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Modification des critères d’éligibilité à la présidence de la République : Menace pour le vivre-ensemble
Publié le mardi 21 septembre 2021  |  Gabon Review
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© Autre presse par DR
Modification des critères d’éligibilité à la présidence de la République : Menace pour le vivre-ensemble
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A deux ans de la prochaine présidentielle, les manigances de l’exécutif ne tiennent nullement compte de la volonté générale. En revanche, elles tendent à défendre des intérêts privés et partisans.

Sauf extrême naïveté, chacun peut le constater : l’exécutif multiplie les manigances en vue de conserver le pouvoir. Non content d’avoir initié trois révisions constitutionnelles en dix ans, il prend des ordonnances taillées sur mesure. Au gré de ses seuls intérêts, tout est reconsidéré ou reformulé. Ayant introduit l’obligation de résider «au Gabon depuis 12 mois au moins, en janvier 2011, il s’est curieusement empressé de retirer cette exigence, sept ans plus tard. Lors du conseil des ministres du 13 septembre courant, il s’est engouffré dans le vide ainsi créé pour repréciser les choses. Sont désormais éligibles les personnes «ayant résidé sans discontinuité sur le territoire national au moins six mois chaque année, au cours des deux dernières années précédant l’élection.» Une disposition applicable aux compatriotes «en poste dans les missions diplomatiques et dans les organisations internationales.»

Intérêt d’un petit groupe

Ces ajustements juridiques n’ont pas seulement pour but de disqualifier la diaspora, les diplomates et fonctionnaires internationaux de la course à la présidence de la République. Ils visent aussi un objectif beaucoup plus politicien voire mesquin : barrer la route à des personnalités déjà identifiées. Au-delà, ils poursuivent un objectif tout aussi clair : ouvrir un boulevard au futur candidat du pouvoir en place. A cette ultime fin, la Constitution peut être triturée, dévoyée. En fonction du contexte politique et institutionnel, la loi organique relative au président de la République peut être repensée. N’en déplaise aux zélotes de tout poil, tout ceci n’augure rien de bon. Bien au contraire. Comme le rappelle le Bureau régional des Nations-unies pour l’Afrique centrale (United nations regional office for central Africa – Unoca), les «élections inclusives et transparentes (sont) la clé de la stabilité et du développement (…)» Autrement dit, pour des «scrutins apaisés» il faut «veiller au respect des droits de l’homme et des citoyens.»

Certes, le critère de résidence «n’est pas une spécificité gabonaise.» Certes, il peut être «difficile de (…) diriger un pays dans lequel on n’est pas (…)» Mais, on ne peut s’accommoder de cette propension à légiférer en opportunité. Partout dans le monde, elle a été à l’origine de crises. A travers les âges, elle a été source de tensions. Pour la démocratie, elle demeure une menace. Pour le vivre ensemble, elle reste un danger. N’ayant pas vocation à régler des cas particuliers, la loi ne doit ni favoriser les uns ni handicaper les autres. Selon la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, elle est «l’expression de la volonté générale.» En d’autres termes, elle résulte de «la somme des différences de la volonté de tous.» C’est dire si elle doit rechercher l’intérêt général et non celui d’un petit groupe.

Main basse sur l’appareil d’Etat

La cohésion de notre société ne tient pas à notre capacité à reproduire les mauvaises pratiques venues d’ailleurs. Elle ne peut se renforcer dans le sectarisme et l’exclusion. En revanche, elle doit se nourrir de l’attachement à l’intérêt général. Or, les incessantes modifications du corpus juridique le suggèrent : à rebours de leurs discours sur l’Etat de droit, les détenteurs de l’autorité publique agissent d’abord par calculs personnels. A deux ans de la prochaine présidentielle, est-il judicieux de modifier les critères d’éligibilité ? Pourquoi des sujets d’une telle importance ne peuvent-ils jamais faire l’objet de débats ouverts et inclusifs ? Le fait majoritaire autorise-t-il la marginalisation d’une partie de la classe politique ? Légitime-t-il le mépris vis-à-vis de l’opinion publique ? Confère-t-il tous les droits ? Prive-t-il les autres du droit à la participation à la prise de décision ?

De toute évidence, les intérêts privés et partisans sont le moteur de la stratégie du pouvoir en place. Comme on a pu le voir à maintes reprises, les représentants de l’autorité étatique se satisfont de cette main basse sur l’appareil d’Etat. Du pouvoir exécutif à la Cour constitutionnelle en passant par l’autorité judiciaire ou le pouvoir législatif, toutes les institutions y trouvent leur compte. Pourtant, sous d’autres cieux, on a vu où peuvent mener de telles pratiques. On a pu mesurer combien elles sont nuisibles à la démocratie et au vivre ensemble. Des errements des autres pays, tirons au moins une leçon : seul l’Etat de droit protège les droits individuels et collectifs. Si le Gabon doit se doter d’institutions fortes, chacun gagnerait à y réfléchir.
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