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L’enseignement supérieur au Gabon et en Afrique: il y aura un avant et un après covid-19
Publié le dimanche 7 juin 2020  |  Gabon Media Time
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© Autre presse par DR
Le Pr Daniel Franck Idiata
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A l’heure où la continuité du service public de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur au Gabon est à l’épreuve de la pandémie du Coronavirus, qui a conduit le gouvernement à tout interrompre, le professeur titulaire des Universités, Daniel Franck Idiata Mayombo s’est prononcé par le biais d’une tribune dans laquelle il estime que « l’Enseignement supérieur » aussi bien au Gabon qu’en Afrique ne sera plus le même après la crise de la Covid-19 qui secoue actuellement le monde entier. Lecture.

« I. POINT DE DÉPART

Depuis plusieurs mois déjà, les universités et autres établissements d’enseignement supérieur du monde entier, et l’Afrique ne fait pas exception à cette règle terrible, sont frappés de plein fouet par la pandémie du nouveau Corona virus (COVID-19). Partout ou presque, les activités pédagogiques ont été impactées. Selon l’UNESCO, ce sont des millions d’étudiants qui se trouvent dans l’incapacité d’assister à leurs cours.

Dans cette contribution – éminemment modeste – qui porte sur le cas spécifique du Gabon, je montre pourquoi la crise sanitaire, malgré les très graves dommages sanitaires et économiques qu’elle cause, peut aussi se révéler, au final, comme une très belle opportunité pour l’enseignement supérieur de façon générale et pour les établissements qui en auraient profité pour se réorganiser et se réinventer en particulier.

DU PARADIGME ANCIEN AU PARADIGME NOUVEAU
L’enseignement supérieur en Afrique, et le contexte gabonais en est la parfaite illustration, se caractérise généralement par d’importants problèmes, de plus en plus graves et insolubles chaque année, entre autres : massification exponentielle de la population étudiante, insuffisance voire absence de structures parfois même les plus élémentaires, insuffisance voire absence de moyens financiers, situation sociale explosive couplée, la plupart du temps, à des problèmes d’organisation et de gouvernance. Dans un tel contexte, les établissements encaissent de plein fouet le violent choc d’une crise sanitaire aussi imprévisible qu’affligeante et sont dans l’incapacité de réagir, tétanisés qu’ils sont par un quotidien fort déprimant.

Evidemment, et je le redis encore, la crise sanitaire liée au nouveau Corona virus (COVID-19) était imprévisible. Cependant, et on le voit ici ou là, en Amérique du nord, en Europe ou en Afrique, les établissements les mieux organisés et les mieux structurés ont su y faire face en apportant une réponse technologique adaptée. A l’heure du numérique et des réseaux sociaux, il n’a pas été bien compliqué de mettre en place des dispositifs de formation à distance (FOAD) ; ce d’autant plus que la plupart des établissements dans les pays que nous citons en exemple ont mis en place ce dispositif depuis très longtemps et qu’il fait partie de la culture.

Jusqu’ici, nos établissements d’enseignement supérieur avaient systématisé le présentiel comme unique mode d’enseignement. Le présentiel, faut-il le rappeler, désigne le moment où les apprenants

qui suivent une formation sont réunies dans un même lieu avec un formateur. La formation en présentiel correspond au mode magistral (information souvent descendante) et pour une durée prédéterminée. Voici, à mon sens, la principale tare (congénitale ?) qui fait que nombre de nos établissements d’enseignement supérieur sont en incapacité de réagir et de trouver des solutions pour sauver l’année académique dans des délais raisonnables.

L’obstination au choix du présentiel impose, hélas, la patience comme unique solution. La patience, pour attendre la fin de la crise sanitaire et reprendre normalement les choses où elles s’étaient arrêtées, en mode présentiel comme l’année dernière, tout comme l’année précédente et comme depuis toujours depuis la création de nos établissements. Un choix facile, mais aux conséquences absolument catastrophiques, quand on sait que sous peu, entre dix et quinze mille nouveaux bacheliers vont arriver et qu’il sera donc très difficile de gérer toutes ces cohortes « embouteillées » d’étudiants.

Changer ce vieux paradigme, c’est, à mon sens, accepter de faire un grand saut vers l’inconnue. C’est accepter d’innover et d’expérimenter la formation à distance. La formation à distance est une forme d’enseignement qui ne comporte pas la présence physique d’un enseignant et des apprenants dans une classe physique. De manière virtuelle, elle est accessible où que l’on se trouve, en présence des autres participants ou non. Il existe deux formes de formation à distance. La formation à distance dite synchrone : il s’agit d’une classe virtuelle, elle se déroule en temps réel. Les apprenants assistent en direct à une visio-conférence ou audio-conférence selon un horaire défini. La formation à distance dite asynchrone : les cours ont lieu en différé. Les apprenants ont accès aux cours en format pdf ou vidéo accessibles à tout moment sur la plateforme des cours en ligne de leur établissement.

