En laissant planer le 16 août dernier lors de son « adresse à la Nation » la perspective de sa possible candidature à la prochaine élection présidentielle, Jean Ping est venu tout particulièrement contrarier les ambitions d’Alexandre Barro Chambrier qui espère encore lui succéder comme candidat, sinon unique, à tout le moins naturel de l’opposition à l’occasion de ce scrutin prévu en 2023.
Pour Alexandre Barro et son entourage, la fête nationale du 17 août a sans doute été gâchée.
La raison ? Le discours, la veille de Jean Ping. Toujours pas décidé à raccrocher les gants malgré son âge avancé – il aura 81 ans l’année prochaine -, le vieux leader de la Coalition pour la nouvelle République (CNR, opposition radicale) a laissé planer le spectre d’une possible candidature à l’élection présidentielle de 2023 au Gabon.
« Le moment approche où je m’ouvrirai à toutes les voies proposées par le peuple gabonais. Le moment approche des arbitrages ultimes que le peuple souverain me réclame. Contrairement à ce que pensent certains, ce ne sera pas pour courber l’échine ou renoncer », a déclaré Jean Ping, avant d’ajouter : « Je conduirai en temps opportun ces consultations, quoiqu’il puisse m’en coûter, pour me tenir aux côtés des Gabonais, quoiqu’ils décident pour l’avenir immédiat du Gabon ».
A ce stade, l’ancien candidat malheureux à l’élection présidentielle de 2016 n’a, selon plusieurs de ses proches, toujours pas pris sa décision de se présenter ou non au scrutin de 2023. Et s’il ne s’est pas montré plus explicite dans son allocution du 16 août, c’est parce qu’il sait que cette posture, qui entretient le suspense, lui permet de retrouver un peu d’influence au sein d’une opposition pressée de tourner la page et ainsi continuer à exister politiquement.
Jean Ping, faiseur de roi au sein de l’opposition ?
« En laissant planer le doute, Jean Ping envoie le message qu’il faudra compter avec lui. Pas forcément en tant que candidat, mais en tant que faiseur de roi », explique un de ses anciens proches qui a depuis, comme beaucoup, rejoint la majorité.
Ce message, au premier chef, semble d’abord s’adresser à Alexandre Barro Chambrier. Face à un Guy Nzouba-Ndama, dont le parti est le mieux représenté de toute l’opposition à l’Assemblée nationale, ou à un Paul-Marie Gondjout ou une Paulette Missambo qui se disputent l’UN ou ce qu’il en reste, le président du RHM le sait : il a indispensablement besoin de l’adoubement de Jean Ping pour, d’une part, espérer s’imposer comme le candidat, sinon unique, à tout le moins naturel de l’opposition en 2023 et, d’autre part, ne pas hypothéquer ses (maigres ?) chances de faire un score à deux chiffres le jour du vote.
Quelles seront les éventuelles contreparties exigées par Jean Ping dans le cas où il se déciderait à rallier le panache du président du RHM ? A ce stade, nul ne le sait véritablement. Mais une chose parait clair : en fin politicien, le leader de la CNR vendra d’autant plus chèrement sa peau que ce sera sans doute pour lui la dernière occasion de le faire. « Si c’est au final sa décision, Jean (Ping) ne ralliera pas Alexandre (Barro Chambrier) pour un plat de lentilles », confirme un élu local de Libreville resté fidèle au vieux leader de la CNR.
En attendant, ce rôle de cailloux dans la chaussure du président du RHM n’est probablement pas pour lui déplaire.