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Jean Ping en tournée : Dissonances et stratégie
Publié le samedi 4 mars 2017  |  Gabon Review
Conférence
© AFP par STEVE JORDAN
Conférence de presse du leader de l`opposition gabonaise Jean Ping
Libreville le 2 Septembre 2016. Conférence de presse du leader de l`opposition gabonaise Jean Ping à sa résidence
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Face aux prises de position de certains de ses soutiens en faveur du dialogue national voulu par Ali Bongo, l’ancien candidat consensuel de l’opposition a perçu la nécessité de s’en remettre à sa base.

L’opposition est entrée en «résistance». En résistance contre la connivence institutionnelle et les forces rétrogrades. On l’a entendu moult fois. On le dit depuis la confirmation des résultats officiels de la présidentielle du 27 août dernier. Malgré les décisions de la Cour constitutionnelle, Jean Ping n’a eu de cesse de proclamer sa détermination à aller «jusqu’au bout», c’est-à-dire jusqu’à l’épuisement de toutes les voies et de toutes ses forces. En dépit des volte-face de certains de ses soutiens, il l’a continuellement rappelé : il se considère et se considérera toujours comme le «président élu». Pour lui, la question n’est pas de savoir s’il bénéficie de l’effectivité du pouvoir. Elle est plutôt de réfléchir aux voies et moyens de «récupérer sa victoire». Pour l’heure, il est en tournée dans l’arrière-pays.

Marge étroite, chemin escarpé

En réalité, Jean Ping a une conviction : «le coup d’État militaro-électoral a privé notre pays d’une alternance pacifique et contraint le peuple gabonais à la résistance pour recouvrer sa souveraineté.» A cela, il entend opposer l’unité des forces sociales et plus largement de la population. Contre les arrangements d’arrière-boutique, il milite pour la libre adhésion. Face à une violence légitime invoquée à tout bout de champ, il veut opposer la détermination des corps intermédiaires. Devant la pusillanimité de l’administration, il croit en la dignité des populations. En butte à des dissonances internes, il bat le rappel des troupes. Mieux, il procède à une opération de comptage. N’empêche, des interrogations subsistent, nombreuses et légitimes. L’ancien candidat consensuel de l’opposition pourra-t-il sortir victorieux de la situation actuelle ? En a-t-il les moyens ? Quels ressorts compte-t-il utiliser ? Si l’unité des forces est un impératif, le maintien du lien avec sa base s’impose aussi. La crise politique actuelle convoque les fondamentaux institutionnels. Elle repose sur une singulière compréhension du jeu démocratique et des mécanismes de dévolution du pouvoir. Agir en rangs dispersés aurait fait le lit de la majorité. Fonder toute sa stratégie sur ses seuls soutiens aurait transformé le jeu politique en un combat de coqs

La stratégie de la Coalition pour la nouvelle république est-elle porteuse pour autant ? Est-elle à la hauteur des enjeux ? Est-elle efficace ? Efficiente ? Comme avant lui Paul Mba Abessole, Pierre Mamboundou et André Mba Obame, Jean Ping a continuellement appelé à la mobilisation et à la vigilance. A l’instar de ses devanciers, il prône l’engagement citoyen. A leur manière, il demande à chacun de prendre ses responsabilités. Il ne manque ni de volonté, ni de détermination. Mais, confronté aux doutes publiquement exprimés par certains de ses soutiens, il doit faire preuve de méthode et d’une inventivité à toute épreuve. Face aux liaisons incestueuses au sein de l’appareil d’Etat, sa marge de manœuvre semble bien étroite. Au regard des contingences de politique internationale, notamment au plan sous-régional et régional, son chemin paraît très escarpé. Sauf à privilégier les voies extra-juridiques ou à user de méthodes extra-constitutionnelles, aucune solution de facilité ne s’offre à lui. Ne risque-t-il pas de se transformer en marchand d’illusion ?

Danse du ventre et tango

Jean Ping doit assurément se surpasser. Il doit se battre sur plusieurs fronts. Il a, d’abord, le devoir de maintenir l’unité et la cohésion de la coalition formée autour de sa personne. Il a, ensuite, l’obligation de mettre la pression sur les institutions nationales. Il est, enfin, tenu de ne pas se couper de sa base électorale. Dans son combat, il bénéficie d’une inédite opportunité : les menaces de sanction proférées par le Parlement européen à l’encontre de certains de nos dirigeants. Mais, cette contingence extérieure ne saurait faire une stratégie. Une fois de plus, sa lecture des événements, son sens de l’organisation et sa capacité d’entraînement se trouvent interpellés. Si les menaces des eurodéputés sont potentiellement gênantes pour les dirigeants de nos institutions, il appartient à l’opposition de faire bouger les lignes. Il lui revient de créer du lien entre les forces et du liant entre les différentes couches de la population. Il est de sa responsabilité de transformer l’attitude des institutions nationales en avantage. Surtout, il est de son devoir de capitaliser le positionnement des députés européens. Récemment dépêchée à Bruxelles, une délégation de la Coalition pour la nouvelle république s’y essaie. On attend la suite…

Cette campagne de plaidoyer et lobbying vise à hâter la décision du Conseil européen. Au-delà, elle entend l’orienter dans un sens favorable à l’opposition. Mais, il serait puéril de tout en attendre. Jean Ping est entré en «résistance» pour défendre sa victoire supposée. Il ne doit faire preuve ni de cécité volontaire ni de surdité obstinée face aux événements de politique interne. Le dialogue national voulu par Ali Bongo doit, par conséquent, le préoccuper : loin d’être une simple vue de l’esprit, il est, volens nolens, en train de prendre corps (lire «Dialogue national : «Il se tiendra dans une semaine», selon Issoze Ngondet»). Du coup, un risque nouveau apparaît : l’éventualité de voir les résolutions de ce forum se traduire en dispositions législatives opposables à tous. Dès lors, l’opposition doit rechercher une parade. Avec froideur et lucidité, elle doit réfléchir aux voies et moyens d’insérer cet événement dans sa stratégie. Si Mélanie Engouang peut aisément traduire, tous les adeptes du judo comprendront…

L’inaction de Jean Ping face à l’imminence du dialogue voulu par Ali Bongo peut-elle être une garantie de survie voire de victoire ? Là réside la motivation profonde de son actuel périple dans l’arrière-pays. A quelques jours de l’ouverture de la grand-messe dirigée par Emmanuel Issoze Ngondet, certains de ses soutiens font la danse du ventre (lire «Mike Jocktane : «Aller au dialogue et être avec Ali Bongo, ce n’est pas la même chose !»»). D’autres préfèrent le tango (lire «Dialogue politique : Me Mayila partant, mais…»). Il s’en trouve même pour franchir le Rubicon (lire «Dialogue national : Eyogo Edzang partant !»). Manifestement, leur attitude tient à une absence de perspective (lire «Après le dialogue de Jean Ping : René Ndemezo’o attend la suite»). Or, ces postures individuelles vont à l’encontre du dessein collectif. Si elles permettent à certains de s’imaginer un avenir radieux, elles ne facilitent nullement le développement d’une stratégie de groupe. On le voit : pour la Coalition pour la nouvelle république, le recours à la base n’est pas une coquetterie. C’est une nécessité voire une exigence stratégique.
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