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Corsafrique : les Orsoni, le Gabon et les douaniers
Publié le lundi 1 juin 2015   |  gabonlibre.com




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Il y a comme de la friture sur la ligne entre la Corse et l’Afrique depuis quelques temps. La faute aux écoutes peut-être, diligentées en France dans le cadre d’enquêtes judiciaires. Après la publication, la semaine dernière, par le site d’investigation Mediapart, de conversations privées entre l’homme d’affaires Michel Tomi et deux chefs d’État, le Malien Ibrahim Boubacar Keita et le Gabonais Ali Bongo Ondimba (publication qui n’est pas passé inaperçue à Bamako), c’est dans un prétoire que les liens interlopes entre l’île de Beauté et le continent sont mis à jour. À l’aide d’écoutes téléphoniques, encore.

Cela se passe dans une salle d’audience du tribunal d’Aix-en-Provence, dans le sud de la France. Il s’y tient, depuis le 11 mai, le procès dit "des Orsoni". Le père, Alain, une figure du nationalisme corse qui ne compte plus ses ennemis, est poursuivi pour menaces de mort. Le fils, Guy, pour deux assassinats commis en bande organisée en 2009 dans la région d’Ajaccio. À la barre, les deux hommes côtoient neuf autres prévenus. Mais ce sont eux qui attirent tous les regards.

De l’Afrique et de quelques coups de fil hauts en couleurs, il en fut question au bout d’une semaine d’audiences, au moment d’évoquer la cavale de près de deux ans de Guy. À la veille de son interpellation, en juin 2009, son père, Alain, reçoit un appel urgent du Gabon. C’est "Bati" : Jean-Baptiste Tomi, le fils de Michel Tomi. Le clan est alors tout-puissant à Libreville.

Orsoni, qui est sur écoutes, le rappelle aussitôt. À l’autre bout du fil, la voix lui dit, en corse : "'Dis-moi, demain on fait une fête chez toi, il y a ton fils dedans, tout le monde, tous ceux qui sont avec ton fils. Ils m’ont appelé maintenant pour me dire cette affaire, alors je te préviens. '" L’avertissement n’est pas difficile à déchiffrer. Le lendemain, quand les policiers débarquent dans la maison des Orsoni, à Vero, en Corse du Sud, Guy a disparu. Il sera arrêté 22 mois plus tard en Espagne, où le clan compte de fidèles amis.

Comment "Bati" (qui a été condamné, en novembre 2012, à 100 000 euros d’amende pour recel de violation du secret de l’instruction) a-t-il été mis au courant ? Selon l’accusation, sa source n’est autre que l’un des fils d’Omar Bongo, Frédéric. Une demi-heure avant sa conversation avec Orsoni, le fils Tomi a reçu un appel venant d’un numéro français attribué au fils Bongo. Officier de gendarmerie, proche des milieux du renseignement en France, ce dernier se trouve alors en stage dans la région parisienne. A-t-il été informé par une source judiciaire, policière, voire politique ? La taupe n’a jamais été identifiée.

Protégé par son immunité diplomatique, Frédéric Bongo n’a pas pu être entendu. À Libreville, celui qui dirige désormais les services de renseignements de la présidence gabonaise et qui fait figure de proche parmi les proches d’Ali Bongo récuse l’accusation, même s’il a bien appelé "Bati" ce jour-là.

Du Gabon, il en fut encore question à l’audience le 27 mai. Nouveau coup de fil, le 11 mars 2011. Guy Orsoni, en cavale en Espagne, s’est rendu dans un taxiphone pour discuter avec son père, de passage à Paris. Les enquêteurs n’en perdent pas une miette. Le dialogue est savoureux.

Alain : "Bon, y’a du bon et du moins bon. Le bon, c’est que j’ai longuement vu Tony. On est tombé d’accord sur plein de choses, vraiment à fond, bien et tout. Il m’a dit : 'Pourquoi tu t’emmerdes avec ton fils ? Pourquoi tu le fais pas descendre en bas ?'"

"En bas", c’est le Gabon, le royaume de Michel Tomi, qui a vu passer de nombreux fugitifs corses ces dernières années.

Guy : "Moi, s’ils veulent, je pars demain, hein !"

Alain : "Bon maintenant, Tony, il faut qu’il voie les autres, mais il m’a dit : 'Tu le mets à l’avion, en bas y’a même pas de douane, pas de police, rien, ils vont le chercher à l’aéroport, il rentre et puis là-bas, y’a personne qui l’'extradie' parce que s’il y a une demande d’extradition on est prévenu avant et le fait partir et tout ça.'"

Le père dit à son fils que de leurs amis lui remettra la somme de 10 000 euros le lendemain pour préparer sa fuite en Afrique. Mais c’est trop tard. Guy a été repéré - il est à Madrid. Il sera arrêté le 12 mars, avant qu’il ne puisse découvrir les douceurs de Libreville.

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