a pas dit plus et s’est par ailleurs refusé de «faire ici le chapelet des maux qui rendent le Gabon malade».

Dans le contexte décrit, les Évêques du Gabon appellent tous les chrétiens à un engagement social et politique pour la vérité la justice et la paix. Ils les invitent à faire preuve de solidarité durant les prochaines élections, non sans appeler la classe politique à un sursaut moral et spirituel.

«À quoi sert vraiment de gagner une élection si les droits fondamentaux de la personne et le salut des âmes sont compromis, vendus ou hypothéqués ? A quoi sert de vouloir même gagner les élections si ce n’est pas pour servir les Gabonais et permettre au Gabon de se développer et d’accomplir ce pour quoi il existe ?», a interrogé, visiblement à l’adresse des politiques, le Monseigneur Jean Vincent Ondo Eyene, président de la conférence épiscopale du Gabon au cours de son homélie.

Populations apprivoisées, inoffensives et passives. Appel aux inscriptions massives sur les listes électorales

Et la conférence épiscopale du Gabon de rappeler qu’aucune élection, dans le pays, ne ressemble à une autre. Toute nouvelle élection est une opportunité, «c’est pourquoi nous vous invitons à vous inscrire sur la liste électorale et aller voter», ont lancé les Evêques du Gabon avant de poursuivre : «nous entendons rappeler à tous qu’ils sont sœurs et frères, enfants de la même terre et qu’ils ont tous le devoir de rechercher autre chose : ce qui contribue à édifier la fraternité, la paix et la justice».

Dans le contexte politique du Gabon, les hommes politiques ont été invités à «rompre avec certaines habitudes ou stratégies de contrôle qui ne font que transformer les populations en des êtres apprivoisés, inoffensifs et passifs».

Ndong Sima s’en félicite

Présent à Saint-Pierre, le candidat à la prochaine élection présidentielle, Raymond Ndong Sima s’est dit satisfait de l’engagement décliné par la conférence épiscopale du Gabon. «C’est précisément ce qu’on attend de l’église. C’est-à-dire qu’elle dise non pas qu’elle prend position pour quelqu’un mais qu’elle dise ce que la conscience chrétienne recommande de faire», estime l’ancien Premier ministre. Pour lui, l’invitation de l’Église catholique à tous les chrétiens et à la communauté de venir écouter, signifie que le discours s’adresse à tous et pas à un seul camp. C’est faire preuve de bon sens et de lucidité. «Je crois qu’ils sont vraiment dans leur élément et je me félicite de ce discours », s’est réjouit Raymond Ndong Sima.
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