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Un tribunal spécial pour Sidonie Ouwé
Publié le mardi 1 septembre 2015   |  Gabon Review


Sidonie
© Autre presse par DR
Sidonie Flore Ouwé, procureur de la République du Gabon


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Le dispositif anti-délinquance financière se renforce : après la Cour des Comptes que préside Gilbert Ngoulakia depuis 1991, après l’Agence nationale d’Investigations financières (ANIF) que dirige Patrick Assélé Ondjiani depuis près de quatre ans, et après la Commission nationale de Lutte contre l’Enrichissement illicite (CNLCEI) que dirige Alexandre Odounga Awassi depuis 2013, le Conseil supérieur de la Magistrature vient de créer, lors de sa dernière session, le Tribunal Spécial de Lutte contre la délinquance financière et économique !



Le dispositif anti-délinquance financière se renforce : après la Cour des Comptes que préside Gilbert Ngoulakia depuis 1991, après l’Agence nationale d’Investigations financières (ANIF) que dirige Patrick Assélé Ondjiani depuis près de quatre ans, et après la Commission nationale de Lutte contre l’Enrichissement illicite (CNLCEI) que dirige Alexandre Odounga Awassi depuis 2013, le Conseil supérieur de la Magistrature vient de créer, lors de sa dernière session, le Tribunal Spécial de Lutte contre la délinquance financière et économique !

«Il est vrai que pour interpeller, arrêter et incarcérer tous les détourneurs de deniers publics que compte le Gabon, il en faut, des institutions !», ironise un haut magistrat en service au Conseil d’Etat. On peut être servi de la création d’une telle avalanche d’institutions chargées de traquer et de mettre hors d’état de nuire les délinquants en col blanc, ces auteurs de crimes économiques et financiers qui font si mal au pays ; une criminalité au sujet de laquelle l’ex-président de la CNLCEI (2008-2013), Vincent Lebondo-Le Mali, avait révélé, en 2011, que la corruption, les détournements de fonds publics, l’enrichissement illicite coûtaient, au bas mot, 500 milliards de francs CFA chaque année aux caisses de l’Etat ! Fallait-il en rajouter ou simplement «améliorer l’existant» ? En tout cas, le dernier Conseil supérieur de la Magistrature, présidé par Ali Bongo le 24 août dernier, a désigné Sidonie-Flore Ouwé comme Procureur de la République auprès de cette instance.

Sidonie-Flore Ouwé Itsiembou Koumba, Procureur auprès de ce Tribunal Spécial

Si l’on en croit donc le communiqué final de la dernière réunion du Conseil supérieur de la Magistrature, c’est Steeve Ndong Essame Ndong, jeune magistrat de 34 ans, qui est le nouveau Procureur de la République au Tribunal de Première Instance de Libreville. Il remplace Sidonie-Flore Ouwé, qui va dorénavant servir dans le nouveau Tribunal sus-cité. L’on en est à se demander si cette nomination est une promotion pour la «Dame de Fer» de la magistrature gabonaise, ou une réduction de ses pouvoirs. D’une manière générale, dans l’opinion, on croit savoir que son «portefeuille d’interventions» est fortement réduit, car il ne va se concentrer que sur les crimes économiques et financiers, alors qu’auparavant, son portefeuille était tout de même beaucoup plus large.

Parce que Sidonie-Flore Ouwé, 44 ans, a mené tous les combats. Contre les hommes politiques d’abord. Elle avait, par exemple, signé l’interdiction de sortie du territoire d’André Mba Obame en 2011 après son départ du siège du PNUD au moment où celui-ci voulait aller se soigner en Afrique du Sud d’une hernie discale. Depuis les années Emergence, elle a interdit de sortie du territoire les adversaires du pouvoir, notamment les anciens Premiers ministres Jean Eyéghé Ndong et Casimir Oyé Mba, Jean Ping, l’ancien chef de la diplomatie gabonaise et ancien président de la Commission de l’Union africaine, l’opposant Pierre-André Kombila et les responsables de la société civile Annie-Léa Méyé et Marcel Libama. Elle a également fait convoquer Paulette Missambo poursuivie sur la question relative au forage des puits dans le département de Mulundu qui devait être réalisé lors des fêtes tournantes de l’Indépendance. Ensuite, lorsque, comme Jean Ping, en janvier dernier, était l’objet d’une agression, l’ancien porte-parole du mouvement étudiant dans les années 90 considérait que c’est l’opposant qui était fautif parce que l’ancien vice-Premier ministre avait, selon elle, «usé d’agressions volontaires et de séquestration» sur une quinzaine d’individus. Avec elle, la légitime défense n’existe pas.

Contre les étudiants enfin. Les condamnations et humiliations d’étudiants font également partie du menu de ses actions au Tribunal de Libreville. Plus que son prédécesseur Jean-Bosco Alaba Fall, Sidonie-Flore Ouwé aura été, pour un grand nombre d’observateurs, un véritable «père fouettard», «le procureur de la répression», «le symbole de la partialité de la justice gabonaise». Son départ du Parquet de Libreville a dû faire plaisir à plus d’un, et notamment d’abord parmi les membres de sa corporation qui la jugeaient un tantinet condescendante… Jeudi et vendredi derniers encore, dans certains bureaux du Tribunal de Libreville, et notamment au Parquet, beaucoup de ses collègues parlaient de cette éviction avec une joie non dissimulée. A sa décharge, certains observateurs reconnaissent le rôle qu’elle a joué dans la sensibilisation des éléments de la Police judiciaire et des commissariats pour le respect des droits des personnes interpellées et/ou gardées à vue. Elle s’est battue contre les actes de torture dans les services de Police et de Gendarmerie. Et, il faut le reconnaître, c’est un bourreau de travail, une femme qui suit ses dossiers…

Sa présence quasi-hebdomadaire dans les journaux de 20-heures va lui manquer

C’est donc dans le nouveau Tribunal spécial de Lutte contre la délinquance financière et économique que cette magistrate originaire de la Ngounié va aller démontrer l’étendue de son expertise dans le domaine judiciaro-financier. Il va lui falloir définir ce qu’est un délinquant financier, ce qu’on nomme un délinquant économique. Quand bien même un grand nombre de ses amis et fréquentations pourraient être qualifiés de «délinquants financiers», «il va lui falloir, plus que par le passé, faire montre d’un peu moins de partialité pour sa propre crédibilité et pour donner à cette nouvelle structure une image d’impartialité, parce que, pour le moment, l’image qu’elle a donnée d’elle est celle d’une magistrate qui n’est là que pour défendre un bord politique quelles que soient les circonstances et quels que soient les dossiers», pense un ancien directeur général de l’Ecole nationale de Magistrature (ENM). En tout cas, ce qui semble le plus réjouir ses contempteurs, c’est que, espèrent-ils, Sidonie-Flore Ouwé va être contrainte à la discrétion, car même si ses nouvelles responsabilités lui donnent tout de même de la «visibilité», il n’en demeure pas moins vrai qu’elle sera moins exposée que dans le passé. On peut presque parier que sa présence au journal de 20-heures, presque toutes les semaines, va certainement manquer à cette femme qui adore la médiatisation, les feux de l’actualité, et qui est, à ce qu’il semble, narcissique.

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