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Jean François Ndongou, un flic sur le mirador des médias
Publié le mercredi 12 mars 2014   |  Gabon Review


Jean
© Autre presse par DR
Jean François Ndongou, ministre de l’Intérieur de la Sécurité Publique, de l’Immigration et de la Décentralisation


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La nomination de Jean François Ndongou à la présidence du Conseil national de la communication, réveille des souvenirs, amène à certaines remarques et fait craindre pour la liberté d’expression. Quatre remarques sur l’ex-1er flic du Gabon envoyé à la régulation des médias.

Jean François Ndongou, 1er flic du Gabon durant les quatre dernières années et donc depuis l’arrivée au pouvoir d’Ali Bongo, a été porté à la présidence du Conseil national de la communication (CNC). Si ce n’est pas un message inquiétant qu’on envoie aux hommes des médias, ça y ressemble fort. La nomination de l’ex-ministre de l’Intérieur à la tête du CNC renforce en tout cas le sentiment que le pouvoir poursuit la mise en place d’un dispositif sécuritaire pour 2016, année de la prochaine élection présidentielle.

De 1er flic du Gabon à régulateur des madias

On n’a pas oublié, en effet, que ce «Monsieur sécurité» qui avait opportunément cumulé, en 2009, les fonctions de ministre de l’Intérieur et de ministre de la Défense nationale, est l’homme de la dissolution de l’Union nationale et celui des émeutes de Port-Gentil, eussent-ils fait trois morts ainsi qu’il en est officiellement. Toute la puissance de feu et tout le dispositif répressif du pays était, en 2009, entre ses mains et tout le monde avait alors pu juger de son sens de la mesure et du scrupule. Son surprenant parachutage au CNC fait penser à un message de fermeté, sinon de brutalité, envoyé aux hommes des médias.

«Il faut faire attention parce que cet homme semble être quelqu’un de très maladroit, parce que les deux plus grosses épines qu’il y a dans les pieds de l’émergence gabonaise, en termes de libertés publiques, sont la répression des émeutes de Port-Gentil avec ses morts, son couvre-feu long et sévère et la dissolution de l’Union nationale. Remis en orbite à un poste où la tentation de sanctionner est grande, ne va-t-il pas commettre, encore là, d’autres impairs, d’autres bévues ? Les Ezombolo et autres Echos du Nord pourraient écoper de la fermeture définitive et que sait-on encore», pense un ancien journaliste à la retraite.

Géopolitique rétrograde

Mais la nomination de Jean François Ndongou étonne également en ceci qu’elle jette en pleine figure la permanence de la géopolitique inféconde consistant en la confiscation des postes par certains groupes ethniques ou certaines localités. On croyait qu’elle n’était plus de saison avec l’arrivée de l’émergence qui brandit l’étendard de la modernité et du partage, mais il n’en est rien : la pernicieuse pratique est plus vivace que jamais. Ici, un Eshira (Gishir pour les intellectuels) de Mandji dans le Ndoulou, remplace un Gishir de Fougamou, donc du département voisin de Tsamba-Magotsi. Plus déplorable, les deux personnalités dansent la valse des chaises musicales et se remplacent mutuellement au ministère de l’Intérieur et au CNC.

Nomination hors-jeu

D’ailleurs, l’allusion à Guy Bertrand Mapangou, son prédécesseur à la tête de l’instance de régulation des médias, amène à se demander par qui Ndongou a-t-il été nommé ? La règle voulant que soit précisé qui du président de la République, de celui du Sénat ou de l’Assemblée nationale a nommé Jean François Ndongou. Le détail est d’autant plus important que la nomination de Guy Bertrand Mapangou à ce poste ait, par le passé, occasionné une vive controverse ; Mapangou qui avait alors été désigné par le président de l’Assemblée nationale s’est retrouvé président de l’institution alors que celui à qui doit échoir ce poste est choisi parmi les trois personnes désignées par le président de la République. Le procès en amateurisme fait alors par l’opposition avait débouché sur la confection d’actes juridiques a postériori taxés par tout le monde de faux. Qui donc a désigné Jean François Ndongou comme Conseiller membre du CNC avant de le porter à la tête de l’institution ? Le communiqué final du conseil des ministres du 10 mars 2014 ne le spécifie pas.

Au-delà, ce chassé-croisé Mapangou/Ndongou sonne comme une atteinte à l’indépendance qui devrait être celle du CNC. Il met en évidence et formalise d’une certaine manière des passerelles entre l’institution et le gouvernement, ainsi que le fait remarquer un ancien ministre : «On peut donc si facilement, si aisément passer du CNC au gouvernement et inversement ? La question de la neutralité du CNC est complètement remise en cause avec ce à quoi on assiste». De même, le prestige de l’institution se trouve fortement entaché par cette nomination qui ressemble beaucoup plus à une compensation. Pour le respect des institutions, le CNC ne saurait être considéré comme un lot de consolation pour ministre dont on ne veut plus ou pour ministre en fin de carrière.

Député PDG jusqu’au bout

Car, qui donc peut soutenir que le choix de Jean François Ndongou tient de certaines qualités ou aptitudes en adéquation avec ce poste ? L’homme ne saurait être présenté comme un administratif. Sa seule expérience administrative connue remonte à un passé lointain lorsqu’il était directeur, même pas directeur général, dans une administration au demeurant très spécifique et technique : le Budget. Le reste de sa carrière n’ayant été que politique, c’est incontestablement un politique qui arrive à la tête du CNC, une institution qui n’a pas vocation à être politique.

L’ancrage politique de Ndongou est d’autant plus affirmé que le 10 mars, jour même de sa nomination, il siégeait à l’Assemblée nationale comme député du parti au pouvoir lors de la déclaration de politique générale de Daniel Ona Ondo, le nouveau Premier ministre. A ce sujet, chacun et tout le monde devine aisément qu’il va devoir démissionner de son mandat de député et qu’une élection partielle va être organisée pour son remplacement. «Le jour même où il a été nommé, il était encore député. Et même si on le fait démissionner qui pourra-t-on convaincre de ce qu’il n’est pas un militant du PDG ?», s’interroge le directeur de publication d’un hebdomadaire gabonais se voulant indépendant. Sur la même lancée, et dans le même ordre d’idée, Jean François Ndongou devrait démissionner de toutes les instances du PDG, y compris de ce parti politique, ne fut-ce que de manière formelle. Si d’aucuns diront que ses prédécesseurs au CNC ne l’avaient pas fait, on devrait en convenir : la démissionne Ndongou du PDG, soit-elle de simulation, restituera au CNC un peu de ses oripeaux de neutralité.

Une chose est sûre : la nomination de Jean François Ndongou au CNC n’est pas du tout un message rassurant pour les hommes de presse. Ses actes de par le passé et le zèle dont il a fait preuve à bien de moments de la vie politique du Gabon, n’augurent pas d’un élargissement des espaces de liberté ou de la liberté d’expression tout simplement. Loin s’en faut. «Est-ce donc ainsi que l’on compte aborder 2016 avec des zélés aux postes clés», s’interroge le directeur de publication ci-dessus cité. Puisse l’avenir démentir toutes les appréhensions notées.

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