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Outrage : Le magistrat, un intouchable ?
Publié le vendredi 8 mars 2019  |  Gabon Review
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© Autre presse par DR
Les magistrats
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Notion fourre-tout, souvent utilisée par les dépositaires de l’autorité et de la force publique pour régler des comptes personnels, l’outrage semble devenu chez certains, les magistrats en l’occurrence, un bouclier censé les soustraire de l’exemplarité dont ils sont tenus de faire preuve, y compris en dehors des salles d’audiences.

Au même titre que les agents des forces de l’ordre, les autorités politiques, diplomatiques et administratives, en tant que personnes dépositaires de l’autorité publique, sont protégés par la loi. Une parole de travers ou un geste violent à leur encontre sont considérés comme de l’outrage lorsqu’ils sont en service. Pourtant, il est assez rare que ces catégories de personnes attaquent en justice ou se servent de leur statut pour emprisonner presque immédiatement l’indélicat. Chez les magistrats gabonais, c’est plutôt le contraire. L’outrage à magistrat est brandi au moindre commentaire, y compris en dehors du service, parfois dans la vie privée.

En passe de devenir une notion fourre-tout, l’outrage à magistrat a été utilisé ces derniers jours dans quelques cas, dont un en particulier a été médiatisé par les autorités judiciaires elles-mêmes : l’arrestation dans une boîte de nuit de Libreville, en février dernier, de la chanteuse Shan’L La Kinda. Pour en être venu aux mains avec un des agents l’ayant contrôlée dans l’établissement, l’égérie de Direct Prod avait été reconnue coupable d’outrage à magistrat. Libérée au bout de deux jours, elle s’était justifiée en prétextant que l’agent de police judiciaire lui avait manqué de respect.

Moins médiatisée, mais qui dit tout de l’abus de certains magistrats sur la notion d’outrage, «l’affaire Marie-Claudette Ndagui». La présidente de l’ONG Agos a été condamnée le 18 février à huit mois d’emprisonnement ferme et quatre mois de sursis, en plus d’une amende de 10 millions de francs CFA à verser au procureur de la République, Olivier N’Zahou. Son crime : l’outrage à magistrat. À l’occasion d’un point presse, elle avait dénoncé les abus et malversations supposés du parquet de Libreville, du procureur de la République et de certains agents des forces de l’ordre.

Certains sur les réseaux sociaux rapportent que récemment, à Oyem, pour avoir commenté un post mettant en cause Rodrigue Ondo Mfoumou, le procureur de la République, un jeune internaute a été mis aux arrêts puis écroué. Alioune Kane aurait renchéri le post de l’activiste Thibaut Adjatys en accusant le magistrat de faire du commerce de véhicules dans la capitale septentrionale.

Ce que dit la loi

L’outrage à magistrat est bel et bien prévu par la loi gabonaise, précisément dans l’article 157 du Code pénal qui le définit comme : «toute atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne ou d’un corps dépositaire de l’autorité ou de la force publique commise par paroles injurieuses, diffamatoires ou menaçantes, écrits, dessins ou gestes, constitue un outrage».

Si certains hommes de droit, à l’instar du bâtonnier Lubin Martial Ntoutoume, indiquent que l’outrage à magistrat est avant tout «une infraction d’audience», ils ne reconnaissent pas moins qu’en dehors de la salle d’audience, le magistrat peut également l’exciper, mais à une condition précise : que le magistrat soit en fonction.

«L’outrage est proche de l’injure et de la diffamation, mais à la différence que l’outrage à magistrat est retenu dans le cadre d’un propos portant atteinte à l’honneur et à la dignité de la fonction de celui qui la porte. Donc, oui, il peut avoir outrage à magistrat en pleine audience comme en dehors. Mais en dehors de la salle d’audience, il faudra que le propos outrageant soit porté sur la personne dans l’exercice de ses fonctions», précise l’avocat au barreau du Gabon Anges Kevin Nzigou. Comme quoi, l’interpellation et la mise en garde à vue de Shan’L étaient justifiées.

Le magistrat, juge et partie ?

Dans le cadre d’un outrage à magistrat, comme toute autre infraction, en premier ressort, c’est l’officier de police judiciaire qui est chargé de le constater, et non le magistrat lui-même, comme cela est malheureusement le cas dans plusieurs affaires. C’est le Code de procédure pénale qui l’indique, même si pour beaucoup, les dés sont pipés dès lors que l’infraction est commise contre une autorité judiciaire. Est-ce la prison assurée ? «Non», répond Anges Kevin Nzigou.

L’avocat assure que si le magistrat est lui aussi habilité à constater un outrage, y compris à son encontre, il ne peut être juge et partie, d’autant qu’il ne peut, selon la loi, trancher lui-même sa propre affaire. «Mais si un magistrat est appelé à juger sa propre affaire, il faut savoir de quel bord il se situe. S’il s’agit du procureur, ce n’est pas lui, mais le juge qui tranchera», précise le jeune avocat.
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