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Gabon: le caricaturiste Pahé, un "emmerdeur" dans les bonnes grâces du palais
Publié le mercredi 25 fevrier 2015   |  AFP




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"Moi, c'est Pahé l'emmerdeur, le taquineur, qui met le grain de sable dans l'engrenage." C'est ainsi que se présente le caricaturiste Patrick Essono, dit "Pahé", qui n'a pas son pareil pour décrire d'un ton grinçant la politique au Gabon.

Auteur de bandes dessinées, caricaturiste, dessinateur de presse, à 44 ans, Pahé, qui aime égratigner sans épargner personne - pouvoir, opposition, comportements sociaux - est très populaire dans son pays.

Sur la couverture de son dernier opus, "5 ans déjà !!", apparaît un président Ali Bongo Ondimba bedonnant, affublé d'une minuscule - et ridicule - couronne dorée.

La mine renfrognée, il s'adresse à ses détracteurs: "Que ceux qui ne sont pas contents quittent mon royaume !"

Irrévérencieux, parfois grossier, mais tout de même courtisé par le pouvoir, puisque la BD a été préfacée par un certain... Ali Bongo Ondimba.

- 'La monarchie en République' -

"Je raconte les cinq ans du roi" depuis son élection à la présidentielle de 2009, lorsqu'il a succédé à son père Omar Bongo après sa mort, raconte Pahé.

"Le roi, c'est bien sûr Ali Bongo", s'amuse le dessinateur: "Après Bongo père on a eu le fils, c'est ça la monarchie en République gabonaise !"

Pourquoi Ali ? "Parce qu'Ali en couverture ça se vend bien !", répond sans vergogne l'intéressé qui, au fil de ses caricatures, dépeint les reproches adressés par les Gabonais à leur président, notamment ses goûts du faste et du luxe.

Pour ses fans, Pahé peut tout se permettre. "C'est vrai que c'est osé, parfois même un peu grossier mais c'est ce que tout le monde pense qu'il dessine !", assure Samida Nyangui, venue se faire dédicacer un exemplaire.

"Il a osé appeler le président +le roi+, et c'est devenu son surnom dans nos administrations, dans nos bureaux, on l'appelle comme ça maintenant !", s'amuse la jeune fonctionnaire de 27 ans.

"Il nous énerve, il nous pique et s'il vise juste il dérange", reconnaît, beau joueur, le chef de l'Etat dans la préface. "Bien que je ne partagerai pas toujours vos idées, ce droit inaliénable à la libre expression je le défendrai", écrit-il.

- Proposition présidentielle -

D'après les confidences de Pahé, c'est le président lui-même qui lui a proposé il y a plusieurs mois de préfacer son recueil, avant de le relancer peu de temps après l'attentat à Paris contre l'hebdomadaire satirique français Charlie Hebdo, au cours duquel 12 personnes - dont plusieurs caricaturistes célèbres - ont été tuées.

"C'est un coup de com', pour moi et pour Ali", assume le Gabonais, imperturbable. "Ca ne m'empêche pas d'+être Charlie+. Je connaissais Wolinski, il était venu dans un festival à Libreville il y a quelques années. Tignous, je l'ai rencontré au Cameroun. Je fais le même boulot qu'eux", dit-il, évoquant deux des caricaturistes assassinés le mois dernier.

La participation d'Ali Bongo à la "grande marche républicaine" organisée à Paris quelques jours après le drame, parmi des dizaines d'autres chefs d'Etat, lui avait valu bien des accusations de "récupération". Mais pour Pahé, tout le monde en profite: même "Charlie a tiré à 5 millions d'exemplaires après ça, ils n'ont jamais autant vendu !"

Et la liberté d'expression au Gabon alors ? Comme un fil rouge, la question revient régulièrement dans la BD de Pahé. "Oui, il y a un problème", estime Pahé.

"La plupart du temps, nos censeurs étaient nos propres rédactions", écrit-il en préambule de son livre, lui qui a longtemps été dessinateur de presse et à la télévision TV+, une chaîne privée appartenant à l'ancien ministre influent André Mba Obame, devenu opposant.

Un brin ironique, il enchaîne: "Tu peux dessiner tout le monde, sauf le patron, sa femme, ses copines, ses enfants, la liste de quelques ministres et grands types qui font vivre le journal qui te paie."

Et que l'on travaille pour des journaux d'Etat ou indépendants, "il y a une forme d'autocensure", dit-il.

Pahé passe désormais le plus clair de son temps dans sa ville natale de Bitam, dans le nord du Gabon, d'où il publie ses dessins sur son blog - il cumule plus de 15.000 abonnés sur Facebook.

Il a signé plusieurs livres dont "Gabonais, Gabonaises" (recueil de dessins de presse), "Dipoula" (une BD qui raconte la vie d'un jeune albinos) mais surtout "La vie de Pahé", son autobiographie qui a été portée à l'écran.

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