Après un feuilleton communicationnel autour des visites officielles et séances de travail d’Ali Bongo à Londres (Angleterre), la présidence gabonaise annonce une allocution du chef de l’État ce 28 mai à 19h45. Une information fort bien accueillie, d’autant plus que les attentes sont grandes et nombreuses, notamment au sujet du couvre-feu en cours. Quand l’expectative met fait rimer Commonwealth et déconfinement.
Le chef de l’Etat gabonais s’adressera à la Nation ce 28 mai en soirée. Les services de communication de la Présidence de la République l’ayant annoncé, ce 27 mai, n’ont cependant laissé filtrer aucun traitre mot pouvant donner une idée des sujets devant être abordés lors de cette allocution.
Sera-t-il question de l’adhésion du Gabon au Commonwealth ? Nombreux pensent, en effet, qu’en préparation de la toute prochaine réunion des chefs de gouvernement du Commonwealth à Kigali en juin, Ali Bongo va s’employer à expliciter l’idée d’une entrée du Gabon dans cette organisation anglophone. S’exprimera-t-il sur la crise survenue ces jours-ci à Mékambo dans l’Ogooué-Ivindo ? Consécutive au conflit humains-faune, il y est notamment question de défiance de l’autorité de l’Etat, d’armes de chasse de gros calibre éparpillées dans la nature après leur saisie auprès des braconniers puis leur confiscation par les populations qui auraient attaqué des éco-gardes. Sera-t-il question d’une importante annonce relative au Covid-19 ? Le contexte, à ce sujet, amène en tout cas les populations à crier, depuis des mois, à l’étranglement du fait des interminables mesures gouvernementales restrictives.
«Le couvre-feu le plus long du monde»
Toujours est-il qu’au sujet du discours annoncé, la majorité des Gabonais s’attendent surtout à une levée des mesures de restriction relatives à la lutte contre le Covid-19, notamment le couvre-feu. Ce dispositif contraignant, antinomique des libertés individuelles et collectives garanties par la Constitution, court en effet sans discontinuer depuis 14 mois. Ce qui a fait dire à Dynamique Unitaire, la fameuse centrale syndicale des fonctionnaires, qu’il est «le couvre-feu le plus long du monde».
En tout cas, depuis quelques jours, de nombreux Gabonais ressassent une promesse du Premier ministre, Ossouka Raponda : «Si nous parvenons à infléchir la courbe de la pandémie grâce à la stricte application, par tous, des mesures sanitaires, et à faire retomber en deçà de 50 le nombre de contaminations par jour, alors les restrictions seront rapidement allégées». On y est ! La courbe des contaminations a effectivement baissé, faisant titrer par le quotidien L’Union, ce 27 mai : «Gabon : les nouvelles contaminations en dessous de la barre des 50/jour».
Mais, dans les chaumières de tôles ondulées tout comme dans certains salons feutrés, nombreux doutent d’une levée du couvre-feu. Ils n’attendent du discours du président qu’un léger réaménagement du dispositif. Estimant que, du fait de l’état de santé du chef l’Etat, le pouvoir se sert du couvre-feu pour cadenasser l’expression démocratique, ils ne croient pas du tout que «les professionnels de la peur» au Gabon peuvent s’engager dans une option audacieuse et souveraine comme l’ont fait la Côte d’Ivoire, le Bénin, le Sénégal, le Togo ou le Cameroun qui ont adopté des voies plus réalistes en levant leurs couvre-feu pour sauver leurs économies, sans pour autant être devenus des cimetières à ciel ouvert.
Commonwealth et déconfinement : quid de l’aide promise par Macron ?
Au moment où le Gabon est en flirt avec le Commonwealth, le déconfinement marquerait une ferme volonté de démarcation avec la France dont le président avait fortement recommandé, au début de la pandémie, le confinement des pays africains. Le président français le conditionnait même à l’octroi d’une aide. «J’ai beaucoup parlé avec nos partenaires africains, pour qu’ils décident au maximum du confinement et qu’ils retardent l’épidémie. Plus ils la retardent, plus les Européens sont en situation de leur apporter de l’aide, parce qu’on n’aura pas les pics épidémiques au même moment», rappelait Emmanuel Macron himself dans une interview à RFI le 14 avril 2020. Le Gabon a-t-il, sur cette base, reçu plus d’aide que les autres partenaires africains de la France ayant déconfiné ou levé leur couvre-feu ?
En tout cas, du discours de ce soir, les Gabonais attendent surtout et d’abord, du président Ali Bongo, l’arrêt de l’état d’urgence les précarisant. L’annonce d’un retour à la vie normale aurait résolument un effet positif très fort… du point de vue populaire.