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Loi sur la dépénalisation de l’homosexualité au Gabon : Pourquoi la responsabilité qui pèse sur le Sénat est aussi lourde
Publié le jeudi 25 juin 2020  |  LaLibreville.com
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© Gabon Review par DR
La présidente du Sénat, Lucie Milebou-Mboussou, le 2 septembre 2019, à Libreville
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Alors que le texte en faveur de la dépénalisation de l’homosexualité au Gabon a été adopté hier par l’Assemblée nationale, c’est au tour du Sénat de se prononcer cet après-midi.

Le texte sur la dépénalisation de l’homosexualité au Gabon suit son cours. Après son adoption hier par les députés, c’est au tour ce mercredi 24 juin après-midi des sénateurs de se prononcer. Il y a un an presque jour pour jour, ce sont eux qui avaient pris l’initiative de pénaliser cette orientation sexuelle.

Mais depuis, les esprits ont évolués. « On est peut-être allé trop loin à ce moment-là », concède un sénateur de la majorité qui avait voté en faveur du texte à l’époque. « Il faut tenir compte des équilibres globaux », ajoute-t-il.

Ce qu’entend l’élu par « équilibres globaux », c’est la sensibilité de l’opinion publique gabonaise, mais également les impératifs économiques.

En effet, le Gabon, à l’instar de tous les pays dans le monde, a été frappé par la crise du Covid-19. Pour en sortir et relancer la machine, le pays a fourni d’importants efforts sur le plan budgétaire comme le montre la loi de Finances rectificative qui vient d’être adopté en conseil des ministres. Mais l’aide des bailleurs de fonds, notamment multilatéraux, demeurent indispensable en pareille circonstance. Or, comme l’explique un économiste au sein de la Banque mondiale, de plus en plus de conventions de prêts ou de dons ont pour conditionnalité la lutte contre toute forme de discrimination, qu’elles soient raciales, culturelles, religieuses ou fondées sur… l’orientation sexuelle.

« En cette période, l’aide des bailleurs de fonds internationaux est cruciale. Or, la quasi-totalité d’entre eux exigent des législations dans les pays demandeurs qui soient conformes aux valeurs d’égalité et de non-discrimination. C’est le cas de la Banque mondiale, du FMI, de l’Union européenne et de la plupart des grandes banques de développement. De ce point de vue, il est clair qu’un pays qui pénalise l’homosexualité en particulier part avec un sérieux handicap », explique cet économiste.

Pour cet autre sénateur, élu du Haut-Ogooué, il faut faire preuve de responsabilité, quitte à mettre de côté ses convictions personnelles. « Il faut dans ce débat raison garder. Le projet du gouvernement n’est pas de légaliser l’homosexualité mais de le dépénaliser. Au fond, il s’agit de revenir à ce qu’était l’état du droit avant 2019 et qui est plus conforme à la tradition de tolérance qui est celle de notre pays », argumente-t-il. « Ensuite, il faut être pragmatique, si prendre une telle loi permet à notre pays de recevoir plus d’aides pour mieux soigner et nourrir la population, mais aussi sauver l’emploi et relancer l’économie, alors je vote pour sans aucun état d’âme », affirme-t-il.

Un point de vue partagé par l’un de ses collègues, originaire du Woleu-Ntem, qui ajoute qu’outre l’aspect moral et sociétal, l’intérêt n’est pas seulement économique. « Il y a également pour le Gabon, qui est objectivement l’un des pays les plus tolérants en Afrique, un gain d’image. Ne pas revenir sur la pénalisation de l’homosexualité, c’est prendre le risque de se mettre en position orthogonal par rapport à cette perception et à être à contre-courant de l’Histoire », soutient l’élu.

Pour ce professeur en science politique de l’UOB, les avantages potentiels à voter le texte de loi outrepasse très largement les inconvénients éventuels. « Dépénaliser quelque chose qui l’a toujours été depuis les années 1960 et sur lequel on est revenu il n’y a même pas un an est une concession très minime au regard des avantages que le Gabon peut en retirer en termes de soutien financier, ce qui est très important au moment où la crise du Covid-19 continue de sévir, mais aussi en termes d’image et sur le plan diplomatique car une telle initiative contribue à redorer le blason du pays à l’extérieur, ce qui est loin d’être négligeable », analyse-t-il.

Face à une opposition qui elle a choisi de voter à l’unisson contre la dépénalisation, c’est une responsabilité particulièrement lourde qui pèsera cet après-midi sur les épaules des sénateurs de la majorité. A commencer par le premier d’entre eux, Lucie Milebou-Aubusson, le président de la Haute-chambre vers qui tous les regards sont désormais tournés au Gabon comme à l’extérieur.
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