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Billie-By-Nze 100 jours plus loin : Pilatisme et humilité
Publié le mardi 25 avril 2023  |  Gabon Review
Alain-Claude
© Autre presse par DR
Alain-Claude Billie By Nzé, Porte-parole de la présidence de la République
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Selon la formule de François Hollande, le président de la République est «président de tout, chef de tout et en définitive responsable de rien». Conscient de l’étroitesse de sa marge de manœuvre, on invitera le gouvernement à moins d’exubérance.

Des réformes menées en opportunité finissent toujours par révéler leur illégitimité. Des lois destinées à régler des cas particuliers finissent toujours par cracher leur injustice. Un jour ou l’autre, leurs initiateurs en découvrent l’inutilité. Tôt au tard, leurs défenseurs finissent par recevoir la monnaie de leur pièce. Soutien inconditionnel des dernières révisions constitutionnelles, le Premier ministre doit en faire l’expérience : ne partageant plus le pouvoir exécutif avec le président de la République, il doit quand même présenter son bilan d’étape. Devant travailler «sous l’autorité» et non plus «sous l’autorité du président de la République et en concertation avec lui», il est invité à rendre des comptes. «Responsable devant le président de la République», et non plus «devant le président de la République (…) dans les conditions et les procédures prévues par la (…) Constitution», il doit néanmoins prendre sur lui.

Les 12 chantiers d’Ali Bongo

En janvier 2018, nombre d’observateurs avaient émis des réserves sur la pertinence de la réforme constitutionnelle, mettant en garde contre le découplage du pouvoir de la responsabilité. Se fondant sur des précédents historiques, ils en présentaient les effets pervers. Alors président de l’Union nationale (UN), Zacharie Myboto s’élevait contre le ravalement du «Premier ministre au rôle de contremaître de ses ouvriers que sont les membres du gouvernement». «Je ne vois pas en quoi un régime présidentiel serait antidémocratique», lui rétorquait Alain-Claude Billie-By-Nze. Comme si régime présidentiel et présidentialisme renvoyaient à la même architecture institutionnelle. «Même si la prééminence présidentielle fait écho à la pratique politique des régimes présidentiels, le projet de révision constitutionnelle veut acter la naissance d’un régime hybride voire bâtard, au confluent de catégories très mal connues des juristes», alertions-nous pour établir ce distinguo. En pure perte…

Comment demander des comptes à un Premier ministre dépouillé de tout pouvoir exécutif ? Comment lui exiger un bilan quand la Constitution le met à la merci de la seule volonté du président de la République ? N’est-il pas plus pertinent de se tourner vers le «détenteur suprême du pouvoir exécutif» ? Ne faut-il pas faire le lien entre capacité d’action et responsabilité, privilèges et sujétions, droits et devoirs ? Aux termes de la Constitution, le président de la République «détermine la politique de la nation» seul et non plus «en concertation avec le gouvernement». Dès lors, les 12 chantiers énoncés par Alain-Claude Billie-By-Nze sont ceux d’Ali Bongo. Comme diraient les spécialistes du bâtiment et des travaux publics (BTP), les rôles sont ainsi répartis : au peuple gabonais la maitrise d’ouvrage ; au président de la République, la maîtrise d’œuvre ; au gouvernement, l’exécution. Or, le maître d’œuvre est garant du respect des cahiers des charges. Par conséquent, il lui revient de rendre compte.

Dérive présidentialiste

Depuis l’arrivée d’Ali Bongo au sommet de l’Etat, les pouvoirs du président de la République ont été sans cesse renforcés. Même si le gouvernement et la Cour constitutionnelle ne l’entendent pas de cette oreille, cette dérive présidentialiste a bousculé les équilibres institutionnels. Désormais, le chef de l’Etat cumule ses prérogatives avec celles du chef du gouvernement, de jure comme de facto. Or, on ne peut être «président de tout, chef de tout et en définitive responsable de rien», selon la formule de François Hollande. On ne peut concevoir seul une politique sans assurer le suivi de sa mise en œuvre. On ne peut suivre la mise en œuvre sans faire d’évaluation. On ne peut avoir le pouvoir d’évaluer sans être tenu de rendre compte. Au-delà, on ne peut avoir l’autorité absolue et renvoyer la responsabilité à autrui. Comme dans le BTP, le maitre d’œuvre doit soumettre son rapport au maitre d’ouvrage. A ce dernier de formuler d’éventuelles réserves puis de signer le procès-verbal.

Au vu des bouleversements engendrés par les multiples révisions constitutionnelles, on ne se lassera jamais d’interpeller le président de la République et son cabinet. Sans sombrer dans l’inutile polémique politicienne, on leur demandera d’assumer les conséquences de leurs actes et de rendre compte au peuple souverain. Sous aucun prétexte, on ne cautionnera le pilatisme. De même, on invitera le gouvernement à moins d’exubérance. Conscient de l’étroitesse de sa marge de manœuvre, on lui conseillera l’humilité. Les 100 premiers jours d’Alain-Claude Billie-By-Nze ? Comme ceux de ces prédécesseurs, ils porteront la marque du bidouillage juridique et de la désarticulation de l’édifice institutionnel. On veut bien demander des comptes au gouvernement. Mais la pratique politique et le libellé des articles 8 et 28 de la Constitution désignent un seul et unique détenteur du pouvoir exécutif.
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