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Suppression de l’ANGTI : Un échec de plus pour le pouvoir
Publié le lundi 5 octobre 2020  |  Gabon Review
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© Autre presse par DR
Les agents de l’ANGTI sont passés à la vitesse supérieure
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Le Conseil des ministres du 02 octobre courant a entériné la suppression de l’Agence nationale des grands travaux d’infrastructures (ANGTI). Révélatrice de la mal-gouvernance ambiante, cette décision est le résultat d’un bricolage juridico-institutionnel.

De la plus solennelle des manières, le pouvoir vient d’acter un échec de plus. A la faveur du Conseil des ministres du 02 octobre courant, il a annoncé la suppression de l’Agence nationale des grands travaux d’infrastructures (ANGTI). Autrement dit, en présence du président de la République et avec son aval, le gouvernement a déposé le bilan d’une entité jadis présidée par… le président de la République. En d’autres termes, la plus emblématique des structures créées et portées par Ali Bongo a cessé d’exister. Au-delà de la forme ou du moment, le régime n’a pas des raisons de pavoiser. Si ses zélateurs chercheront à exonérer le président de la République, leurs circonvolutions rhétoriques ne changeront rien au fond de l’affaire ni à l’accablante réalité : euthanasiée sous le regard approbateur de son promoteur, l’ANGTI a disparu sans dresser son bilan, sans avoir fait la preuve de son utilité.

Expérimentation hasardeuse

Pour le pouvoir en place, cette décision a quelque chose de désespérant. Révélatrice de la mal-gouvernance ambiante, elle est le résultat d’un bricolage juridico-institutionnel. Pourquoi avoir voulu dépouiller l’administration des Travaux publics au bénéfice d’une structure en création ? Pourquoi avoir rattaché cette entité au président de la République au mépris des incompatibilités prévues par la Constitution ? Pourquoi lui avoir confié la quasi-totalité des budgets d’investissement des années durant ? Pourquoi l’avoir placée entre les mains de corsaires de tout poil ? Pourquoi avoir systématiquement marginalisé les compétences locales ?

Certes, les Travaux publics n’ont pas toujours été exempts de tout reproche. A maints égards, ils ont même failli. Certes, il y avait urgence à «veiller à la bonne exécution des projets», selon le mot d’Ali Bongo. Pour ce faire, il fallait maîtriser les coûts et s’assurer du respect des normes ou des délais. Certes, Bechtel, la firme américaine contractualisée pour assurer l’assistance technique, semblait précédée par une réputation de compétence. Mais, en décidant de placer l’ANGTI sous la tutelle du président de la République, le gouvernement faisait le choix de l’exonérer de toute reddition des comptes. De par ce curieux positionnement, aucun contrôle n’y était possible. Dès le départ, cet établissement public avait un statut particulier, quasiment sui generis. Or, au vu des risques de conflits de compétences, des prévisibles blocages et du flou autour de l’utilisation des subventions ou de la mobilisation des financements, de nombreuses voix avaient dénoncé cette expérimentation hasardeuse. Pêle-mêle, elles pointaient la violation de l’article 14 de la Constitution, les entorses au régime juridique des établissements publics et le non-respect des modalités d’exercice de la tutelle de l’État. Peine perdue.

Fiasco politique, institutionnel et opérationnel

Malgré les réserves de différentes forces sociales, le pouvoir décidait de faire comme bon lui semblait. Dans son entreprise, il savait pouvoir compter sur une majorité parlementaire corvéable et taillable à merci. Il savait aussi pouvoir s’appuyer sur un Conseil d’État et une Cour constitutionnelle rongés par des considérations partisanes. Pourtant, personne ne déniait au président de la République le droit de déterminer la politique de la nation. Nul ne contestait les insuffisances de l’administration ou l’existence de lourdeurs bureaucratiques. Tout le monde s’accordait sur la nécessité de construire des infrastructures. Pas grand monde ne s’opposait à la mise en place d’un établissement public spécialisé. Le débat portait sur la violation de l’esprit des institutions et de la lettre de la Constitution. Au passage, beaucoup recommandaient une clarification du mandat de cette entité. Devait-elle assurer la maîtrise d’œuvre ou la maîtrise d’ouvrage ? Devait-elle s’occuper des projets structurants ou de tout, y compris la réfection des écoles et le pavoisement de la ville ?

Sur toutes ces questions, le pouvoir avait choisi de faire l’impasse. Davantage de concertation, une plus grande disposition à l’écoute et une réflexion plus approfondie lui auraient pourtant épargné l’humiliation actuelle. Ayant fait montre d’une stupéfiante surdité, il doit s’en prendre à lui-même. S’il veut se montrer à la hauteur de l’enjeu, il doit dégager les responsabilités et en tirer les conséquences, y compris aux plans politique et pénal. A minima, il doit battre publiquement sa coulpe et tirer les enseignements de ce fiasco politique, institutionnel et opérationnel. Faute de le faire, il cautionnerait le dilettantisme, l’enfumage et l’irresponsabilité dans la conduite des affaires publiques.
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