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Les Travaux pratiques de Moundounga sur la réforme de la Justice
Publié le lundi 14 decembre 2015   |  Gabon Review


Séraphin
© Autre presse par DR
Séraphin Moundounga, ministre de la Justice, garde des Sceaux


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Face au tumulte né des réformes visant la réorganisation générale de la justice au Gabon, Séraphin Moundounga, 2e vice-Premier ministre, ministre de la Justice et des Droits humains, Garde des Sceaux, s’est tout récemment adonné à un véritable cours de Travaux pratiques (TP). Tribunaux spéciaux, crimes dits rituels, article 425… le condensé du «Plateau spécial» de Gabon Télévision sur la réforme controversée de la Justice.

Tout part de la journée du 11 août 2015 lors de laquelle le gouvernement avait adopté trois projets d’ordonnance en Conseil des ministres concernant l’organisation et le fonctionnement de la justice, le Code pénal et le Code de procédure pénale. La loi n°7/94 était abrogée et de nouvelles juridictions, précisément un tribunal du commerce, un tribunal du travail, un tribunal spécial et une Cour d’appel spéciale chargée de réprimer la délinquance financière et économique, les grands trafics, les crimes de sang aggravés avec prélèvement d’organes et autres mutilations, etc., avaient été créés. Il s’agissait dans l’entendement du gouvernement de mener une réorganisation générale de la justice au Gabon.

La promulgation de cette réforme a soulevé un tollé au point que le bâtonnier de l’ordre des avocats a saisi la Cour Constitutionnelle qui, en dernier recours, a tout annulé. Les décisions qui en découlaient ont donc été frappées de nullité. De communiqué en communiqué, le ministre en charge de la Justice et des Droits humains est finalement passé à la télévision pour expliciter ces réformes qui ne passent pas, pour le moment, au sein de la communauté nationale. Sous la thématique «Comment moderniser la justice au Gabon ?», l’émission de Gabon Télévision a donné l’opportunité au 2è vice-Premier ministre, ministre de la Justice et des Droits humains de souligner que ces reformes arrivaient d’ailleurs en retard. Un retard que Séraphin Moundounga explique par les nombreux déménagements, ces dernières années, du Conseil d’Etat qui avait pour mission d’en examiner les lois organiques avant leur promulgation. «Nous sommes en retard par rapport aux engagements pris, par rapport aux initiatives envoyées au Conseil d’Etat du fait qu’il déménage de bâtiment en bâtiment ces dernières années», a déclaré le ministre de la Justice, battant ainsi en brèche le reproche fait au gouvernement d’être passé «pieds joints» dans la réforme sans en respecter la procédure idoine. Le ministre de la Justice estime donc que ces déménagements ont impacté sur la célérité dans l’exercice du contrôle juridique que devait effectuer le Conseil d’Etat. Ces ordonnances, a-t-il expliqué, ont cependant été envoyées au Parlement (Assemblée nationale et Sénat) conformément à la Constitution, pour examen.

Se prononçant sur la réaction du bâtonnier de l’ordre des avocats, Séraphin Moundounga souligne que c’est la «preuve de la vitalité de la démocratie gabonaise». Au-delà, il rappelle avoir adressé une correspondance à Jean-Pierre Akumbu m’Oluna, le président du bureau du conseil de l’Ordre des avocats, afin qu’il désigne trois représentants de ce groupe devant participer aux travaux des commissions chargées de relire le Code de procédure pénale et le Code pénal. «Il a désigné des avocats qui ne se sont jamais pointés et les magistrats ont travaillé seuls. Les OPJ ont également participé aux travaux», a précisé le 2e Vice-Premier ministre qui justifie la pertinence pour le Barreau des projets d’ordonnances querellés : «ils savent que ces deux projets d’ordonnance sont des textes qui peuvent réellement mieux faire avancer la justice gabonaise, permettre un meilleur fonctionnement et des avancées démocratiques très importantes à travers le renforcement du contradictoire, du droit de la défense et donc de la place et du rôle des avocats lors des différents procès».

