La présidente de l’Union Nationale (UN) a fait part de son ambition de «travailler (…) à l’avènement de l’alternance démocratique en 2023.» Eu égard à l’expérience du passé, la tâche s’annonce âpre.
Depuis son élection à la tête de l’Union nationale (UN), Paulette Missambo n’a de cesse de l’affirmer : elle veut œuvrer à l’émergence d’une «alternative crédible» au pouvoir en place. En janvier dernier, elle s’était engagée à «contribuer (…) à la dynamisation et à la construction de l’unité de l’opposition», indiquant devoir se «battre pour un système électoral qui garantit dans les faits le choix librement exprimé dans les urnes.» Dimanche dernier, à la faveur de la rentrée politique de son parti, elle s’est voulue encore plus précise : affirmant «privilégier l’unité et le rassemblement», elle a lancé «un appel pressant à tous les partis signataires du mémorandum pour une réforme du système électoral, au parti Réagir ainsi qu’à tous les patriotes qui adhèrent à cette initiative, afin (qu’ils s’accordent) sur les principes, objectifs et actions à mener ensemble en vue d’obtenir des élections libres, transparentes et apaisées en 2023.»
Construire le futur
Comme elle l’a dit elle-même, son ambition est claire : «travailler (…) à l’avènement de l’alternance démocratique en 2023.» Eu égard à l’expérience du passé, la tâche s’annonce âpre. Anticipant sur une probable inertie du pouvoir en place, la présidente de l’UN s’est appesantie sur la structuration de l’opposition et la mutualisation de ses forces. Cherchant à éloigner le spectre de la personnalisation, elle s’est gardée de toute prise de position tranchée sur une éventuelle candidature unique, préférant évoquer les questions juridiques, institutionnelles et organisationnelles. Ce faisant, elle a invité les siens à réfléchir aux voies et moyens de faciliter les inscriptions sur les listes électorales, accroître le taux de participation, sécuriser les scrutins, lutter contre la fraude… Du passé, Paulette Missambo a essayé de tirer des enseignements pour mieux construire le futur. Si son propos se voulait en phase avec le réel, il était aussi prospectif et programmatique.
En appelant ses pairs à construire un «Pacte de confiance», la présidente de l’UN les a en réalité invités à agir dans le respect de trois principes : sincérité, authenticité et transparence. Sans le dire, elle leur a demandé de se montrer loyaux les uns aux autres, quitte à exiger l’adoption de règles connues et admises par tous. Sans le proclamer, elle les a priés de rester eux-mêmes et de se garder de reproduire certaines pratiques, même quand elles semblent efficaces. Sans l’affirmer, elle les a invités à faire circuler l’information voire à partager leur ressenti. A la fin des fins, elle a plaidé pour le dépassement et le renouvellement. A-t-elle été entendue ? Sans doute. A-t-elle été comprise ? Peut-être. Après tout, le monde politique gabonais vit au rythme des calculs personnels, de la rouerie et de la malice. Comment y remédier ? Ce sera l’un des enjeux de cette «réflexion commune» proposée par Paulette Missambo.
Discours bien accueilli
La présidente de l’UN rêve d’une opposition avançant en rangs serrés «avant, pendant et après les échéances de 2023.» Elle en appelle même à la formulation et l’adoption d’un «programme commun de gouvernement.» Cela suppose faire taire les égos et tourner le dos à bien des certitudes. Cela suppose aussi parvenir à un consensus sur les causes et sous-causes de la crise actuelle. Sur l’éthique, comme sur les manquements aux règles de bonne gouvernance, des vérités doivent être dites afin de dégager des objectifs et un ordre de priorités. Cela suppose, enfin, définir des modalités de financement. Est-ce envisageable ? Sans jouer les Cassandre, on doit faire montre de prudence, les précédents de 2016 et 2018 ayant laissé des traces, causé des blessures et occasionné des meurtrissures. Pour l’heure, on le rappellera volontiers : la confiance ne se décrète pas mais se construit.
Paulette Missambo a abattu ses cartes. En apparence, son discours a été bien accueilli par ses pairs. Il leur reste maintenant à lui répondre. Le feront-ils publiquement, par parallélisme des formes ? Ou préféreront-ils le cadre de la Plateforme des partis et groupements de partis politiques de l’opposition (PG41) ? Peu importe. On doit s’attendre à des démarches diverses et variées. Pour donner à son idée des chances de suivre son chemin, la présidente de l’UN doit préciser «les contours du cadre méthodologique et organisationnel (…)» souhaité. Faute de le faire, son appel aura le destin d’une bouteille à la mer : s’étant avancée, elle est condamnée à faire bouger les lignes. Alors, rendez-vous dans quelques semaines, en fin d’année civile, à l’heure des bilans.