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Bitouck-Bibium : Rencontre avec les pionniers du groove équato-guinéen moderne
Publié le mardi 26 aout 2014   |  Gabon Review


Bitouck-Bibium,
© Autre presse par DR
Bitouck-Bibium, assailli sur scène par les filles lors de la semaine culturelle d’Ebeigne


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On n’entend qu’eux chez les marchands de CD à la gare routière et dans de nombreux lieux de divertissement de Libreville. Bitouck-Bibium (Les carcasses) de la Guinée Equatoriale sont le dernier phénomène musical de la sous-région. Entretien avec ces étudiants en science-po qui font sauter les pistes de danse de trois pays déjà.

«Nous pratiquons le Moturang-Kui Rap», ont déclaré Jony Flow et El GB, le duo qui fait danser la Guinée Equatoriale, le Gabon et le Cameroun depuis deux ans avec ce style de musique traditionnelle, légèrement modernisé, sur fond de rap. Rencontrés récemment lors de la Semaine culturelle d’Ebeigne, un village situé à 17 km d’Oyem sur la route de Mitzic, où ils ont donné deux concerts, ces jeunes étudiants en Sciences Politiques à l’université de Malabo ont été abordés par Gabonreview.

Gabonreview : C’est la première fois que vous arrivez au Gabon pour un spectacle, à la faveur de la semaine culturelle d’Ebeigne. Comment trouvez-vous le public gabonais?

Jony Flow : Il faut dire que ces premières prestations au Gabon (qui est aussi notre pays parce que beaucoup de nos parents y sont originaires et y vivent) nous ont donné une bonne impression. Presque tout le public chantait en même temps que nous notre répertoire. Cela prouve que nos musiques marchent très bien dans ce pays, surtout chez les filles. Vous avez vu comment elles montaient tout le temps sur scène pour danser avec nous. Bien enetendu, le public n’était pas aussi nombreux que celui des spectacles que nous donnons chez nous ou au Cameroun. D’un autre côté, l’accueil a été très chaleureux. Cela ne nous a d’ailleurs pas trop surpris, parce que c’est dans notre culture, nous les fangs.

Les mélomanes qui vous suivent ne vous connaissent que par vos noms d’artistes Jony Flow et El G.B. Quels sont vos vrais noms? Et en dehors de la musique, que faites-vous dans la vie?

Jony Flow : Jony est mon prénom auquel j’ai ajouté Flow, pour que cela sonne comme un américain. C’est mon nom d’artiste. Et mon vrai nom est Ododome. C’est le nom du petit frère de ma mère que cette dernière m’a attribué. Comme vous voulez en savoir plus, j’ajouterai que j’ai 26 ans, je suis né à Agnizock et je passe en deuxième année de Sciences Politiques à l’université de Malabo. Je pratique la musique depuis 3 ans.

El G.B.: Moi, je suis né à Eyameyong, au sud de mon pays. Je m’appelle Estiven et mon nom d’artiste est El G.B. Je vais en 3ème année de Sciences Politiques dans la même université que Jony Flow. Je pratique également la musique depuis 3 ans.

Comment vous êtes-vous mis dans la musique ?

Jony Flow et El G.B. : Nous avons commencé en nous amusant avec quelques amis du quartier et de l’école. Nous faisions le rap comme les américains et les gens nous qualifiaient de talentueux. Ensuite, je (El GB) suis allé en Espagne pour quelques années d’études. A mon retour, j’ai fait la connaissance de Jony Flow, il y a un an et demi, alors qu’il chantait le rap avec un autre groupe. Au regard de l’indiscipline qui régnait dans ce groupe, lui et moi on s’est rendus compte, non seulement qu’on n’évoluait pas dans le désordre, mais aussi, que le public intéressé par le rap américain n’est composé que de quelques jeunes. Pour ratisser large, nous avons décidé d’évoluer en duo et de pratiquer le Moturang-Kui en le mettant au goût du jour pour faire la différence avec les autres en faisant danser toutes les générations. Parce que le Moturang-Kui est une musique traditionnelle jouée avec les balafons que nos aïeux pratiquaient lors des moments festifs.

A la suite de cette décision, nous avons mis un album sur le marché intitulé, ’’Ening Ene Zéro’’ (La vie n’est rien). C’est cet album qui nous a dévoilé au grand public, depuis sa sortie il y a trois ans et demi. Il faut dire que cet opus nous a causé des problèmes. Parce que nous avions glissé un titre de P.Square joué dans notre style et chanté en fang que nous avons intitulé ’’Akane Ebele Poder’’ (La fesse a le pouvoir) sans son autorisation ; parce que nous ne maitrisions pas les normes internationales qui régissent l’organisation de la musique. Ce titre qui a également bien marché a contribué à nous faire connaître même au-delà de nos frontières. Ce qui a d’ailleurs énervé P.Square et il est venu se plaindre chez le deuxième vice-président de la République de Guinée Equatoriale, Son excellence Théodorin Nguema Obiang, nous accusant d’avoir plagié son titre. Ce dernier, en homme sage et responsable nous a blâmé et nous a conseillé de composer nos propres chansons. Pour relever ce défi et prouver à l’opinion que nous sommes des auteurs et compositeurs nés, nous avons mis sur le marché un second album, ’’Mewoulayou Ka’adzi’’ qui cartonne très fort en ce moment en Guinée Equatoriale, au Gabon, au Cameroun et au delà. Puisqu’il est dansé par la diaspora africaine en Europe.

Où avez-vous joué avant cette sortie dans le Nord du Gabon ?