«Vous vous rendrez compte que ce sont deux ou trois textes qui sont attaqués. Ce qui veut dire qu’ils sont d’accord avec l’essentiel», a indiqué le ministre de la Justice et des Droits humains. Séraphin Moundounga explique également que ce dénoncent les avocats est l’inverse de ce que comporte les textes en gestation. Et d’aborder, pour exemple, le point sur les crimes dit rituels que la loi qualifie d’homicide volontaire aggravé avec prélèvement d’organes. «C’est un phénomène nouveau pour notre pays», a martelé le ministre. Pour lui, la promulgation de cette loi visait notamment à «distinguer dans le Code pénal gabonais les infractions artificielles des infractions naturelles» ; des infractions naturelles, a-t-il expliqué, qui transcendent les sociétés. Séraphin Moundounga précise que ces infractions entrainent toujours la réprobation et l’indignation générale de la société. «Nous avons décidé de sanctionner au maximum les cas de ces crimes crapuleux, de ces crimes barbares d’un autre âge : La peine est la perpétuité», a confié le ministre de la Justice justifiant les décisions prises à ce propos : «nous avons pensé qu’au lieu que ces crimes ne soient prescriptibles que pendant 20 ans, qu’ils soient imprescriptibles de telle sorte que si on découvre, à tout moment, que tel a été l’auteur, tel a été le complice, tels autres ont été les commanditaires et les destinataires des organes humains prélevés, les poursuites soient exerçables aussi longtemps que ces personnes seront vivantes».

Le Garde des Sceaux a soutenu que cela permettra au Code pénal de jouer son rôle premier ; celui de la dissuasion, non sans rappeler qu’il ne s’agit nullement de «reculade» et encore moins de «durcissement sans discernement». Face à des crimes d’un type nouveau, a-t-il mentionné en exemple, certains pays sont revenus sur les conventions internationales abolissant la peine de capitale. Il reste qu’au Gabon, «nous, nous ne sommes pas revenus sur la peine capitale… le devoir du gouvernement est de faire en sorte que les lois soient en phase avec la demande générale».

Les tribunaux spéciaux

Au sujet des tribunaux spéciaux projetés par la réforme controversée, les antagonistes ont évoqué des confusions et mélanges de genre, notamment en ce qui concerne le Tribunal spécial chargé de réprimer les crimes économiques et son rôle par rapport à la Cour des Comptes. Et le ministre de la Justice de retourner : «On fait de la confusion. Je dois préciser que la Cour des Comptes fait de la vérification de la comptabilité publique et sur la bonne utilisation des deniers publics. Cela, indépendamment de son travail de Conseil financier et de comptable du gouvernement».

Le 2e Vice-Premier ministre en charge de la Justice explique que lorsqu’il y a détournement de deniers publics, la Cour des comptes ne peut décider que de la mise en débet. «Elle n’a pas compétence à regarder des questions liées à la délinquance financière privée et ne peut pas engager des procédures pénales. Il n’y a que le tribunal judiciaire, il n’y a donc que les juridictions de l’ordre judiciaire qui peuvent connaître les différentes dénonciations concernant les détournements des deniers publics et décider de la sanction pénale applicable», a indiqué M. Moundounga. Et d’expliquer que, dans le cadre pénal, le Tribunal spécial contre les crimes économiques vient remplacer la Cour criminelle spéciale créé par une loi en 1998. «Elle avait l’inconvénient ne pas avoir un caractère permanent avec des juges dédiés. Ce sont des membres de la Cour d’appel de Libreville qui se réunissaient en session spéciale pour connaitre des cas de détournements des deniers publics», a-t-il expliqué. La création des tribunaux spéciaux aujourd’hui controversée répond ainsi à l’ambition d’aboutir à une meilleure efficacité, une gestion plus transparente des deniers publics afin ceux-ci aillent à leur destination, pour l’intérêt du peuple gabonais aspirant à l’eau, à la route, à l’école, à la santé, à l’électricité, entre autres. «Ces tribunaux spéciaux vont avoir un caractère permanent, une compétence nationale parce que les questions liées à la grande criminalité, aux grands trafics et même aux détournements des deniers publics sont des questions généralement tentaculaires, qui vont même au-delà des frontières. Et c’est pour cela qu’on parle de criminalité transfrontalière organisée», a argumenté le ministre de la Justice, ajoutant que «cette décision est conforme aux décisions prises lors du Conseil supérieur de la magistrature en 2014».

