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«Léon M’ba» : Notes de la leçon inaugurale du Pr Elikia M’Bokolo
Publié le jeudi 7 decembre 2017  |  Gabon Review
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© Gabon Review par DR
Le Pr Elikia M’Bokolo lors de sa leçon inaugurale de «Léon M’ba : 50 ans après»
2 décembre 2017. Paris. Le Pr Elikia M’Bokolo lors de sa leçon inaugurale de «Léon M’ba : 50 ans après»
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Annoncée comme leçon inaugurale de l’exposition «Léon M’ba : 50 ans après», la communication du professeur Elikia M’Bokolo s’est muée en leçon terminale, finalement livrée le 2 décembre dernier à Paris. Son titre : «L’un et le multiple : Léon parmi les siens».

Contraint par les aléas de la vie à ne pas répondre à son engagement le jour J, précisément le 27 novembre dernier pour le lancement de l’exposition «Léon M’ba : 50 ans après», le professeur Elikia M’Bokolo s’est rattrapé, le 2 décembre, lors de la cérémonie de clôture de la commémoration des 50 ans de la disparition de celui qu’il considère comme père de l’indépendance et de la nation gabonaise.

Pour le speaker de Mémoire d’un Continent, l’émission de RFI dédiée à l’histoire de l’Afrique, ce n’est pas par hasard que l’on se retrouve, 50 ans après, pour évoquer la mémoire de Léon M’ba, rappeler son œuvre et bien d’autres aspects de sa vie. «Je le dis parce que chez nous autres, Africains d’Afrique centrale et d’ailleurs, nous avons une certaine complaisance mêlée d’orgueil et de prétention qui nous nous poussent à jeter aux orties, à mettre dans les poubelles de l’histoire ces pères de la Nation comme si on pouvait s’en passer», a-t-il laissé entendre à l’entame de sa conférence.

Face à ses pairs dont les professeurs Grégoire Biyogho, Moïse Nsolé Bitéghé et une nombreuse assistance, le Pr Elikia M’Bokolo a indiqué, en tant qu’historien mais aussi et surtout en tant que citoyen d’un pays africain, qu’on ne peut pas «procéder à cette espèce d’élimination et se passer de son père (…) Car on ne choisit pas son père, on reste toujours, dans quelque cas que ce soit, le fils de son père».

Le coordinateur scientifique de la commémoration trouve chez Léon M’ba, «cet homme en train de mourir», dont l’histoire se racontait en France, une sorte de générosité, d’élégance et une clarté de vision. Invoquant Omar Bongo qui, lors de l’inauguration du Mausolée Léon M’ba à Libreville, avait déclaré: «le Gabon n’est pas seulement gabonais, le Gabon n’est pas seulement africain, le Gabon est dans le monde», Elikia M’Bokolo déduit : «Léon M’ba, on pourrait dire, partageait ce point de vue qu’il a peut être passé à son successeur. C’est-à-dire comment situer le Gabon dans le monde ?».

L’auteur de «Médiations africaines. Omar Bongo et les défis diplomatiques d’un continent» (2009) relève que l’ancien chef de l’Etat a été, à sa manière, un «passeur de rupture». L’explication, paradoxale à la limite : «Léon M’ba qui n’a pas suivi le chemin des écoles, avait une vision différente. Son fameux essai de 1970 sur le droit coutumier était en fait, pour nous autres historiens, une réflexion d’historien sur la permanence des institutions, sur la permanence des pratiques quotidiennes que sur la permanence de la vision que les gens ont de leur présent, de leur passé et de leur futur». Il y a donc chez lui, une sorte de vision prémonitoire de la continuité de l’espace devenu colonie et puis Etat. Elikia M’Bokolo procède ensuite à un rapprochement de Léon M’ba et André Raponda Walker. Deux hommes de la même époque ayant tous deux brillé dans des domaines différents. «Je crois que nous tenons là deux figures : l’une plutôt spirituelle et culturelle, l’autre culturelle, juridique et politique. Et tous les deux font l’honneur à l’Etat que Léon M’ba a fondé et dont il a été le premier président».

L’historien a dénoncé après quoi des sites Internet peu recommandables traitant du Gabon avec une vision a posteriori, parfois négative, qui tentent de nier la réalité du moment important que fut l’indépendance. Pour lui, l’indépendance du Gabon a été acquise dans la fluidité, dans une espèce de douceur, dans un consensus, avec des rondeurs et sans aspérités. Pourtant Elikia M’Bokolo note qu’«aucune indépendance n’a été octroyée et la vie de Léon M’ba montre qu’on ne la lui a pas donné. Il a demandé l’indépendance et cela de longue date. Dans la continuité d’une existence et d’une pensée, il a été une sorte de modèle pour nous en Afrique centrale». «Regardez ce qu’a été l’histoire des deux Congo entre 1960 et 1976, regardez ce qu’a aussi été l’histoire de la Centrafrique de la même époque. On constate que dans le cas du Gabon, le père de l’indépendance a été effectivement lui, parce qu’il a su organiser le passage de ce moment de naissance à un moment de stabilité».

L’historien estime donc que Léon M’ba mériterait d’être un peu plus connu sur le continent. Mais, il n’avait pas peut-être, lui-même, cette volonté de s’afficher, de se montrer, de faire de grandes phrases, de chercher de grandes formules, pas toujours fécondes au demeurant.

Enfin, le Pr Elikia M’Bokolo estime que Léon M’ba a été le père de la Nation. Ici se pose la question de son rapport ou de ses rapports avec l’un des mouvements importants de l’époque, le panafricanisme. «On accuse souvent le Gabon de n’avoir pas adhéré au panafricanisme. La formule célèbre, Gabon d’abord est quelque chose que nous devons prendre au sérieux. Car, pour faire le panafricanisme, il faut qu’il y ait des unités nationales qui vont contribuer à construire cet angle», a expliqué l’auteur de «L’Afrique au XXe siècle : le continent convoité» (1985).

En disant «Gabon d’Abord», croit Elikia M’Bokolo, l’ancien président gabonais pensait au futur plutôt qu’au passé. «Ça voulait dire construisons d’abord le Gabon», note-t-il. Autrement dit, souligne le conférencier, ce personnage très discret parmi les siens, les pères de la nation en Afrique, très discret sur la scène internationale, est peut-être l’un des modèles de l’homme d’Etat africain. «Nous avons des modèles flamboyants…, mais nous avons ces autres modèles qui, dans la discrétion, mais en même temps dans l’exigence, mériteraient d’être hissés à leur vraie place et qui deviennent, en effet, des références des jeunes africains d’aujourd’hui qui ne retiennent de ce passé lointain que deux ou trois de ces figures»
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