Économie’’Échec’’ du programme Graine : «Le rôle de l’Etat n’est pas de monter des projets, mais de trouver des mécanismes de financement», dixit J.-N. Diramba
Jean-Norbert Diramba a affirmé, le 6 juillet à Libreville, que la Gabonaise des réalisations agricoles et des initiatives des nationaux engagés (Graine) n’a été un franc succès, du moins la phase 1. Ancien ministre de l’Agriculture dans les années 90, il impute cette situation au rôle de l’Etat dans ce programme, mais également aux agriculteurs qui n’existent que de nom au Gabon.
Exécutée entre 2015 et 2019, la phase 1 de la Gabonaise des réalisations agricoles et des initiatives des nationaux engagés (Graine) n’a pas atteint les résultats escomptés. Jean-Norbert Diramba, ministre de l’Agriculture dans années 90, croit savoir pourquoi. «Ces dernières années, nous avons vu l’Etat faire des programmes et projets. Mais est-ce là le rôle de l’Etat, de monter des projets et appeler des gens qui ne sont même des agriculteurs ? C’est le cas du programme Graine. On a demandé aux gens de se constituer en coopératives. On est même allé jusqu’à leur proposer des bourses. Ça n’a pas marché, il faut le dire !», a déclaré l’ancien ministre d’Omar Bongo.
«Ça n’a pas marché tout simplement parce que les gens sont venus pour avoir de l’argent de frais en se constituant en coopératives. Le rôle de l’Etat n’est pas de monter des projets, mais de trouver des mécanismes de financement pour soutenir l’agriculture. On finance un agriculteur, on ne demande pas aux gens de venir prendre des fonds pour faire de l’agriculture. Dans le dernier cas, les gens viendront prendre ces fonds, mais ne deviendront jamais agriculteurs», a ajouté le maire de la commune de Mouila. L’éminent membre des Démocrates (LD, la formation politique de Guy Nzouba Ndama) s’exprimait à l’occasion de la session inaugurale des concertations nationales sur les systèmes alimentaires, le 6 juillet à Libreville.
«Il n’y a pas d’agriculteurs au Gabon»
Pour l’élu de l’opposition, l’Etat doit se lancer dans la recherche pour permettre aux agriculteurs d’augmenter leur rendement. «C’est ce que je perçois, moi, comme rôle de l’Etat», a-t-il déclaré. Une analyse qui pourrait aider le gouvernement dans ses réflexions autour de la deuxième phase du programme Graine, prévue de 2021 à 2025. Aussi, les dirigeants doivent-ils prendre en compte la problématique de la main d’œuvre, car, de l’avis de Jean-Norbert Diramba, il n’y a pas d’agriculteurs au Gabon.
«Avons-nous des agriculteurs ou de simples planteurs ? Un agriculteur est un opérateur économique qui plante, entretient ses plants, les vends et tient une comptabilité : c’est un métier (…) Ceux qui plantent aujourd’hui, ce sont nos parents, des personnes âgées. Les jeunes ne s’y intéressent pas. Le Gabon étant un pays pétrolier, l’intérêt était d’aller à l’école pour être fonctionnaire : c’est ce qu’on nous a mis dans la tête. Beaucoup de nos médecins ont des cliniques. Mais nos ingénieurs agronomes, après leurs études, deviennent fonctionnaires. Pourquoi ceux qui ont la pratique et la connaissance ne se lancent-ils pas dans l’agriculture ? Et nous nous évertuons à demander aux gens qui n’ont aucune connaissance, à devenir des agriculteurs», a-t-il conclu.