En pré-campagne électorale dans la perspective de la présidentielle de 2023, le président du RPM, qui lorgne le statut de chef de file de l’opposition détenu jusqu’alors par Jean Ping, est en déplacement cette semaine dans le Haut-Ogooué, province d’origine d’Ali Bongo Ondimba et fief inexpugnable de la majorité présidentielle. Alors qu’il y espérait trouver son chemin de Damas, son séjour s’apparente davantage à un chemin de croix. Explications.
Ce devait être une rampe de lancement. Une manière de montrer que c’est lui, cette fois-ci, le candidat naturel de l’opposition. Que son tour est venu. Que Jean Ping, 81 ans en 2023, serait bien inspiré de lui transmettre le témoin. Mais à son grand dam, les choses ne se sont pas passées comme prévu.
En pré-campagne électorale dans la perspective de la présidentielle de 2023, Alexandre Barro Chambrier espérait mieux de sa tournée dans le Haut-Ogooué qui n’est pas encore tout à fait achevée. Quand bien même il s’agit d’un fief inexpugnable de la majorité présidentielle, le président du RPM ne s’attendait pas à recevoir un « accueil aussi confidentiel », selon l’expression d’un membre de son entourage.
« Certes, notre président ne s’attendait pas, comme il nous l’a confié, à recevoir un accueil triomphal. Mais de là à attirer aussi peu de gens, il est déçu », explique ce collaborateur qui tente de faire bonne figure.
Il est vrai que de Bakoumba à Moanda, en passant par Okondja, la venue d’ « ABC » n’a pas, c’est peu de le dire, fait recette. « Ici, c’est simple, tout le monde vote pour l’enfant du pays : le président Ali Bongo Ondimba. Car à part critiquer ce qu’il fait, l’opposition n’a rien à nous dire à nous la population », explique Martial, ingénieur à la Comilog.
Pour la plupart des habitants, même s’ils ont déjà entendu son nom, Alexandre Barro Chambrier demeure largement un inconnu. « C’est qui même ? », se demande Tony, jeune étudiant à Franceville. Et ceux qui le connaissent n’en n’ont pas pour la plupart pas une image positive. « Pour moi, je le dis clairement, c’est un traitre. Il était avec le PDG et puis quand on l’a sorti du gouvernement et qu’il a dû quitter le ministère des Mines, il est parti comme d’autres rejoindre l’opposition », vitupère Albert, retourné vivre à Okondja après sa mise en retraite de la fonction publique.
Ecran de fumée
Pour tenter malgré tout de faire parler de lui à l’occasion de cette tournée dans le Haut-Ogooué, l’équipe de communicants entourant Barro Chambrier en est réduit à monter en épingle dans les médias, à travers des publi-reportages stipendiés (comme sur le site d’information pro-opposition Gabon Review), des « incidents », selon les éléments de langage du RPM, qui se seraient déroulés à Okondja. En fait d’incidents, il s’agissait de quelques jeunes qui, dans une ambiance bonne enfant, ont scandé des slogans favorables au président Ali Bongo Ondimba à proximité du lieu où devait se tenir une rencontre entre le président du RPM et les habitants. Voilà tout.
Au passage, ce qu’oublient de dire les quelques médias en ligne qui ont fait paraitre des articles « sponsorisés », pour le dire pudiquement, c’est que lors de cette « rencontre », il y avait en tout et pour tout une… trentaine de personnes seulement ! On comprend dès lors l’empressement du RMP et ABC de créer un écran de fumée.
« Comment quelqu’un qui a été incapable de se faire élire député du 4ème arrondissement de Libreville peut-il espérer devenir président du Gabon ? »
« C’est une technique classique », explique un spécialiste en communication politique. « C’est du même ordre si vous voulez que quand l’opposition gabonaise tente de faire oublier les querelles personnelles entre ses différentes figures, les départs aussi nombreux et spectaculaires qui sont intervenus dans ses rangs récemment, ou son absence de programme en tentant de déporter le débat sur une possible fraude électorale », analyse l’expert, en référence aux interventions récentes de Mike Jocktane et d’Alexandre Barro Chambrier à ce sujet.
Alors que le président du RPM poursuit sa tournée – au plutôt son chemin de croix – dans le Haut-Ogooué, Albert, notre retraité de la fonction publique retourné vivre à Okondja, s’interroge : « Comment quelqu’un qui a été incapable de se faire élire député du 4ème arrondissement de Libreville peut-il espérer devenir président du Gabon ? » On attend en effet la réponse.