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BAD pour Banque africaine de développement, ou BAD pour mauvais (en anglais) ?
Publié le mardi 22 septembre 2015   |  Gabon Review




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Alors qu’elle a récemment publié une étude sur la question du genre en Afrique, la Banque africaine de développement (BAD) ne pratique pas toujours ce qu’elle prêche. Telle est la conclusion de l’observation et de longues conversations avec l’un de ses fonctionnaires au Gabon.

L’argent corrompt les mœurs. C’est un fait. Et si pendant longtemps, cela semblait une simple légende urbaine, c’est désormais prouvé scientifiquement. En effet, une récente étude relayée par le New York Times en juin 2013 menée conjointement par des chercheurs en comportement de l’Université de Harvard et de l’Université de l’Utah suggère que penser à l’argent a un impact sur la manière dont les hommes se comportent : ils ont tendance à être moins moraux. En effet, selon ces scientifiques, l’argent engendre la méfiance et encourage à mentir, trahir ou encore à tricher.

Tout commence par une conduite choquante et la publication d’un rapport sur les inégalités de genre en Afrique réalisée par la Banque africaine de développement (BAD) fin mai dernier. Pendant plusieurs semaines, nous avons infiltré le quotidien d’un expert du bureau de la BAD au Gabon. Avec pour slogan «la Banque africaine de développement, 50 ans au service de l’Afrique», l’institution financière multinationale a révélé une image grossière au travers du caractère remarquablement amoral de son personnel.

Pourtant, en 2011, le siège à Abidjan recrutait un Chargé de l’éthique et de la conformité ; un chef qui serait autonome et travaillerait en toute indépendance vis-à-vis de tout responsable, département, bureau et autre unité de la Banque. Ce genre de décisions n’est pas pris au hasard. Elles partent généralement d’un constat en interne. En d’autres termes, ça n’allait pas : l’argent de la BAD était perturbant. Ce chargé de l’éthique doit veiller au respect de l’obligation de rendre compte, de l’éthique et de la responsabilité de chaque employé. Les bureaux délocalisés de la multinationale sont-ils cependant concernés par ce contrôle ? La suite permet d’en douter. Beaucoup de structures préfèrent étouffer les dysfonctionnements au risque d’entacher leur image de marque plutôt que de faire preuve de transparence en prouvant publiquement leur soi-disant crédibilité.

En dehors du cadre professionnel, l’expert suivi a agi avec une énergie donnant à croire à de la duperie et une malveillance hors du commun. Ce qui est en totale contradiction avec l’effort de développement en faveur des pays africains. La mission que s’est assignée la BAD est de contribuer au développement et au progrès social des Etats africains et va de pair avec la promotion des sentiments de compassion, de solidarité et de responsabilité.

C’est sans doute la raison pour laquelle un classement «inédit» et diffusé par la BAD sur les inégalités de genre sur le continent, s’est penché sur la place des femmes dans l’économie, leur accès à la terre, ou encore sur les questions de santé ou d’éducation ; un indice de l’égalité, un outil comparant les différences de traitement entre hommes et femmes dans 52 des 54 pays du continent. Il sert à mesurer les disparités, mais également à promouvoir le développement. En tête du classement, on retrouve l’Afrique du Sud, le Rwanda ou encore la Namibie. En queue de peloton, des pays comme la Somalie, le Mali, la Guinée, la Mauritanie, le Niger, le Tchad et la Côte d’Ivoire ferment la marche. Le rapport ne fait étrangement pas référence à la situation des femmes en entreprise.

Quelles leçons la BAD ose-t-elle donc donner aux gouvernements quand l’un de ses experts relate de façon détournée les méandres normalisés de son quotidien au bureau national où il est employé ? Monsieur Tout-le-monde est-il habilité à juger Monsieur Tout-le-monde, uniquement parce qu’il a la charge de gérer des fonds qui ne lui appartiennent pas ? Cela induit un changement de dénomination et de vocation. Des déclarations et des opinions tonitruantes faisant l’apologie du sexisme en milieu professionnel démontrent la contradiction profonde de la BAD avec elle-même. On comprend mieux désormais ce mystère qui entoure la plupart des grandes instances ; car là où s’activent les hommes, il n’y a pas d’idéal mais le grand public ignorait que c’était à ce point. Les «Politiques» de communication sont parfois des lames à double tranchant.

Le combat contre la pauvreté et l’amélioration des conditions de vie des populations sur le continent africain ne peut se faire ni en encourageant la prostitution des populations les plus vulnérables, ni par la promotion des idées qui justifient que la femme doit «passer à la casserole», autrement dit, entretenir des rapports sexuels avec son employeur pour avoir un emploi, ou pour obtenir une promotion et autres avantages matériels. Le citoyen lambda peut se tromper dans de tels raisonnements mais pas un acteur du développement au service d’un organisme international qui va jusqu’à approuver que les femmes au physique avantageux doivent être favorisées dans le milieu du travail, au mépris de la lutte contre les discriminations. L’expert s’est perdu dans des balourdises ouvertes cautionnant même l’exploitation sexuelle de jeunes adolescentes. Quand on sait que le Lycée National Léon Mba au bord de mer est situé à deux pas du quartier Kalikack où se trouve le bureau local, cele donne des sueurs froides… Le pire dans ce portrait, c’est la relation inamicale et agressive que l’intéressé entretiendrait avec les femmes qui réussissent professionnellement, ce que la BAD prétend encourager avec son fameux rapport. Le sexe comme critère de recrutement ou le sexe comme outil de pérennisation de l’emploi n’a pas été mentionné dans cette étude, peut-être parce qu’il est officieusement admis comme élément de compétitivité anormalement subjectif masquant une forme de misogynie.

Réagissant à la publication de cette étude en juin dernier, Constance Yaï, ex-ministre de la Promotion de la Femme en Côte d’Ivoire et ex-Directrice générale de l’Agence ivoirienne de coopération francophone (AICF) félicitait le travail de la Banque tout en pointant du doigt la part de responsabilité des femmes elles-mêmes : «Au Congo, au Bénin ou autre, les revendications des femmes sont portées par les partis politiques. En Côte d’Ivoire, il y a une certaine folklorisation des femmes dans la société. A la télé, à la radio, les droits des femmes sont tournés en dérision de façon générale. Les femmes elles-mêmes, peut-être, aussi, ne se prennent pas suffisamment au sérieux. Cela conditionne l’état d’esprit du public.»

À quand donc un rapport sur la place des femmes à la BAD ? Avec des témoignages inaltérés recueillis sans pression ni intimidation car il est connu que beaucoup d’argent est en jeu, sauf si elles estiment de leur propre chef qu’elles méritent cette maltraitance ou alors la «Banque Africaine de DEVELOPPEMENT» n’est qu’un slogan ?

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