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Gabon : Véritable naufrage médiatique et politique, l’interview de Jean Ping sur RFI et France 24 provoque un profond malaise à Paris comme à Libreville et renforce les interrogations sur la lucidité du vieux leader de l’opposition
Publié le samedi 15 juillet 2023  |  LaLibreville.com
L’opposant
© Autre presse par DR
L’opposant gabonais Jean Ping dans les studios de RFI et France 24, jeudi 13 juillet 2023
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En séjour pour soins à Paris, Jean Ping a accordé ce jeudi 13 juillet une interview couplée à RFI et France 24. Mais le candidat malheureux à l’élection présidentielle de 2016 a livré une prestation stupéfiante. Fuyant certaines questions, répondant à d’autres de manière cursive et elliptique, semblant vivre tantôt dans le passé tantôt dans une autre réalité et plombant ses « amis » de l’opposition, il a suscité un profond malaise à Paris comme à Libreville. Récit d’un naufrage médiatique et politique.

« Mon Dieu, gardez moi de mes amis. Quant à mes ennemis, je m’en charge ! » Cette citation de Voltaire, l’opposition gabonaise pourrait la faire sienne. Invité de RFI et de France 24, Jean Ping a livré une prestation stupéfiante, suscitant un profond malaise à Paris comme à Libreville.

A Paris, car c’est là, dans la capitale française, que l’interview a eu lieu. D’emblée le ton est donné. « Bonjour Christophe… euh Jean Christophe », répond Ping à une question de… Marc Perelman, confondant le journaliste de France 24 avec son confrère de RFI, Christophe Boisbouvier. « 2016 n’est pas dernière nous », affirme ensuite le leader de la CNR, confirmant que pour lui le compteur s’est bloqué à ce moment-là.

Viens ensuite la question que tout le monde se pose. « Serez-vous candidat à l’élection présidentielle de 2023 ? », lui demande-t-on. « Non, je ne serai pas candidat », répond dans un premier temps Jean Ping. C’est clair, c’est net. « Sauf si », ajoute-t-il aussitôt, « cette élection a pour objet de réparer le Gabon, de rassembler les gens ». Donc peut-être que oui, peut-être que non, comprenne qui pourra…

« Dites-nous ce que vous voulez M. Ping ? », demande, passablement agacé, Marc Perelman, qui souhaite avoir des réponses précises. Hélas pour lui, Ping se montre tout aussi évasif. On peine en effet à distinguer si Jean Ping veut ce qu’il appelle de « vraies élections » ou une « transition » dont il serait porté à la tête.

« Bon vent » à l’opposition

Au malaise à Paris va rapidement en succéder un autre. A Libreville celui-ci, au sein de l’opposition. Pour tenter de sauver leur interview, les deux journalistes passent à une autre séquence. « Les candidatures à la présidentielle se multiplient mais les opposants affirment que d’ici au 26 août, ils trouveront un candidat de consensus comme vous, M. Ping, vous l’étiez en 2016. Est-ce que vous y croyez ? », demande Marc Perelman. La réponse de Ping tombe, cinglante, sous le regard médusé des deux journalistes : « Je le souhaite simplement bon vent ». « Rien de plus ? », insiste l’un des journalistes, interloqué. « Rien de plus », confirme, cursif, Ping.

Mais le pire, pour les opposants, restent à venir. « Il y a tout de même des candidats très sérieux qui se présentent […] Est-ce que, parmi eux, il y a quelqu’un ou quelqu’une qui a le profil d’un candidat de consensus comme l’était Jean Ping en 2016 ? », demande Christophe Boisbouvier, tendant généreusement la perche à Ping. « C’est ce qu’on verra, pour le moment ça ne se dessine pas sous cette forme-là. » « Vous en voyez un ou une qui a profil qui a peut-être votre profil d’il y a sept ans ? », insiste le journaliste de RFI a haussant la voix, lui aussi agacé des non-réponse de Ping. « Je n’y ai même pas pensé », répond l’intéressé, sur le même ton placide et désinvolte.

Pour sauver les apparences et tenter d’obtenir quelque chose, Christophe Boisbouvier abat sa dernière carte citant les noms que Ping se refuse de prononcer : ceux de Barro Chambrier et de Missambo. « J’imagine que vous observez leurs candidatures avec intérêt ? » « Non, je leur souhaite simplement bon vent », balaye-t-il pour couper court à cet échange. Et d’insister : « Je n’ai pas de préférence à donner dans ces conditions-là. »

Naufrage médiatique et politique

En réalité, si Ping se garde d’adouber tel ou tel candidat, c’est pour entre autres deux raisons comme nous l’a expliqué clairement un professeur en science politique dans une récente et éclairante interview (disponible ici). « Jean Ping considère qu’il n’a pas d’héritier naturel dans l’opposition. Aucun candidat ne trouve véritablement grâce à ses yeux. A tort ou à raison, il juge qu’ils ne sont pas à la hauteur, qu’ils ne lui arrivent pas à la cheville », avance en guise de première explication l’universitaire.

Car il y en a une seconde, peut-être est-ce d’ailleurs la principale. « En politicien madré, Jean Ping n’entend pas lâcher le leadership qu’on lui prête au sein de l’opposition. Comme tous les grands hommes politiques, il n’envisage pas sa mise en retrait. Il veut mourir sur scène, pour reprendre une expression connue. Or, il sait que s’il donne sa bénédiction à tel ou tel candidat, c’en sera fini de son magistère au sein de l’opposition gabonaise. Et ça, il n’y tient pas. En tout cas, pas encore », indique l’universitaire, l’un des meilleurs analystes politiques du pays.

Ces explications éclairent dans une large mesure les propos de Jean Ping lors de cette – stupéfiante – interview sur RFI et France 24. Mais elle ne dissipe pas pour autant les questions qui se font de plus en plus pressantes sur l’état de santé réel (sur son degré de lucidité en particulier) du vieux leader de l’opposition, bientôt âgé de 81 ans (lire notre article). Sa prestation, véritable naufrage médiatique et politique, suscite incontestablement un malaise (comme lorsqu’il revient sur ses propos mettant en cause l’ex-ministre français de la Défense de l’époque, Jean-Yves Le Drian, dans « l’attaque » de son QG le 28 août 2016). Elle plombe un peu plus la campagne, déjà poussive d’une opposition moribonde et met un peu plus de vent dans les voiles du candidat de la majorité, Ali Bongo Ondimba, plus que jamais grandissime favori du scrutin.
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