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Après les récentes révélations de la presse française : Devoir d’exemplarité et vivre ensemble
Publié le vendredi 3 avril 2015   |  Gabon Review




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Aucune république n’exonère le président de la République du respect des lois et procédures. Aucune n’accorde des privilèges aux membres de sa famille. Les derniers développements autour de la succession Omar Bongo Ondimba mettent en danger notre vivre ensemble. S’interdire d’y réfléchir, revient à œuvrer pour le «changement de gouvernement par des moyens extraconstitutionnels».

De jour en jour, les révélations s’enchaînent. Jour après jour, les scandales apparaissent. Tout et chaque jour, les affaires se déclenchent. Les révélations sur l’absence d’acte de naissance au nom d’Ali Bongo dans le dossier de la succession Omar Bongo Ondimba contribuent elles à taire le débat sur son état-civil (lire par ailleurs http://gabonreview.com/blog/etat-civil-dali-bongo-le-rebond/)? Les indiscrétions relatives à la place tentaculaire de Delta Synergie dans le paysage économique national militent elles pour un engagement des uns et des autres au service de la nation (lire par ailleurs http://gabonreview.com/blog/delta-synergie-anatomie-de-la-sangsue-financiere-des-bongo/) ? Les confidences sur l’utilisation, à des fins privées, d’un avion militaire par des membres de la famille Bongo participent elles à établir une relation de confiance ? La découverte d’informations faisant état d’onéreux voyages offerts à des copains et coquins par la présidence de la République au frais de la princesse sont-elles de nature à consolider l’esprit républicain (lire par ailleurs http://gabonreview.com/blog/immobilisation-du-boeing-777-a-orly-les-dessous-dune-affaire-detat/) ? Les dénonciations graveleuses sur la vie privée de personnalités politiques de premier plan peuvent-elles consolider l’autorité de la classe dirigeante ?

Faute d’une initiative forte et au train où vont les choses, les tenants du «changement de gouvernement par des moyens extraconstitutionnels», selon la formule de l’ambassadrice des Etats-Unis, peuvent devenir majoritaire dans l’opinion. Le pays court le risque de sortir de la logique démocratique et républicaine pour construire «la prochaine phase de (son) histoire» par d’autres voies. Comment redonner du sens à notre vivre ensemble ? Comment rendre de la crédibilité à nos institutions ? Comment restaurer le rêve d’un Gabon fondé sur l’union de ses fils, le travail de ses habitants et la justice pour chacun ? Contrairement à la vulgate dominante, la situation actuelle ne relève ni de la «sphère privée et familiale», ni de «manipulations politiques» ni d’«amalgames» encore moins de «xénophobie», de «haine» ou d’»absence de projet». Il s’agit, ni plus ni moins, du contrecoup des privilèges dont jouissent certains. Autrement dit, nous sommes en face d’une exigence d’exemplarité voire d’une opération de recherche de cette «vertu» dont Montesquieu fait le fondement de la république.

Privilèges, famille et situation personnelle

On ne peut convoquer le patriotisme, demander des sacrifices, exiger de l’abnégation quand on fait bombance avec sa parentèle. Les formalités administratives, la pression fiscale, la remise en cause acquis, le niveau des rémunérations et la prévoyance sociale sont toujours porteurs de débats houleux si ce n’est de rupture du lien social là où les dirigeants ne se privent de rien, là où ils s’affranchissent de toute règle, là où ils sont réputés corrompus ou tout au moins particulièrement bien traités. Naturellement, là où leurs familles se mêlent de tout, se permettent tout, jouissent de tout sans effort et sans devoir rendre compte, la république recule et la démocratie se dessèche, ouvrant la voie aux solutions extrêmes. Les peuples ont soupé de ces consignes unilatérales, à sens unique et exclusives.

Partant de ce principe, le président de la République doit prendre la mesure des enjeux actuels. Il est obligé d’interroger sa situation administrative. Il est tenu d’analyser le comportement des siens. Surtout, il a besoin d’examiner sa pratique politique. Cet examen de conscience ne saurait attendre plus longtemps. Aucune société, même les plus féodales et monarchiques, ne peut s’épargner une réflexion sur la représentativité de son principal dirigeant, y compris du point de vue de la vie privée. Toutes les républiques modernes s’accordent sur le devoir d’exemplarité. Toutes rejettent l’immixtion de la famille dans les affaires publiques. A des degrés divers, par des modes d’expression variés mais toujours dans le même objectif, les constitutions et autres chartes fixent des conditions d’éligibilité et/ou d’exercice des responsabilités publiques.

Partout, l’état-civil, la moralité et le rapport à la chose publique sont évoqués. Jamais, il n’est fait mention de la famille. En clair, nulle part au monde, le président de la République ne traite par-dessus la jambe son état-civil ou n’agit sans devoir rendre compte. Dans aucune république, sa famille ne bénéficie de privilèges et passe-droits reconnus. Seules les monarchies consacrent la notion de famille régnante, offrant à la parentèle du dirigeant des privilèges. Et même : dans certaines monarchies constitutionnelles, la famille du roi peut être sommée de rendre des comptes. Récemment encore, l’Espagne nous en a administré la preuve. Chacun se souvient des mésaventures du roi Juan Carlos. Tout le monde se remémore des déboires de l’infante Cristina. Personne n’a oublié les déconvenues de son époux, le duc Iñaki Urdangarín.

Initiative forte

Manifestement, le vivre ensemble est garanti par le respect des règles admises d’un commun accord et non par l’immunité des dirigeants ou de leurs familles. Or, les révélations dont l’opinion se délecte depuis quelques temps remettent en cause ce principe fondamental. Même si, le carriérisme des uns les conduira toujours à raviver le souvenir des outrances de certains ténors de l’opposition. Quand bien même, le conformisme des autres les conduira nécessairement à essayer d’en faire un contrepoids, une excuse à peu de frais pour Ali Bongo et sa parentèle. Bien qu’il y aura forcément des bigots pour se livrer à des interprétations spécieuses des textes et circonstances, rien n’occultera jamais la question de fond : les privilèges dont bénéficie la famille du président de la République sont-ils de nature à susciter l’adhésion du plus grand nombre aux mesures d’austérité préconisées ? Naturellement, la réponse est : «Non !»

En république, le président est d’abord un tribun de la plèbe. Il lui revient de défendre les intérêts du peuple, de protéger les faibles contre les abus des puissants, y compris lui-même. La loi du silence n’étant pas une loi de la République, Ali Bongo a tout à fait le droit de lancer une initiative forte pour faire éclore la vérité. Il est absolument fondé à tout mettre en œuvre pour restituer à chaque citoyen, y compris les membres de sa parentèle, ce qui lui revient de droit. Pour le prestige de sa fonction et pour le respect dû au peuple, il en a même le devoir. Dans les républiques, il n’y a rien d’avilissant à considérer que la justice place tous les citoyens sur un pied d’égalité. Il n’y a rien de déshonorant à la laisser faire son travail. Il n’y a rien d’infâmant à rendre des comptes au souverain. Bien au contraire… Continuer à se murer dans le mutisme ou à se servir de la fonction présidentielle comme d’un bouclier, c’est faire le lit des extrémismes en tout genre. C’est œuvrer pour la déconstruction du tissu social. Si cette lecture peut paraitre irrecevable aux yeux de certains, cela n’exonère pas pour autant le président de la République du respect des règles et du devoir d’exemplarité pas plus que cela ne confère à sa famille privilèges et impunité totale. Il faudra bien se le dire un jour…

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