La session extraordinaire du Conseil municipal de Bitam du samedi 26 février écoulé, qui avait pour unique objet la mise à l’écart du 3ème adjoint au maire de la commune de Bitam, Aubin Mbeang Ondo, semble, manifestement, avoir atteint son but, mais une certaine gêne et des interrogations subsistent.
Il n’y a pas l’ombre d’un doute, la session extraordinaire du Conseil municipal de Bitam tenue samedi dernier a suscité énormément de passion et d’attention, à juste titre peut-être, d’autant qu’il s’agissait du bannissement d’un élu local, en l’occurrence Aubin Mbeang Ondo le 3ème adjoint au maire, élu sous la bannière du Parti Héritage et modernité, du bureau du Conseil municipal, donc de son poste. Ces passions et des doutes transparaîtront tout au long des débats encadrés par Samuel Minko Nguema, le président de séance, et pour qui, à l’évidence, la messe était dite.
D’ailleurs des indiscrétions glanées ça et là au terme de la session nous apprendront qu’il était pressentie pour occuper le fauteuil dorénavant vacant.
Passion du maire titulaire Jules Mbélé qui aura rabattu l’appel de tous les chefs de quartiers de la ville afin d’assister à la cérémonie qui sera également marquée par la présence, dans la salle, du secrétaire départemental du Parti démocratique gabonais (PDG, au pouvoir), vêtu en tenu du parti.
Peu après l’ouverture de la session par le sous-préfet de Meyo-Kie M. Mba Mengue, Jules Mbélé, pour qui le troisième maire adjoint, un jeune homme la trentaine bien entamé, a développé «des attitudes d’insubordination, d’irrespect et de bellicisme à l’endroit des autres maires et du secrétaire général», a indiqué, dans son propos circonstanciel, qu’un climat délétère règne depuis cette année là au sein de l’institution qu’il dirige, du fait du comportement de son jeune collègue.
D’où la décision prise par lui, en sa «qualité de garant du bon fonctionnement de l’institution, de convoquer la présente session extraordinaire, conformément à la loi, afin de soumettre à votre examen pour adoption, la motion de défiance à l’encontre du 3e maire adjoint».
Or, selon des documents parvenues au bureau local de l’Agence gabonaise de presse (AGP), Aubin Mbeang Ondo a adressé une correspondance au gouverneur de la province du Woleu-Ntem, Jules Djeki, avec ampliation au préfet du département du Ntem, avec pour objet: abus d’autorité du maire central de Bitam, Jules Mbélé.
Dans son courrier daté du 3 septembre 2021, l’adjoint au maire se plaint de la rétention de sa prime mensuelle depuis 16 mois alors, par le maire Jules Mbélé, alors que parallèlement ladite prime est versée aux 1er et 2e maires adjoints. Il fustige également, dans cette correspondance, sa non-invitation aux séances de travail entre le maire et ses adjoints.
De même, il a trouvé incompréhensible que lors des dernières fêtes de fin d’année, le maire Mbélé ait octroyé une aide exceptionnelle à tous les autres maires, sauf à lui.
Toute chose qui sans doute ont amené le Conseiller municipal Pastor Ngoua N’neme à s’interroger sur la qualité de l’atmosphère qui règne à la mairie de Bitam.
«Les présents débats sont symptomatiques de la qualité des relations que vous entretenez au sein du bureau du Conseil municipal, car comment comprendre qu’une session extraordinaire soit convoquée à l’effet de destituer un maire», se désolera-t-il.
M. Ngoua N’neme a également demandé au maire central pour quelle raison il n’a pas initié une ou plusieurs, si nécessaires, réunions de conciliation entre toutes les parties.
«S’agissant de la notion de défiance, je ne l’ai trouvé nulle part dans les dispositions de la loi organique 15/95 sur la décentralisation. On y trouve uniquement des sanctions administratives et disciplinaires, qui ne peuvent être que par l’autorité de tutelle», a expliqué l’ancien ministre de la Communication, par ailleurs tête de liste PDG aux dernières élections locales, dans la commune.
Il n’en fallait pas plus pour que la quasi unanimité des conseillers municipaux exige du secrétaire général de l’institution, Eli Ella Zogo, la lecture de la loi sur la décentralisation, particulièrement les articles consacrés à le destitution d’un élu local. Peine perdue, le secrétaire général se bornera à faire des conditions légales de nomination du secrétaire général d’une institution, non sans reprocher vertement aux conseillers généraux leur méconnaissance des dispositions de cette loi sur la décentralisation.
Prenant la parole pour sa défense, le troisième maire adjoint s’est dit étonné de recevoir la notification de la session relative à sa mise en accusation la veille de l’événement. Il a déclaré que le maire ne lui a jamais reproché un quelconque écart de conduite.
«Je pense que les problèmes de la mairie se règlent lors des sessions du conseil. Or le maire central ne m’a jamais dit lors celles-ci qu’il a un grief contre moi, il ne m’a non plus jamais convoqué à son bureau à cet effet. Je le considère comme un père et lorsqu’un père a quelque chose à reprocher à son fils, il le fait asseoir. Le maire Mbélé ne l’a jamais fait, je suis donc étonné de la présente démarche à mon encontre», s’est défendu M. Mbeang Ondo.
Tentant inlassablement de jouer la carte de l’apaisement, Pastor Ngoua N’neme s’est risqué à attirer l’attention du maire de Bitam sur les conséquences politiques, pour le PDG, de la destitution d’un élu local, fût-il de l’opposition, à Bitam, à moins d’une année d’élections générales dans notre pays. C’est par une colère terrifiante que l’édile de Bitam réagira, devant une assistance médusée, à cette observation et accusera Pastor Ngoua N’neme de figurer parmi les personnes qui font obstacle à son ascension politique à Bitam.
Viendra alors le vote tant attendu qui débouchera sur un vote massif en faveur de la destitution pour 31 voix. Seul un élu, sur 32 votants se prononcera contre la destitution du troisième maire adjoint de Bitam.
«Il ne pouvait en être autrement, dès son retour de Libreville en début de semaine où il se dit qu’il a rencontré le ministre de l’Intérieur et obtenu son accord, Mbele a reçu tour à tour dans la discrétion, les conseillers municipaux du PDG et de Démocratie nouvelle qu’il a convaincu avec de fortes enveloppes» confie un chef de quartiers ayant requis l’anonymat.