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L’Archevêque de Libreville et la transparence électorale : Dans le respect de la DSE
Publié le mardi 10 janvier 2023  |  Gabon Review
Jean-Patrick
© Autre presse par DR
Jean-Patrick Iba-Ba
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Lors des vœux au président de la République, Jean-Patrick Iba-Ba s’est fait le relais de populations gagnées par la désespérance, laissant transparaitre ses craintes pour le vivre-ensemble. Ce faisant, il s’est s’inscrit dans la traduction en actes de la Doctrine sociale de l’Église (DSE).

Avec quels mots faudra-t-il décrire le malaise démocratique de notre pays ? Quelle personnalité aura assez de poids pour susciter une remise en cause ? L’Archevêque de Libreville ? Lors des vœux au président de la République, Jean-Patrick Iba-Ba a réagi à la proposition d’Ali Bongo relative à «l’organisation d’une rencontre pour définir (…) les bases de la préparation des scrutins au lendemain apaisé». Voulant faire de 2023 «une année de vérité, de justice et d’apaisement des tensions politiques», il s’est dit disposé à «intercéder pour la préservation de la paix», marquant la disponibilité du clergé à «jouer pleinement (son) rôle d’écoute et de médiation.» Dans la forme comme dans le fond, il s’est fait le relais de populations gagnées par la désespérance, laissant transparaitre ses craintes pour le vivre-ensemble.

Message réaliste, prospectif et désintéressé

Si son discours fait quelque peu écho à celui de certains acteurs politiques ou animateurs de l’espace civique, l’Archevêque de Libreville ne peut être soupçonné de rechercher un intérêt personnel. A la différence des responsables de partis, il n’est candidat à rien : il ne guigne ni la fonction présidentielle ni la direction d’une collectivité locale ni un siège de parlementaire. Si de telles idées venaient à le traverser un jour, ce serait au prix d’un spectaculaire renoncement. S’il exige la transparence électorale, ce n’est pas par calcul politicien. S’il se propose d’assurer une médiation, ce n’est guère par réflexe partisan. S’il dénonce le mal-être des populations, ce n’est nullement par visée électoraliste. Son message est à la fois réaliste, prospectif et désintéressé. Le président de la République fera-t-il mine de n’avoir rien entendu ? Pour quelles conséquences ? Dans quel intérêt ? Le sien ? Celui de ses proches ou de sa famille politique ?

Il suffit de se remémorer des présidentielles de 1993, 2009 et 2016 pour s’en convaincre : des élections truquées catalysent toujours une régression morale et sociale avec, à la clef, des morts et mutilés, des emprisonnements arbitraires, des destructions d’infrastructures, des pertes d’emplois… Même si Omar Bongo s’était maintenu au pouvoir, l’élection de 1993 reste le tombeau du renouveau démocratique et de l’éthique républicaine : en précipitant le pays dans le cycle des arrangements d’arrière-boutique, elle a favorisé l’enracinement d’une culture de la corruption. Quand bien même Ali Bongo avait fini par prendre le pouvoir, celle de 2009 a achevé de discréditer les institutions, les présentant comme des officines au service exclusif d’une famille. Si celle de 2016 a renforcé la défiance populaire vis-à-vis des institutions, elle a élargi les lignes de fracture au sein de la société, coupant le peuple de son armée.

Risques d’effondrement de la société

Sauf à faire montre de cynisme, on ne peut rester insensible à l’exhortation de l’Archevêque de Libreville. A moins de ne nourrir aucune ambition pour la communauté nationale, on ne peut balayer sa proposition d’un revers de main. Si l’on n’est pas obligé de s’en saisir, elle n’en demeure pas moins lourde de sens. Dans un pays peuplé à 80% de chrétiens, majoritairement des catholiques, le responsable de la plus grande province ecclésiastique est forcément une autorité morale de premier plan. Loin de toute arrière-pensée, il faut considérer son offre. Jean-Patrick Iba-Ba a parlé de «vérité», de «justice», des «tensions politiques», de «paix» et d’«écoute». Or, la paix sociale a trop souvent été compromise par des tensions nées du refus de restituer la vérité des urnes. Quant à la juridiction constitutionnelle, elle s’est compromise en refusant d’entendre les arguments des parties flouées, jugeant «irrecevables» toutes les demandes en ce sens.

Certes, comparaison n’est pas raison. Certes, d’aucuns ont tôt fait de remettre en cause les résultats. Mais, en 2018, en République démocratique du Congo, l’église catholique prît la mesure des risques d’effondrement de la société. Redoutant le pire, la Conférence épiscopale de ce pays forma puis déploya pas moins de 40. 000 observateurs. Cette implication n’avait pas pour but de favoriser un camp ou un candidat. Comme l’intervention de l’Archevêque métropolitain de Libreville, elle s’inscrivait dans la traduction en actes de la Doctrine sociale de l’Église (DSE). Comme ses homologues congolais, Jean-Patrick Iba-Ba invite simplement le pouvoir politique à inscrire son action dans le respect de quatre principes : la dignité de la personne humaine, le bien commun, la subsidiarité et la solidarité. Peut-on feindre de ne pas le comprendre ?
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