Evidemment, les choses ne vont pas se faire en un simple claquement de doigts, comme par magie. Mais le plus difficile, c’est seulement d’essayer et de commencer. Au fur et à mesure, des correctifs vont être apportés pour garantir l’amélioration continue du dispositif.

Les ministres de l’Education nationale des pays de la CONFEMEN de manière générale, le Gabon en particulier, ont apporté aux afro pessimistes, la preuve magistrale qu’il est possible de mettre en œuvre des programmes d’éducation des enfants en contexte de crise sanitaire et de fermeture des établissements. Nous avons tous été témoins de cette expérimentation d’enseignement à distance réalisée avec beaucoup de succès, comme dans la plupart des pays de la CONFEMEN, en dépit de problèmes techniques objectifs que ce genre d’innovation forcée peut induire. Ce dispositif d’enseignement à distance très innovant a consisté à enregistrer les cours et à les diffuser sur des chaînes de télévision et de radios publiques ou privées nationales et/ou locales. Dans le cas du Burkina Faso par exemple, l’opération a mobilisé sept télévisions et une cinquantaine de radios pour diffuser des contenus aux élèves sur l’ensemble du territoire. Au Gabon, Gabon Télévisions et Radio Gabon ont permis à de nombreux enfants, y compris dans les coins les plus reculés du pays, de suivre des cours et de compléter, ce faisant, leur programme de formation de l’année scolaire.

Si un ministère peut tenter ce genre d’expérimentation à l’échelle d’un pays, il va de soi qu’une université ou une grande école supérieure peut y arriver avec plus d’efficacité.

III. DEMAIN SERA MEILLEUR QU’AUJOURD’HUI

J’ai emprunté ce slogan d’un candidat à l’élection présidentielle de 2005 au Gabon, pour montrer qu’il est, pour le coup, absolument possible d’envisager un avenir radieux pour l’enseignement supérieur au Gabon, bien sûr s’agissant des établissements qui auront profité de l’opportunité que leur offre paradoxalement la crise sanitaire pour innover et se réinventer.

Les établissements privés sont, à cet égard, avant-gardistes en ce qu’ils ont, pour la plupart, continué à mettre en œuvre les activités pédagogiques malgré la crise sanitaire. Certains offrent des solutions basiques consistant à envoyer aux étudiants des supports de cours via WhatsApp et à proposer, par la suite, des cours en ligne à travers des solutions de communication comme CISCO Webex Meeting, FreeConference, Google Hangouts, Jitsi, Microsoft Teams, Skype, Zoom meetings, etc. D’autres, plus robustes et mieux organisés, offrent des solutions plus efficaces qui prennent en compte à la fois la formation synchrone et asynchrone à travers des plateformes dédiées.

Pour moi, la formation à distance est la solution pour régler les problèmes de massification croissante des étudiants et la faiblesse des structures. Grâce à la FOAD, un étudiant des PK n’a plus besoin de se lever à 5 heures du matin pour espérer gagner l’UOB à temps et avoir une place dans un amphi bondé. Au contraire, il reste tranquillement chez lui et se connecte à loisir sur la plateforme des cours en ligne de son établissement pour télécharger les supports de cours et suivre, aux horaires indiqués, les cours en live par visioconférences. Ciao les sempiternels problèmes de classes et d’amphithéâtres ! Ciao les problèmes de paperasse inutile ! Ciao les portails barricadés, … Même si les questions de retard de bourses, de paiement d’heures complémentaires et de jurys ainsi que l’intégration de nouveaux enseignants vont continuer de se poser et que des solutions vont continuer d’être trouvées au fur et à mesure, comme l’année dernière et l’année précédente, …

Je suis absolument enthousiasmé par la perspective certaine que la formation à distance va, au Gabon, prendre de plus en plus de place, grâce à l’accessibilité et à la diversification des moyens de diffusion. Je suis persuadé que les établissements vont se réinventer et s’équiper en outils informatiques de pointe (serveurs, clouds, ordinateurs, etc.), qu’ils vont recruter de plus en plus de webmasters et d’informaticiens de très haut niveaux, qu’ils vont s’équiper de matériels d’audiovisuel et de cinéma pour fabriquer les cours en vidéo, que les enseignants, aujourd’hui peu ou pas formés en pédagogie de FOAD, le seront très bientôt.

Je suis persuadé que l’Etat va mettre en place de nouvelles politiques pour encourager la FOAD, notamment en favorisant l’équipement en outils informatiques à moindre coûts, par exemple zéro frais de douane pour le matériel informatique dédié à l’éducation ; en distribuant des tablettes à l’ensemble des étudiants et en mettant en place un pack de connexion internet à très faibles coûts pour l’éducation. Ce sont, là,

quelques-unes des contreparties nécessaires à la réussite de cette belle utopie. Je suis très optimiste. Je crois en demain, pour nos futurs apprenants.



Daniel Franck Idiata Mayombo, Professeur Titulaire des Universités ».
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