Banderoles sur les grilles du portail du ministère de l’Économie et de la Relance, bus garés près de l’entrée principale du bâtiment, tel est le décor déployé par les agents de la Société gabonaise de transport (Sogatra) pour interpeller, ce 15 avril, le ministre des Transports sur leur situation. Ils totalisent 14 mois sans primes Covid-19 et 11 mois d’arriérés de salaire qu’ils réclament désormais à cor et à cris.
Fort de la misère qui les étreint et de la précarité dans laquelle ils baignent alors qu’ils vont régulièrement au travail, les employés de la Société gabonaise de transport (Sogatra) ont envahi ce 15 avril l’entrée principale du ministère de l’Économie et de la Relance, tout juste après une Assemblée générale au cours de laquelle ils ont décidé d’interpeller leur ministre de tutelle et particulièrement le chef de l’Etat, Ali Bongo Ondimba, sur leur situation.
«Nous ne sommes pas venus pour le ministère de l’Economie. Nous sommes venus voir le ministre des transports, qui est notre ministre de tutelle. Il faut faire cette différence», a précisé l’une des porte-paroles des agents en grève, Josiane Laura Obone-Mouguengui.
Face aux désastres et drames enregistrés dans les rangs de ces agents, ils n’ont eu de choix que de faire ce sit-in pour revendiquer 14 mois sans primes Covid-19 et 11 mois d’arriérés de salaire datant de 2018. «Nous avons certains qui n’ont pas encore investi, qui louent. Nous avons des enfants à nourrir. Nous avons des malades, d’autres ont des AVC, certains sont même morts. Nous avons des charges à satisfaire. Travail égal salaire. Mais quand quelqu’un n’a plus son salaire, où est sa dignité?», a interrogé un autre porte-parole, Ella Akuété Kossi.
«Nous sommes venus voir notre ministre de tutelle comme un enfants qui vient voir son père pour lui dire, papa, je suis fatigué de mourir de faim. Je suis fatigué du fait que le bailleur vienne me chasser. Je suis fatigué de ne pas pouvoir me faire soigner», a-t-il poursuivi.
Gabonais comme les agent de Trans’Urb
Selon plusieurs employés rencontrés sur le piquet de grève, les arriérés de salaire datent de 2018. La prime Covid n’est quant à elle pas payée alors que les agents de Trans’Urb la percevraient, assurent-ils. «Nous travaillons avec notre petit frère Trans’Urb, cette société est née après Sagatra. Elle reçoit sa prime du fonds Covid pour le travail qu’elle fait en transportant gratuitement les Gabonais à la demande du chef de l’Etat. Sogatra ne reçoit pas sa prime. Nous sommes là pour leur rappeler que nous sommes des Gabonais et que nous devons avoir notre salaire. Même la Bible le dit: lorsque tu travailles, tu dois avoir à manger», a déclaré la déléguée du mouvement.
«Nous sommes des Gabonais comme eux, ils ont des enfants, nous aussi, nous avons des enfants. Mais comment se fait-il que certains travaillent et ils ont leur salaire et nous, nous ne percevons pas nos salaires? Comment pensent-ils que nous vivons?», a interrogé un agent révolté. Selon ce dernier, les femmes de certains agents femmes ont fui la maison et qu’ils n’arrivent plus à contrôler les enfants. Ils ont perdu la crédibilité et le pouvoir vis-à-vis de leurs familles et progénitures. «Certains sortes des maisons, chassés par leurs bailleurs. Ils dorment à la belle étoile». «Certains logent désormais dans les cuisines des amis et des parents alors que nous travaillons». «Nous sommes des Gabonais», a-t-il martelé, interpellant le président de la République pour qu’il ait un regard singulier sur leur situation.
«On se lève à des heures impossibles pour venir transporter les Gabonais. J’habite le PK 15. Je pars de là-bas pour venir à la base de Sogatra qui est au Camp de police. Nous travaillons pendant des heures et des heures, à la fin du moins, nous n’avons absolument rien comme revenu. C’est injuste !», a dénoncé Madame Obone-Mouguengui interpellant à son tour le ministre de tutelle et particulièrement le chef de l’Etat, Ali Bongo Ondimba.
Pour les employés, si l’Etat n’arrive plus à entretenir Sogatra, ils suggèrent de la fermer simplement. «En fermant, il donne à chacun ses droits. Au moins chacun d’entre-nous est libre dans sa tête. Parce que quand tu sais que tu n’as pas d’engagement quelque part, tu te bats à un autre niveau pour chercher ta survie. Tant que tu as un contrat avec quelqu’un tu ne peux pas le rompre tant que les choses ne sont pas claires».