Se prononçant sur le fonctionnement de ces cours spéciales, Séraphin Moundounga estime que c’est sans doute la peur de l’inconnu qui suscite les interrogations et appréhensions enregistrées. Dans ce contexte, il espère que petit à petit, on se rendra compte que «c’est pour mieux protéger les personnes et les biens en République gabonaise que ces réformes ont été initiées sur instruction du président de la République, Ali Bongo Ondimba».

Quoi qu’il en soit, le ministre de la Justice a indiqué que le gouvernement tient compte de l’annulation prononcée par la Cour constitutionnelle et s’active à résoudre les imperfections relatives à leur création. Et conformément à l’article 42 de la loi organique, il dispose de 30 jours pour remédier à la situation.

Amené à aborder le très controversé article 425, le 2e vice-Premier ministre, ministre de la Justice et des Droits humains dénonce le fait que cette affaire, encore en examen, dans les juridictions ait été portée au grand jour. Autrement dit, le respect du secret de l’instruction, voulu par la loi, n’a pas été respecté.

En venant au sujet, Séraphin Moundounga explique que «l’article 425 concerne la réprobation de la contestation d’une filiation lorsque cette contestation est faite de mauvaise foi». Le Garde des Sceaux souligne que cet article ne dit pas qu’il est interdit de contester la filiation de quelqu’un. L’«article dit que pour contester la filiation de quelqu’un, il faut avoir un intérêt, il faut avoir droit, il faut avoir qualité, etc., pour agir», a fait réexpliqué le ministre de la Justice, relevant que la filiation est une affaire qui relève et concerne avant tout la famille. Ce, a-t-il déclaré, d’autant plus que la famille est la cellule de base de toute société. «Dans toutes les législations du monde, la famille est particulièrement protégée», a-t- il dit prenant en exemple le cas de la France où le Code civil prévoie cinq types de personnes capables de contester une filiation : le père, la mère, l’enfant, l’héritier ou la personne qui se prétend être le père. «En dehors de ces cinq personnes, d’autres ne sont pas recevables devant les juridictions françaises pour déposer une contestation», a-t-il expliqué.

Pour le ministre de la Justice, « l’article 425 n’invente rien au regard de la législation gabonaise parce que le Code civile gabonais indique clairement, dans les dispositions concernant les questions de filiation ou les questions concernant la possession d’état, qu’il faut avoir un intérêt pour agir, pour contester une filiation ». «C’est précisé dans le article 396 à 413 du Code civil gabonais», a souligné le ministre, relevant que les membres du Barreau le savent et l’ont parmi leurs outils de travail. Le vice-Premier ministre dénonce par ailleurs le fait que la contestation du barreau ne reconnait pas à cet article un caractère impersonnel. Or, a-t-il fait savoir, sa portée est d’intérêt général. Levant le voile sur le rapport fait entre cet article et l’affaire de la filiation du président de la République et sur la personne du chef de l’Etat, Séraphin Moundounga laisse entendre qu’«un code pénal ne règle pas les problèmes des élections. Le Contentieux électoral n’a pas pour point d’appui un Code pénal». Et d’ajouter que «le contentieux électoral se fait devant les juridictions compétentes en matière de contentieux électoral et le moment venu, la contestation de l’éligibilité ou de l’inéligibilité de tel ou de tel candidat à l’élection présidentielle, à l’élection de député doit être exprimé en tenant compte des textes régissant le système électoral gabonais».

Au demeurant, le ministre de la Justice trouve qu’il s’agit d’un «faux débat» faisant suite au livre de Pierre Péan. Il estime que les adversaires d’Ali Bongo n’ayant pas d’arguments politiques brandissent un problème de filiation pour s’opposer à lui. Pour le ministre, le barreau est allé un peu vite en besogne en évoquant des questions électorales dans un contexte de législation pénale. Se défendant de jouer la carte du parti politique auquel il appartient, Séraphin Moundounga a insisté sur le fait qu’il agit en tant que ministre de la République, un ministre qui constate simplement que des adversaires politiques attaquent un dirigeant sur le terrain privé et personnel au lieu de le faire sur le terrain des actions politiques et des engagements qu’il a pris pour le peuple gabonais. «Ils déplacent le débat faute d’argument, faute de discours alternatif», a martelé me ministre de la Justice.

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