Jony Flow : En dehors de notre pays où nous sommes considérés comme de véritables stars, nous avons joué au Cameroun où nous étions encore il y a quelques jours. Nous avons des invitations ici et là en Afrique, mais nous ne voulons pas en parler tant que rien n’est encore sérieux. Pour revenir au Gabon qui est aussi notre pays et que nous aimons beaucoup pour plusieurs raisons, je me permets d’avouer notre déception et notre regret au sujet des agissements de certaines personnes à Oyem : elles font les communiqués radiodiffusés, de la publicité précisant qu’ils organisent des spectacles auxquels nous participerons, sans nous contacter. Ce qui n’est pas vrai. Elles profitent de notre succès pour glisser nos noms dans leurs business afin de remplir les salles et annoncer ensuite, «Désolé, ils ne sont pas là pour des raisons de visas». Il faut que ces gens arrêtent de berner les Oyemois qui sont une population respectable. Ils n’ont pas besoin de mentir. S’ils veulent nous inviter, il suffit de respecter la procédure.

Combien d’album avez-vous déjà sur le marché ?

Jony Flow : Trois albums au total que nous venons d’ailleurs d’enregistrer en MP3 en retirant le titre litigieux. Parmi les choses qui nous embêtent aussi, il y a qu’en Guinée Equatoriale des gens enregistrent nos chansons et les vendent sans se référer à nous. Nous comprenons qu’il n’y a aucun système de contrôle sur la musique chez nous, mais qu’on nous demande au moins notre avis comme en Europe.

Quand on écoute vos chansons, on constate que vos thèmes sont basés sur la conscientisation ou la moralisation des citoyens sur les maux qui minent nos différentes sociétés. L’abus d’alcool sans précaution par exemple, mais vous évitez de parler de politique. Pourquoi ?

Jony Flow : C’est vrai. Nous voulons que tout le monde se comporte dignement. Il faut être exemplaire dans la vie comme un père modèle. Pas celui-là qui rentre saoul à la maison à des heures tardives et se met à battre sa femme et ses enfants par exemple. Ou cet instituteur qui met enceinte une fille mineure, sachant que les études de cette dernière vont être hypothéquées à cause de cette grossesse. C’est notre combat même si nous sommes conscients qu’il est difficile.

Quant à la politique, nous la laissons pour les autres. Nous ne sommes pas des artistes engagés. C’est vrai, nous nous inspirons de tout ce qui se passe autour de nous et de ce que nous vivons au quotidien. Quand un sujet capte l’un d’entre nous, nous nous asseyons pour écrire le texte et chercher la mélodie. Avec sa voix de rossignol, El GB chante les refrains et moi je rap les couplets. Même s’il arrive à chacun de jouer les deux rôles. C’est d’ailleurs grâce à sa voix et sa sagesse que j’ai accepté qu’il soit mon alter ego. Vous savez, El GB a commencé avant moi. Il jouait dans un groupe appelé Play Boys qui avait sorti un CD dont le titre phare était ’’Emone Madzing Ane Vé ?’’ (Où est celle que j’aime). C’est en écoutant sa façon de chanter que je me suis dit qu’on peut faire chemin ensemble. Et voilà le résultat. Vous voyez que j’ai misé sur un bon cheval.

Vous êtes étudiants, comptez-vous faire carrière dans la musique ou envisagez-vous autre chose ?

El GB : Vous savez, la musique ne nourrit vraiment pas son homme en Afrique. Surtout quand il rentre dans la vieillesse. Nous voulons d’abord terminer nos études et avoir un travail assurant. La musique nous accompagne toujours tant que nous pouvons chanter, jouer et danser.

Depuis votre explosion, votre succès fou auprès du public ne vous monte pas à la tête ?

Jony Flow : Vous étiez dans la délégation qui est venue nous chercher en Guinée Equatoriale. Nous vivons dans le même hôtel depuis plusieurs jours et vous nous conduisez comme guide ici à Oyem. Avez-vous trouvé que le succès nous monte à la tête ?

Vous êtes déjà considéré comme la relève de Maéllé Ndong et Béssosso, les stars équato-guinéennes des années 1980-90. Qu’est-ce que cela vous inspire?

Jony Flow : C’est une situation de fierté si les gens pensent que nous pouvons remplacer ces sommités de la musique équato-guinéenne des années 1980-1990. Mais n’oubliez pas qu’il y a certains qui ne voient pas d’un bon œil ce que nous faisons. La vie est faite ainsi et nous faisons avec.

Pourquoi aucun de vous ne joue d’aucun instrument de musique ? Et puis, vous ne vous faites pas accompagner en live lors de vos spectacles, vos musiques sont toujours programmées sur ordinateur…

Jony Flow : C’est vrai. Depuis le début, nous ne jouons qu’avec les musiques programmées sur ordinateur. Mais que nos fans qui aiment le jeu des instruments de musique se rassurent, nous sommes déjà dans l’apprentissage de quelques instruments de musique. D’ici là ça ira. Nous apprenons vite et bien…

Plusieurs artistes gabonais viennent en Guinée Equatoriale, soit pour des spectacles, soit pour d’autres raisons. Quels rapports avez-vous avec eux ?

Jony Flow : Nous n’avons pas de rapports particuliers parce que nous ne nous connaissons pas. C’est seulement pendant cette semaine culturelle à Ebeigne que nous faisons la connaissance de Ndong Mboula, Sima Mboula et quelques autres artistes gabonais qui sont venus jouer ici comme nous. Nous nous sommes présentés. Nous avons causé et nous avons échangé nos adresses. Nous espérons seulement que cela ne s’arrêtera pas là. Surtout que nous avons déjà peaufiné quelques projets communs.

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